La géophysique applique les moyens de la physique à l’étude de la structure des terrains. Elle se pratique à partir de la surface du sol (géophysique de surface), dans un forage au moyen d’une sonde portant les instruments de mesure (diagraphies) ou entre forages, forage et surface, forage et galerie (géophysique de forage). C’est l’une des approches utilisées pour la reconnaissance géotechnique du site avant la construction d’un ouvrage (bâtiment, infrastructure urbaine ou infrastructure de transport, barrage…). La reconnaissance géotechnique d’un site consiste à déterminer la nature et la répartition des matériaux dont il est composé et à déterminer leurs propriétés. Ces éléments servent à préciser l’emplacement ou le tracé de l’ouvrage à construire, à concevoir ses fondations et à décider des procédés de construction. Une grande partie des reconnaissances s’applique à l’hydrogéologie et en particulier aux relations de l’ouvrage avec l’eau.
La reconnaissance se traduit par l’élaboration d’un modèle géologique. Un modèle géologique est un ensemble de représentations d’un site sous ses différents aspects (nature, répartition, propriétés des matériaux qui le constituent). Ces représentations prennent matériellement la forme de cartes, de coupes, de blocs diagrammes, de coupes de sondages, de textes ou même de maquettes.
Au départ, la reconnaissance est toujours fondée sur un premier modèle géologique, qui peut être très sommaire, imprécis ou peu fiable. Le but de la reconnaissance est de l’améliorer, de le rendre fiable, précis, le plus complet possible afin de permettre une conception de l’ouvrage qui repose sur les données dont on a besoin et qui soient les plus sûres possible.
Une qualité indispensable du modèle géologique est sa cohérence. Toutes les méthodes employées pour la reconnaissance consistent à faire des observations et des mesures et à les interpréter. Observations et mesures ne peuvent se faire qu’à partir de la surface du sol ou d’excavations (forages, galeries, tranchées, puits…); leur interprétation doit conduire à la description du sous-sol partout dans son volume. C’est là que l’exigence de cohérence intervient : les interprétations doivent être compatibles. Plus les méthodes utilisées sont variées, plus les contraintes sur l’interprétation sont fortes et plus la vérification du critère de cohérence rend fiable le modèle géologique élaboré.
Grands problèmes de reconnaissance dans le domaine du génie civil
Caractérisation des sols grossiers naturels
Les sols à granulométrie étalée se rencontrent fréquemment dans les régions montagneuses (éboulis, moraines, dépôts de lave torrentielle, cônes de déjection torrentielle, alluvions, …). La construction d’ouvrages, et notamment d’ouvrages en terre (digues, merlons deprotection contre les risques naturels) sur ce type de sols, ainsi que leur réemploi comme matériaux de remblai (éloignement des zones d’approvisionnement en granulats) impose une bonne connaissance de ces matériaux .
La caractérisation de ces sols par les méthodes géotechniques traditionnelles est cependant rendue très difficile, voire impossible, par la présence d’hétérogénéités (galets, cailloux, blocs…) de dimension décimétrique à métrique, et ce pour au moins deux raisons:
➤ In situ, la nature ponctuelle des essais mis en œuvre est inadaptée à l’hétérogénéité des matériaux grossiers étudiés, chaque essai pouvant affecter au hasard une zone meuble ou une zone de blocs. Un essai de pénétration dynamique, ou a fortiori statique, est en effet facilement stoppé par la présence d’un bloc de taille décimétrique. Les essais nécessitant la réalisation préalable d’un forage, tels que le Pressiomètre ou le Phicomètre, sont en pratique limités à des tailles de blocs de l’ordre de 150 mm (norme NF P 94-120).
➤ Au laboratoire, les essais de caractérisation mécanique sur des matériaux grossiers réalisés au triaxial ou à la boite de cisaillement direct ont souligné la nécessité d’utiliser des appareils de dimension nominale au minimum 10 fois supérieure au Dmax du matériau testé. En pratique, cette condition limite ce type d’essais à des matériaux comportant des éléments de diamètre 100 mm. En d’autre termes, lorsque la dimension des plus gros éléments excède 100 à 150 mm, le volume élémentaire représentatif (VER) du sol devient beaucoup trop important (norme NFP 94-056) pour les dispositifs d’essai classiques.
Dans un tel contexte, les mesures géophysiques, non-intrusives et capables d’investiguer simultanément un grand volume de sol, constituent une alternative intéressante aux essais géotechniques in-situ. Leur rapidité de mise en œuvre et leur coût relativement modéré, peut permettre une caractérisation des matériaux hétérogènes sur une surface étendue, ainsi qu’éventuellement une détection des variations latérales à l’échelle du site. Si les méthodes géophysique ne permettent pas d’accéder directement aux propriétés mécaniques du sol en grande déformation, des corrélations existent entre les paramètres géophysiques et géotechniques.
La caractérisation du sol par les méthodes géophysiques suppose l’existence de corrélations entre les propriétés mesurées (observables géophysiques) et les caractéristiques géotechniques ou physiques du matériau qui soient directement utilisables (granulométrie, teneur en eau, propriétés mécaniques, …). Dans le cas d’un sol hétérogène à deux composants (par exemple, éboulis constitué de blocs décimétriques à métriques emballés dans une matrice fine), la mesure des propriétés géophysiques effectives du sol, ainsi que des propriétés individuelles de chacun de ses composants, peut permettre de remonter à sa composition, grâce aux lois de mélange issues des modèles d’homogénéisation.
Parmi les propriétés géophysiques facilement mesurables, la résistivité électrique montre un large éventail de valeurs entre les différents matériaux naturels, variant de quelques Ohm.m dans le cas des argiles ou des sols pollués à plus de 104 Ohm.m pour les roches telles le calcaire ou le granite. Si elle n’est pas directement reliée aux propriétés mécaniques du sol, la résistivité électrique d’un matériau hétérogène s’avère très sensible à la présence d’inclusions résistives ou conductrices qu’il contient.
Des études récentes concernant l’homogénéisation des sols hétérogène par la méthode d’inversion des ondes de surface ou par la tomographie électrique montrent qu’il est a priori possible, grâce à ces deux méthodes, d’estimer la composition d’un sol hétérogène bi-composant uniquement à partir de mesures géophysiques.
La détection des cavités souterraines
Les cavités souterraines sont une menace pour les constructions lorsque leur présence n’est pas détectée. En effet, si l’on construit au-dessus d’une cavité souterraine sans le savoir, on ne dimensionne pas l’ouvrage correctement et il peut se révéler fragile. Le poids de l’ouvrage fait céder le toit de la cavité et il s’ensuit une ruine brutale, d’autant plus grave qu’il peut y avoir des accidents corporels.
Les cavités rencontrées habituellement dans le domaine du génie Civil sont les carrières souterraines, les mines peu profondes et les cavités naturelles de dissolution.
On notera que les matériaux les plus fréquemment exploités en carrières (en dehors du sable, de l’argile ou de l’ardoise) sont des roches solubles susceptibles de donner dans certains cas des cavités naturelles. Il s’agit des roches carbonatées (calcaire et craie utilisés pour la pierre à bâtir, la chaux ou le ciment et pour l’amendement des sols siliceux) et des roches évaporitiques (essentiellement gypse, exploité pour le plâtre). La présence de tels matériaux dans le sous-sol doit donc inciter les maîtres d’œuvre à la prudence car les deux types de cavités, naturelles et anthropiques peuvent y être rencontrés.
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