Application à l’étude de transitoires
Base de données expérimentales ASTRIDE Le banc moteur ASTRIDE se compose d’une ligne d’admission avec deux réservoirs, d’un moteur dont le piston et le cylindre sont transparents et d’une ligne d’échappement avec un réservoir. Le moteur est un monocylindre quatre temps à quatre soupapes dont les propriétés sont résumées sur le tableau 5.1. La ligne d’admission est constituée d’un premier réservoir amont connecté à un second réservoir visible sur la figure 5.1. On trouve ensuite une vanne que l’on appelle aussi papillon qui permet de réguler la charge du moteur. Cet élément qui est géométriquement simple devient compliqué à discrétiser lorsqu’il est en mouvement comme dans le transitoire de charge. Un collecteur permet enfin de répartir les gaz frais vers les deux soupapes d’admission. La ligne d’échappement est plus longue que celle d’admission, le collecteur est situé juste après les soupapes et elle se termine par un grand réservoir. Les volumes d’admission et l’échappement sont à la pression atmosphérique. Les expériences menées sur ce moteur ont pour but d’étudier l’impact des transitoires sur l’écoulement et le spray dans le cylindre. Pour cette raison l’intégralité des mesures sur ce moteur a été effectuée sans combustion. La méthode PIV (Vélocimétrie par Image de Particules) permet une visualisation des champs de vitesse dans le cylindre. Deux types de PIV sont utilisées ici : • Une PIV à haute résolution temporelle avec une basse définition spatiale qui permet de suivre l’évolution temporelle du champ de vitesse tous les 6˚V. • Une PIV à basse résolution temporelle avec une haute définition spatiale qui ne donne qu’un champ de vitesse par cycle. On peut alors calculer l’évolution du cycle moyen. Les vitesses sont mesurées pendant les phases qui détermineront le champ de vitesse au moment de l’allumage car le champ de vitesse au moment de l’allumage est un des principaux paramètres qui influent sur le déroulement de la combustion. Ces phases sont l’admission et la compression. La PIV basse résolution donne les champs de vitesse pour 28 angles vilebrequin alors que la PIV haute résolution permet d’obtenir 120 champs de vitesse consécutifs. Une base de données recueillant les champs de vitesse mesurés par les méthodes PIV et les mesures de pression a été créée. On y trouve 3 points de fonctionnement en régime stabilisé, un transitoire de régime lent et un transitoire de charge rapide résumés dans le tableau 5.2. Chaque point de fonctionnement est ensuite décliné pour 3 durées d’injection d’essence (0, 1700 et 3900 ms) et 2 niveaux de tumble (1.2 et 1.5). Le niveau de tumble est modifié en ajoutant une pièce dans l’admission au niveau des soupapes. Le transitoire de régime passe de la vitesse de rotation 1000 tr/min à 1800 tr/min en 23 cycles soit 2 secondes. Lors du transitoire de charge, le papillon s’ouvre au maximum en 40 ms, soit moins d’un cycle. La différence de durée entre les deux transitoires peut s’expliquer par le fait que la charge est directement contrôlée par l’accélérateur alors que la plupart du temps les variations de régime n’en sont que des conséquences. Ici ces transitoires sont étudiés séparément alors qu’ils sont difficiles à isoler dans la réalité. On peut néanmoins citer le cas du véhicule passant d’un sol plat à une cote en maintenant une vitesse constante, dans ce cas, une augmentation de la charge permet de conserver le régime (et la vitesse du véhicule) constant
Régime stabilisé
Modélisation
Le modèle numérique couplé utilisé pour simuler le banc moteur ASTRIDE est représenté sur la figure 5.2. L’interface de couplage dans l’admission est placée le plus loin possible du collecteur et juste avant l’élargissement qui mène au papillon ainsi le collecteur bénéficie d’une modélisation plus précise, l’interface n’est pas trop proche des soupapes, un peu éloignée du collecte et la section est constante. Dans l’échappement l’interface de couplage pourrait être placée juste avant le premier coude qui est suffisamment éloigné du collecteur mais on a préféré la placer dans une région où la section est constante, après le deuxième coude. Toutes les variations de section dans les domaines monodimensionnels sont rapides et sont donc modélisées par des variations de section soudaines (cf. 2.5.2). Le modèle de papillon utilisé est présenté au chapitre 2 (cf. 2.5.3) et les volumes sont modélisés comme des réservoirs à pression constante dans l’échappement et variable dans l’admission. Les variations de pression avant le réservoir d’admission étant importantes, la pression imposée pour les simulations est la pression expérimentale (sonde 5 sur la figure 5.1). Afin de valider la mise en données du moteur les trois points de fonctionnement stabilisés sont calculés. Ces points de fonctionnement ont des régimes différents ce qui n’avait pas été le cas dans le chapitre précédent. Le premier point à 1000 tr/min correspond au régime des transitoires de charge et au début des transitoires de régime. Les deux suivants à 1500 et 1800 tr/min sont respectivement les vitesses de rotation du moteur pendant et à la fin du transitoire de régime.Pressions dans l’admission, l’échappement et le cylindre Les résultats dans l’admission des cycles stabilisés sont présentés sur la figure 5.3. La pression d’admission proche culasse à 1000 tr/min est en bon accord avec les résultats expérimentaux malgré une surestimation de l’amplitude des oscillations haute fréquence. Pour ces points de fonctionnement où le papillon est ouvert, les pressions dans la ligne d’admission sont très proches quel que soit le point de mesure (sondes 2, 3 et 4 sur la figure 5.1), c’est pourquoi on ne présentera ici que le point à l’aval du papillon (3). À 1500 tr/min le comportement simulé de la ligne soupapes fermées est conforme aux résultats expérimentaux. En revanche pendant que l’air est entraîné par le piston, les perturbations de pression prédites diffèrent des expériences. Trois raisons peuvent expliquer ces différences : • la pression imposée comme condition aux limites des simulations (pression expérimentale avant le réservoir) a des variations très raides qui peuvent poser problème au schéma numérique. • l’écoulement dans l’échappement est mal prédit ainsi lorsque la soupape d’admission s’ouvre, la pression dans le cylindre est erronée
Aérodynamique interne
Les champs de vitesse simulés sont moyennés sur 6 cycles pour chaque régime moteur et sont comparés aux mesures obtenues par la méthode PIV sur la figure 5.5. On s’intéresse à un moment de l’admission, correspondant à un angle de 135˚V, où les soupapes d’admission sont ouvertes et le piston descend et un autre pendant la compression avec les soupapes fermées et le piston qui remonte (240˚V). Ces moments correspondent à des vitesses du piston importantes et présentent ainsi de fortes vitesses du mélange gazeux. La vitesse maximale du piston augmentant avec la vitesse de rotation du vilebrequin, on trouve logiquement des vitesses plus élevées dans le cas à 1800 tr/min. On note aussi une légère différence dans le mouvement de tumble dont le centre de CALCULS DE TRANSITOIRES 99 rotation semble déplacé. Le comportement général de l’écoulement simulé peut être comparé aux résultats expérimentaux en gardant à l’esprit que les moyennes expérimentales sont calculées sur un échantillon de 100 cycles consécutifs. Ce nombre de cycles correspong à un temps physique important dont la simulation nécessiterait un temps de calcul trop long qui n’entre pas dans les objectifs de ces travaux. De fortes similitudes entre les simulations et les expériences sont mises en évidence : • Les niveaux de vitesse sont comparables pour tous les angles vilebrequin et les régimes comparés, mettant en évidence la capacité du solveur couplé à prédire les fortes vitesses pendant l’admission et la décroissance du niveau de vitesse dans le reste du cycle. • Les fortes vitesses se retrouvent dans les même zones et bien que le centre de rotation du mouvement de tumble soit difficilement identifiable, le mouvement est bien reproduit par la LES. En revanche on observe des régions où la LES sous-estime la vitesse du fluide. Cela est probablement dû au faible nombre d’échantillons utilisés pour la moyenne des calculs LES. La figure 5.6 permet de mettre en évidence la bonne prédiction du phénomène de tumble et notamment son centre de rotation par les simulations. Au point mort bas le centre de tumble est bien visible ur les résultats des simulations, c’est une zone de faible vitesse située généralement près du centre de la chambre, entourée de fluide en rotation. On peut quantifier l’intensité du tumble par le nombre de tumble T qui s’écrit pour un fluide de densité ρ en rotation autour du point de coordonnées (xc, yc, zc) T à la vitesse (u, v, w) T : T = 60 2πn R [(x − xc)w − (z − zc)u] dv R [(x − xc) 2 + (z − zc) 2] dv (5.1) Pour faciliter le calcul on considère que le centre de rotation est le centre de la chambre de combustion. L’évolution du nombre de tumble pour les régimes 1000 et 1800 tr/min est tracée sur la figure 5.7. Le tumble se forme pendant l’admission, se renforce au milieu de la phase de compression pour disparaître totalement à la fin de la compression, au point mort haut. On constante deux grandes différences dans l’évolution du tumble entre les régimes 1000 tr/min et 1800 tr/min : • Le niveau de tumble moyen diminue lorsque le régime augmente. En effet, l’augmentation que l’on remarque sur les champs de vitesse ne suffit pas à compenser l’augmentation du régime n dans la formule du nombre de tumble 5.1. • Le nombre de tumble est maximum pendant l’admission à 1000 tr/min alors qu’à 1800 tr/min le maximum est atteint pendant la compression. Ce phénomène particulièrement important dans l’expérience pour le régime 1000 tr/min n’est pas correctement prédit par les simulations. Toutefois, les simulations capturent la variation de l’angle vilebrequin pour lequel l’intensité du tumble est maximale entre les deux régimes moteur (i.e. pendant l’admission à 1000 tr/min et pendant la compression pour 1800 tr/min). L’évolution de l’intensité de tumble est bien prédite par les simulations pour le régime 1800 tr/min. En revanche à 1000 tr/min le nombre de tumble est fortement sous-estimé pendant l’admission. À partir des comparaisons avec les champs de vitesse expérimentaux, les niveaux de vitesse semblent correctement prédits. Les écarts observés sur le nombre de tumble peuvent potentiellement s’expliquer par une erreur dans l’orientation du jet issu des soupapes. Ce problème de prédiction du jet de soupape a été aussi mis en évidence par des travaux précédents [13] et est en cours d’investigation dans le cadre de la thèse de E. Nicoud. Il semble que l’utilisation des lois de paroi soit à l’origine de cette difficulté de prédiction des jets de soupapes qui parait être, pour la géométrie du moteur ASTRIDE, particulièrement exacerbés. Afin d’illustrer ce problème, la figure 5.8 représente les écoulements aux soupapes du moteur ASTRIDE comparés à ceux du moteur SGEmac (cf. chapitre 4) où ce type d’erreur n’a pas été observé. Pour le moteur ASTRIDE le jet issu de la soupape est orienté vers le centre de la chambre avec un décollement important en bout de soupape d’admission. Pour le moteur SGEmac, l’écoulement en sortie de la tubulure d’admission est orienté vers la culasse et les soupapes d’échappement. De plus le jet de l’autre côté de la soupape d’admission est faible dans SGEmac et non négligeable dans ASTRIDE. Ces écarts sont en partie dus aux différences géométriques des deux moteurs (soupapes plus verticales et culasse plus plate dans ASTRIDE) mais l’étude de l’écoulement sur d’autres configurations moteurs montre que les erreurs numériques telles que l’utilisation de lois de paroi au niveau des coins convexes des soupapes sont le principal problème. Nous n’avons pas pu dans le cadre de ce travail comparer les résultats expérimentaux avec nos calculs au niveau des champs de vitesses proche soupape car la nappe laser n’est pas dans le plan des soupapes et les hublots ne permettent de visualiser cette région.