Apis mellifera unicolor (Latreille 1804, Hymenoptera Apidae) et Varrroa destructor (Anderson and Trueman, 2000, Acari : Varroidae)

Apis mellifera unicolor (Latreille 14, Hymenoptera
Apidae) et Varrroa destructor (Anderson and Trueman,2, Acari : Varroidae)

Interaction hôte (A. mellifera) – parasite (V. destructor) 

Les mâles de V. destructor sont produits par parthénogénèse arrhénotoque, i.e. issue d’œufs non fécondés et donc haploïdes (n=7), les œufs fécondés évoluent en femelles diploïdes (2n=14) (Akimovia et al., 1986). L’œuf éclot 60 à 70 h après l’operculation de l’alvéole d’abeille. Le premier œuf pondu se développe en mâle, les suivants sont des femelles. La durée du stade embryonnaire est de 20 à 28 h pour les femelles, 26 à 30 h pour les mâles (Donzé and Guerin, 1994; Ifantidis, 1983; Martin, 1994). Une femelle fondatrice pond 5 à 7 œufs (Martin, 1995; Martin, 1998), la larve éclose passe le stade immature (Fig.9): protonymphe et deutonymphe (Martin, 1994). La nymphe mobile se nourrit et évolue en un immature immobile quiescent (deutonymphe). Il faut 6.5 à 6.9 j (mâle) et 5.5 à 6.2 j (femelle) pour qu’un œuf venant d’être pondu évolue en adulte naissant (Martin, 1994). Le mâle et la femelle montrent un dimorphisme sexuel apparent durant tous les stades de développement (Ifantidis, 1983; Rosenkranz et al., 2010). Les pattes de la femelle sont courtes et munies de structure spécialisées (apotèles) lui permettant d’adhérer sur son hôte (De Ruijter and Kaas, 1983). La femelle et le mâle ont des biologies complètement différentes. Le mâle pompe les réserves à l’intérieur des alvéoles, il est incapable de sortir des alvéoles, il s’accouple avec ses sœurs dans la cellule (adélphogamie). Lorsque deux femelles fondatrices pondent dans la même cellule, les croisements peuvent alors se faire entre individus non directement apparentés, ceci réduit la consanguinité en formant un brassage génétique au sein de la population de V. destructor (Fernandez and Coineau, 2002). La femelle est hématophage et vit au dépend de l’hémolymphe de l’abeille. Son cycle de reproduction est découpée en 2 phases successives (Rosenkranz et al., 2010), la phase phorétique et la phase reproductrice. Durant la phorésie, juste après l’émergence, elle s’attache sur le dos d’une abeille adulte de quelques jours à plusieurs semaines (Kuenen and Calderone, 1997). La dérive des ouvrières, le pillage et l’essaimage peuvent favoriser la transmission du parasite aux colonies adjacentes ((Kuenen and Calderone, 1997); un vol de butinage de l’abeille peut mener cet ectoparasite en dehors de la ruche hôte jusqu’à des trajets de 12 km (Frisch, 1967). Le vol d’accouplement de l’abeille atteignant une surface de 80 km2 (Ruttner, 1972) pourrait contribuer à disperser l’acarien à longue distance. Néanmoins, l’espèce ne peut survivre sans abeille que pendant une période de 18 à 70 h (Guzzman et al., 1993). Interaction hôte (A. mellifera) – parasite (V. destructor) 33 Figure 9. Résume d’un cycle de développement du V. destructor (F : femelle, M : Mâle, en rouge et violet, cycle de la femelle du V. destructor, en vert, cycle du mâle et en bleu, cycle de l’abeille). 1-La femelle fondatrice entre dans la cellule du couvain juste avant l’operculation et s’immerge dans la gelée larvaire, 2- après l’operculation, elle se nourrit l’hémolymphe de la nymphe et ponte des œufs, 3- mue larvaire, 4- mue imaginale, 5- accouplement, 6- sortie des femelles fécondées lors de l’émergence de l’abeille et dissémination (Nicolas Vidal-Naquet, 2008). Pathogénicité et virulence 34 Durant la phase de reproduction, la femelle se loge dans une alvéole à couvain de stade L5 pour l’accouplement et l’ontogenèse. L’ontogenèse des formes immatures se synchronise avec le cycle de développement de l’abeille (Garrido and Rosenkranz, 2003), Fig.10) puisque elle se déroule dans une alvéole de couvain operculée ; il parasite davantage les larves du fauxbourdon que celles des ouvrières ceci est due à la propriété plus attractive du couvain mâle (Le Conte et al., 1989). Une température et une humidité stable, une source de nourriture accessible, l’absence de prédateur dans les alvéoles operculées sont les conditions favorables pour la reproduction de V. destructor (Nazzi, 1994). 

Pathogénicité et virulence 

La femelle phorétique se nourrit de l’hémolymphe pour la maturation de ses œufs, l’action répétée réduit la teneur en protéine et le poids du corps de l’abeille (Weinberg, 1985). La spoliation quotidienne d’hémolymphe lors d’un parasitisme par une femelle adulte est estimée de 0,25 μl à 0,67 μl (Bowen‐Walker and Gunn, 2001). L’infestation réduit la durée de vol et augmente la perte des ouvrières durant le butinage (Kralj and Fuchs, 2006). Les colonies à forte charge en acarien sont affaiblies et produisent très peu de miel (Ericksen et al., 1998) elles sont souvent sujettes à la désertion (Celan, 1971). Les faux bourdons ont un nombre réduit de spermatozoïde, étant donné que le couvain mâle est le plus infesté par le parasite (Duay et al., 2002). Outre cette spoliation de fluides, l’infection par le V. destructor est souvent associée à la transmission ou l’augmentation des charges virales (Bowen‐Walker and Gunn, 2001). Il a été recensé environ 18 virus (Chen and Siede, 2007) affectant l’abeille dont les plus connus sont DWV, ABPV, CBPV, SBV, BQCV, KBV, IAPV3 , ces virus peuvent être transmis ou non par V. destructor. Certains virus sont transmis horizontalement des adultes malades aux couvains par contact de trophallaxie (Boecking and Genersch, 2008). Une transmission verticale de certains virus peut se faire du le mâle vers son sperme, de la reine vers ses œufs (Boecking and Genersch, 2008). L’infection virale peut générer des anomalies physiques des adultes telles les ailes déformées (Marcangeli, 1992), la réduction de la capacité du vol et de la longévité des ouvrières (Amdam et al., 2004). La taille des acini des glandes hypo-pharyngiennes est réduite jusqu’ à 3 Deformed Wing Virus (DWV), Acute Bee Paralysis Virus (ABPV), Chronic Bee Paralysis Virus (CBPV), Sacbrood Virus (SBV), Black Queen Cell Virus (BQCV), Kashmir Bee Virus (KBV) and Israel Acute Paralysis virus (IAPV) Facteurs limitant du développement de V. destructor 35 10 %. De plus, le V. destructor affaiblit le système immunitaire de l’abeille (Gregory et al., 2005) et la rend sensible aux attaques des autres pathogènes. Figure 10. Synchronisation du cycle de vie de l’abeille A. mellifera et du V. destructor (Denmark et al., 1991). La spoliation combinée à la mutilation plus la pathologie d’origine virale contribue à un affaiblissement de la colonie. Les butineuses très affaiblies ne peuvent plus revenir dans la ruche, elles meurent dans la nature, ou se retrouvent trainantes dans l’herbe avoisinant la ruche (2 ou 3 mètres près de la ruche) (Bailey, 1969). 

Facteurs limitant du développement de V. destructor 

La dynamique des populations de V. destructor diffère selon les régions géographiques du monde. Bien que le microclimat à l’intérieur de la ruche soit contrôlé par les abeilles, les conditions climatiques (Garcia Fernandez, 1997; Moretto et al., 1991) et les tendances saisonnières (Büchler, 1993) influencent directement ou indirectement (via l’hôte) la dynamique des populations de parasites. Le V. destructor a un comportement plus virulent dans les pays en milieu tempéré qu’en milieu tropical (Moretto et al., 1991). La tolérance signifie que la colonie infestée subit peu ou pas de pertes même si un agent pathogène ou un stress physiologique se produit (Dorland, 1990). La tolérance des abeilles au V. destructor varie d’une espèce à l’autre, une colonie d’A. cerana, son hôte d’origine, peut Facteurs limitant du développement de V. destructor 36 être infestée de plus de 800 acariens par ruche sans périr (Rath and Drescher, 1990). On parle d’un équilibre hôte- parasite. De plus, la tolérance à la varroase varie entre et au sein des populations de différentes sous-espèces (Fries et al., 2006). Les sous espèces issues de lignées européennes sont en général moins tolérantes à la varroase que les autres sous espèces. Les abeilles africaines (et leurs hybrides) telles A. m. scutellata, A. m. capensis ont été qualifiées tolérantes au V. destructor (Allsopp, 2007). La tolérance à la varroase de certaines populations d’abeilles peut être expliquée par différents paramètres naturels: -Paramètre 1: le Comportement hygiénique (Fig. 11) est la défense naturelle contre les maladies du couvain comme le couvain calcifié (provoqué par un champignon, Ascosphera apis), la loque américaine (due à la bactérie Paenibacillus larvae) et la varroase (Rothenbuhler, 1964; Spivak and Reuter, 2001). En 1964, Rothenbuhler décrit ce comportement, qu’il pense être contrôlé par deux gènes récessifs : l’un permet à l’ouvrière de détecter et de désoperculer une cellule qui contient du couvain malade. L’autre gène pousse les ouvrières à sortir le couvain et s’en débarrasser (Rothenbuhler, 1964). Des études plus récentes indiquent que des dizaines de gènes semblent impliqués dans l’olfaction (Behrens (Behrens et al., 2011). Les abeilles hygiéniques discriminent mieux les couvains malades et les évacuent en un temps plus court. Elles sont moins sensibles aux maladies du couvain, l’éviction des larves d’abeille malades provoquant la mort des V. destructor immatures. La femelle peut être endommagée durant le processus du retrait de couvain (Spivak and Gilliam, 1998). La lignée d’abeille dite VSH4 est capable de détecter les couvains infestés par V. destructor et l’élimine rapidement. Cette lignée d’abeille est aujourd’hui répandue dans les ruchers commerciaux mondiaux. Ce comportement est variable en fonction de conditions environnementales, par exemple, juste une simple entrée de nectar dans la ruche pourra avoir un impact sur ce comportement (Panasiuk et al., 2009); en outre, les nettoyeuses sont plus actives en période de miellée. La taille de la colonie a un impact sur sa capacité hygiénique, plus la colonie est populeuse, plus la capacité de nettoyage est rapide (Najafgholian et al., 2011) Le comportement hygiénique varie en fonction de l’âge de l’abeille, les jeunes ouvrières âgées de 6 jours ont une bonne activité hygiénique (Panasiuk, 2010). 4 VSH (Varroa Sensitive Hygienic) Facteurs limitant du développement de V. destructor 37 Les ouvrières dépensent plus de temps à nettoyer le couvain la journée que la nuit surtout si les cadres sont neufs, le cycle jours et nuits influence légèrement la rapidité du nettoyage (Pereira et al., 2013). La charge virale a un impact sur le comportement hygiénique : les couvains fortement infestés en particulier par le virus DWV, c’est-à-dire des couvains à fortes anomalies sont beaucoup plus retirés par les ouvrières que les moins parasitées (Schöning et al., 2012). Le comportement hygiénique peut être testé artificiellement dans les colonies sans V. destructor; les couvains dans les cellules operculées sont tués en les perçant à l’aide d’une épingle entomologique ou encore, on peut congeler une portion délimitée de couvain operculé simplement à l’azote liquide. Une lignée Hyg5 est une colonie ayant un score de nettoyage de 95% en 48 h pour 100 cellules congelées d’ après (Spivak, 1996). -Paramètre 2 : L’épouillage est un comportement dans lequel l’abeille s’épouille ellemême (auto-épouillage) ou une autre abeille voisine (allo-épouillage) quand elle est irritée par l’acarien (Boecking and Spivak, 1999). Certaines ouvrières tuent l’acarien à l’aide de leurs mandibules (Szabo et al., 1996). Si l’acarien persiste, les ouvrières performent un mouvement de danse en vibrant leur corps. Des mouvements latéraux de l’abdomen sont réalisés vigoureusement pour attirer les épouilleuses (allo-épouillage). En moyenne 38.5% d’acariens vivants placés sur des abeille marquées étaient enlevés par les ouvrières des abeilles africanisées alors que seulement 5.7% des acariens ont été enlevés par les abeilles italiennes pendant une durée de 30 minutes (Moretto et al ., 1991). La capacité d’épouillage d’A. cerana est plus intensive et efficace que celle d’A. mellifera (ex : A. m. ligustica) (Fries et al., 1996). Cependant, la femelle V. destructor présente un caractère d’adaptation pour éviter les réactions de l’abeille hôte, elle se fixe entre les sclérites abdominaux ((Boecking and Ritter, 1993) où les ouvrières ne peuvent pas sentir l’irritation causée par les glandes salivaires durant la spoliation (Peng et al., 1987). L’héritabilité de ce caractère est trop faible (h < 0,15, (Ehrhardt et al., 2007).

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
I- Biogéographie de Madagascar
II- Modèle biologique 1 : l’abeille A. mellifera
II.1-Systématique
II.2- Castes d’abeille
II.3-Cycle de développement de l’abeille
II.4-Reproduction de l’abeille
II.-Apiculture à Madagascar
III-Modèle biologique 2 : l’acarien V. destructor
III.1-Taxonomie et historique d’invasion
III.2-Interaction hôte (A. mellifera) – parasite (V. destructor)
III.3-Pathogénicité et virulence
III.4- Facteurs limitant du développement de V. destructor .
OBJECTIFS
DIVERSITE GENETIQUE DE L’ABEILLE ENDEMIQUE MALGACHE APIS
MELLIFERA UNICOLOR (HYMENOPTERA : APIDAE)
Résumé
GENETIC DIVERSITY OF THE ENDEMIC HONEYBEE: APIS MELLIFERA
UNICOLOR (HYMENOPTERA: APIDAE) IN MADAGASCAR
Abstract
Introduction
Materials and methods
Results
Discussion
Acknowledgments
References
DISPERSION ET DETERMINATION DE LA SOUCHE DE VARROA DESTRUCTOR (ACARI: VARROIDAE) A MADAGASCAR DEPUIS SA PREMIERE DESCRIPTION EN 2
Résumé
SPREAD AND STRAIN DETERMINATION OF VARROA DESTRUCTOR (ACARI:
VARROIDAE) IN MADAGASCAR SINCE ITS FIRST REPORT IN 2
Abstract.
Introduction
Materials and methods
Results
Discussion
Acknowledgements
References.
DIVERSITE GENETIQUE DE VARROA DESTRUCTOR (MESOSTIGMATA VARROIDEA), UNE ESPECE INVASIVE DECRITE SUR L’ABEILLE APIS MELLIFERA UNICOLOR (HYMENOPTERA: APOIDEA)
Résumé
NUCLEAR GENETIC DIVERSITY OF VARROA DESTRUCTOR (MESOSTIGMATA:
VARROIDEA), INVASIVE SPECIES REPORTED IN HONEY BEE APIS
MELLIFERA UNICOLOR (HYMENOPTERA: APOIDEA)
Abstract.
Introduction
Materials and methods
Results
Discussion
Acknowledgments
References
ETUDE DU COMPORTEMENT HYGIENIQUE D’APIS MELLIFERA UNICOLOR (HYMENOPTERA: APIDAE), L’ABEILLE ENDEMIQUE DE MADAGASCAR
Résumé
ASSESSING HYGIENIC BEHAVIOR OF APIS MELLIFERA UNICOLOR
(HYMENOPTERA: APIDAE), THE ENDEMIC HONEY BEE FROM MADAGASCAR
Abstract
Introduction
Material and methods
DISCUSSION
Acknowledgments
References
DISCUSSION GENERALE
Diversité génétique de l’abeille A. m. unicolor
Impacts de V. destructor à Madagascar
Dynamique de propagation, la voie d’introduction et diversité génétique de V. destructor
Solutions pour lutter contre le V. destructor
Comportement hygiénique de l’abeille A. m. unicolor
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
REFERENCES

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