Les tuméfactions font partie des motifs de consultation en chirurgie maxillo-faciale et stomatologie. Elles peuvent être d’origine infectieuse, tumorale ou inflammatoire. Si elles sont d’origine tumorale, on les classe en tumeurs malignes ou bénignes. Ces tumeurs peuvent intéresser tous les tissus de la région maxillo-faciale aussi bien les tissus osseux que les parties molles. La multiplicité des constituants de ces tissus, qui peuvent tous être sujets à un développement de processus tumoral explique certainement la diversité de ces tumeurs.
Définitions
L’encyclopédie Larousse définit une tumeur comme un processus pathologique où la prolifération exagérée des cellules aboutit à une surproduction tissulaire qui persiste et a tendance à s’accroitre. On classe les tumeurs en tumeur bénigne et en tumeur maligne. Une tumeur bénigne se développe sur place. Elle est limitée par une capsule, n’envahit pas les tissus voisins, n’envoie pas de métastase, ne récidive pas après ablation, et est formée de cellules normales. Une tumeur maligne est une prolifération anarchique de cellules au sein d’un tissu donné, sans limite nette par rapport aux tissus environnants, avec possibilité d’envahissement des organes de voisinage et de métastases à distances. Son accroissement est théoriquement illimité et le tissu qui la constitue est une caricature de tissu normal ou un tissu tellement indifférencié qu’il est difficile de le rattacher à un tissu matriciel.
Anatomie de la région maxillo-faciale
La région maxillo-faciale est constituée par un massif osseux et des parties molles. Le massif osseux comprend l’os frontal, l’os temporal, l’os malaire ou os zygomatique, l’éthmoïde, le vomer, le palatin, l’os propre du nez, le maxillaire, et la mandibule . Les parties molles sont formées par les nerfs, les vaisseaux, les tissus adipeux, les muscles, les revêtements cutané et muqueux, les ganglions lymphatiques, les glandes (lacrymales, salivaires) et leurs canaux. La région maxillo-faciale se subdivise en région frontale, malaire, massétérine, parotidienne, labiale inférieure, sous-mentale, temporale, génienne, temporo-mandibulaire, labiale supérieure, mentonnière et sous mandibulaire .
Physiopathologie des tumeurs (malignes, bénignes)
Au cours des néoplasies, les cellules ne répondent plus au processus de régulation qui règle l’homéostasie. Au cours d’un processus malin, il existe un excès de cellules soit par insuffisance de destruction cellulaire soit par excès de production cellulaire. C’est le résultat d’une affection génétique, survenant avec un déséquilibre entre les anti-oncogènes ou gènes pro-apoptotiques (gènes responsables de la mort programmée des cellules, encore appelés « gènes suppresseurs de tumeur ») d’un côté et les oncogènes de l’autre. Et en même temps, il existe une insuffisance de gènes réparateurs des ADN ou acides désoxyribonucléiques lésés (gène impliqué dans la stabilité du génome), ces derniers étant responsables des mutations rencontrées au cours du cancer. Ainsi, les mutations génétiques survenant au sein des cellules sont responsables de l’inactivation des anti-oncogènes et d’une sollicitation importante des oncogènes, qui sont à l’origine d’une prolifération tissulaire.
Critères de classification des tumeurs maxillo-faciales
– les critères cliniques permettent de suspecter le diagnostic.
Les tumeurs bénignes sont bien limitées. Elles n’adhérent ni n’envahissent les tissus environnants. Les tumeurs malignes sont difficiles à individualiser avec une notion d’adhérence et d’envahissement des structures environnantes. Elles peuvent être ulcérées et/ou bourgeonnantes à l’inspection, hémorragiques au contact, dures et infiltrantes à la palpation. Elles sont souvent douloureuses en raison d’un envahissement des nerfs, et les plaies ne se cicatrisent pas spontanément.
– les critères radiologiques permettent d’orienter le diagnostic.
• Les tumeurs bénignes présentent une image avec des limites nettes.
• Les tumeurs malignes se manifestent par une image de remaniement osseux diffus. Il n’y a pas de limite nette. On observe une plage d’ostéolyse et/ou d’ostéo-condensation, une rupture corticale et une image d’ostéogenèse anarchique en feuilles d’herbe.
– les critères histologiques permettent d’obtenir le diagnostic de certitude.
• Les tumeurs bénignes ont des structures normales, des limites nettes et ne présentent pas de signes de malignité.
• Les tumeurs malignes ont des constituants tissulaires anarchiques, des limites imprécises et des architectures non identifiables à une structure tissulaire normale.
– les critères cytologiques permettent aussi d’obtenir le diagnostic de certitude.
• Les tumeurs bénignes ont des cellules de morphologie normale.
• Les tumeurs malignes présentent des anomalies cellulaires. On a des anomalies de taille comme l’anisocytose (les cellules sont de différentes tailles), de noyau comme l’anisocaryose (noyaux cellulaires de tailles et de formes inégales), des chromatines (ou dyscarioses), des nucléoles, des membranes cellulaires et du cytoplasme. Il peut également y avoir une augmentation du rapport noyau/cytoplasme. Par ailleurs existent des perturbations biologiques au niveau des noyaux, des chromosomes (en qualité et en quantité, telles que translocations et aneuploïdies), des comportements cellulaires (perte d’adhésivité et d’inhibition de contact), et des fonctions cellulaires.
– les critères évolutifs aident au diagnostic.
• Les tumeurs bénignes sont d’évolution locale. Elles augmentent progressivement de volume et refoulent les structures des tissus et organes avoisinants sans les envahir.
• Les tumeurs malignes sont infiltrantes. Elles envahissent et détruisent les structures de voisinage. Elles sont ainsi responsables d’ostéolyse, d’hémorragie, d’algie et de paresthésie. Elles envoient des métastases par voie hématogène ou lymphatique.
Les facteurs de risque
Les facteurs de risque sont des facteurs qui favorisent la survenue des tumeurs. Au niveau de la région maxillo-faciale, ils sont représentés par :
– le tabac qui agit par brûlure chronique, à travers sa composante toxique (la nicotine) et aussi par ses composantes cancérigènes (les hydrocarbures),
– l’alcool qui agit en tant qu’irritant local direct et qui potentialise l’action du tabac. Il dégrade la capacité hépatique et diminue ainsi la résistance aux agressions externes,
– les irritations chroniques de la cavité buccale, en relation avec les microtraumatismes causés par les dents délabrées, les prothèses dentaires mal ajustées, les morsures répétées ou les alimentations brûlantes,
– les carences nutritionnelles surtout en vitamine A,
– les infections virales à Human Papilloma Virus et à Epstein Barr Virus,
– l’immunodépression pathologique (SIDA) ou celle due aux médicaments (chez les patients porteurs de greffe),
– l’exposition à certains produits (poussières de bois, tanin, sels de chrome et de nickel, arsenic),
– l’exposition fréquente et durable aux rayons ultra-violets,
– la prédisposition familiale au cancer et l’existence de facteurs génétiques,
– l’occupation professionnelle et le mode de vie.
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