Analyse socio-économique et environnementale de l’utilisation des bio digesteurs
Place des productions animales
Les productions animales contribuent pour une part variable, mais souvent importante, aux économies agricoles des différents pays (Tacher et Letenneur, 1999). Elles représentent en moyenne un tiers du produit intérieur brut agricole. L’élevage et particulièrement la production du lait occupent une place prépondérante comme facteur de réduction de la pauvreté et de croissance économique.
Zones écologiques et systèmes d’élevage
Le secteur de l’élevage, à travers les filières lait et viande de volaille, constitue au Sénégal, comme dans la plupart des pays en voie de développement, un maillon essentiel de l’économie à travers la satisfaction des besoins alimentaires des populations rurales et urbaines, l’épargne, la création d’emploi, etc. (Ngom, 2013). Les animaux de rente des systèmes d’élevage sont surtout constitués de bovins (zébus, taurins et métis), de petits ruminants (ovins, caprins), de volailles et de porcins. La répartition spatiale des races de ruminants est bien adaptée aux conditions écologiques et à la présence de la trypanosomiase qui limite l’élevage de certaines races dans les zones infestées par les vecteurs du parasite (Faye, 2001; Bouyer et al, 2014). L’accroissement attendu de la demande du pays en lait et en viande ouvre des opportunités de développement pour les filières de ruminants mais dans le même temps les systèmes d’élevage sénégalais sont caractérisés par une grande diversité, une productivité et une compétitivité souvent plus faible que celle des bassins de production concurrents en Afrique.
Il implique quelques 3 millions d’individus, soit 350 000 familles, et fournit approximativement 55% des revenus des ruraux en zone pastorale, et 40% en zone agropastorale (Diarra, 2009). La 11 figure 1 permet entre autres choses d’apprécier la répartition des différents systèmes d’élevage, à savoir ceux à dominance intensive, pastorale et agropastorale. Figure 1 : Principaux systèmes de production laitière au Sénégal (Ba Diao, 2004) Le système agropastoral caractérisé par une association agriculture-élevage et une grande disponibilité des sous produits agricoles et agro-industriels, se rencontre essentiellement dans les zones Centre et Sud du pays mais aussi dans la vallée du fleuve Sénégal.
Ce système montre des faiblesses à savoir la forte pression agricole et humaine réduisant l’espace pastoral et la forte pratique du brûlis qui détruit les derniers fourrages disponibles pour le bétail en saison sèche (Nishimwe, 2008). Le système pastoral est caractérisé par l’exploitation des grands espaces à travers la mobilité du cheptel. Les ressources en eau et en pâturage limitées (steppes et savanes arbustives) constituent l’apport essentiel de l’alimentation des troupeaux et imposent une grande mobilité des hommes et du bétail. C’est un système qui se retrouve au Ferlo (Diao, 1991). 12 L’élevage est mené sur un mode transhumant dans les zones arides en vue d’une meilleure exploitation des pâturages peu riches mais répartis sur d’immenses espaces, impropres à l’agriculture (Duteurtre et al, 2003).
Quant au système périurbain, il est localisé dans la zone des Niayes et intéresse l’embouche industrielle, la production laitière et l’aviculture. Il concerne 1% des bovins et 3% des petits ruminants. Les élevages y sont intensifs et semi-intensifs (Nishimwe, 2008). Les particularités de l’environnement et des modes d’élevages pastoraux et de stabulation nous emmènent à insister sur le fait que l’élevage pour l’obtention de lait est fortement saisonnier. De même, l’alimentation et le matériel génétique disponibles ne permettent pas une forte production laitière. Ainsi, les produits laitiers consommés en saison sèche proviennent principalement des systèmes agropastoraux et intensifs, au sein desquels l’apport de compléments alimentaires s’avère souvent nécessaire (Lavoie, 2012). Pour arriver à une meilleure performance des productions des ruminants, les éleveurs transhumants pastoraux gèrent leurs déplacements selon les saisons, au Nord pendant l’hivernage et vers le Sud pendant la saison sèche.
La stabulation constitue un des moyens permettant d’améliorer les productions provenant des élevages pastoraux, aux côtés de l’amélioration génétique pour les zones agropastorales et de la constitution de réserves fourragères. Au-delà des aspects quantitatifs, les aspects qualitatifs sont également à prendre en compte surtout pour le lait et les produits laitiers. La pasteurisation du lait avant consommation ou avant toute transformation est à préconiser surtout pour le système agropastoral où par ailleurs la fumure animale est utilisée pour fertiliser les champs et les résidus de récoltes collectés pour nourrir des animaux.
Importance économique des productions animales et l’évolution de la production
Comparé aux autres pays africains qui ne possèdent pas d’abondantes ressources naturelles, le Sénégal a une économie à la traine mais fortement tirée par le secteur tertiaire moteur de l’économie sénégalaise avec une part relative de 60,6% du PIB en 2009 (Fonds africain de développement, 2010). En ce qui concerne le secteur primaire, les sous-secteurs de l’élevage (8,8%) et de l’horticulture (8,9%) ont été performants en 2013 et ont soutenu la croissance au niveau du secteur primaire (DPEE, 2014). 13 Les productions animales ne permettent pas de couvrir les besoins en protéines animales, d’où le recours aux importations en provenance des pays sahéliens ou des pays extra-africains (OCDE, 2012).
Par rapport à leur évolution, les productions de lait, de viande et d’œufs ont augmenté tout au long de la période 1961-1997 mais à un rythme moindre que celui de la population (Ndoye et al, 2009). Au niveau de l’élevage, le Sénégal est importateur de viande et d’abats, de produits laitiers et d’œufs à couver. Ces derniers proviennent du Brésil et de la France et ont atteints en 2005, 6 132 450 d’unités importées. Le lait porte globalement sur 46 229 tonnes, soit 319 millions de litres en équivalent lait crû, pour une valeur de 42,4 milliards de francs CFA. Soixante quinze pour cent du tonnage importé est constitué par le lait en poudre. Les importations de viande et d’abats ont doublé en 3 ans pour atteindre en 2005 un volume de 19 692 tonnes (soit 67 milliards de francs CFA) (Ndoye et al., 2009). Les exportations de bétail sont difficiles à évaluer. Elles concerneraient surtout des petits ruminants pour le Mali (chèvre rousse par exemple) et des bovins et petits ruminants pour la Gambie. Les autres exportations de produits issus de l’élevage concernent essentiellement les cuirs et peaux. Pour une production de 18 120 tonnes, le Sénégal a exporté 6 427 tonnes de cuirs et peaux, dont 63% de cuir de bovin (ANSD, 2015a).
Production laitière bovine au Sénégal
L’élevage joue un rôle important dans l’économie nationale (Dia, 2013) et contribue pour beaucoup à la sécurité alimentaire. La production laitière au Sénégal provient essentiellement des vaches et dans une moindre mesure des chèvres pour la transformation en fromage.
Contribution des produits laitiers dans la sécurité alimentaire
La place de l’élevage est considérable dans la réalisation de la sécurité alimentaire des ménages, compte tenu de l’importance de l’autoconsommation dans les stratégies des ménages agricoles et du rôle joué par les marchés de proximité des produits d’origine animale pour nourrir les populations urbaines. Environ 80% des besoins alimentaires des populations de la région sont satisfaits par les productions régionales. Ainsi, le défi auquel le secteur agricole est confronté est 14 celui de passer de la garantie de la sécurité alimentaire à celle de la souveraineté alimentaire au niveau régional (Blein et al, 2008). Dans la plupart des pays du Sud, on constate une augmentation considérable de la demande en produits animaux.
Les principaux facteurs de ces changements sont la croissance démographique, l’urbanisation massive, l’accroissement des revenus et la modification des habitudes alimentaires (Duteurtre et al, 2003). Boutonnet et al, 2000 ont rapporté que l’analyse des données compilées par la FAO depuis 1960 montre que la disponibilité individuelle moyenne en produits laitiers est restée stable de l’ordre de 40 kg équivalent lait liquide (EL) par personne et par an jusqu’au début des années 80. L’augmentation des importations a compensé la baisse de la production par habitant. Depuis plus de 20 ans, la disponibilité en produits laitiers est en constante diminution et s’établit en 1997 autour de 33 kg par personne et par an, alors que la FAO et l’OMS recommandent un niveau de 50 kg EL par personne et par an (Boutonnet et al, 2000).
Depuis la dévaluation du FCFA en 1994, elle est passée de 50 kg par habitant et par an à 27 kg (Corniaux, 2003) . Les produits consommés sont surtout des produits traditionnels : lait frais, lait fermenté, beurre solide et beurre liquide. Mais de plus en plus, il est trouvé de produits importés et de nouveaux types de produits sur les marchés urbains : lait en poudre, lait concentré, huile de beurre, yaourts, fromages, beurre pasteurisé, etc. (Duteurtre et al, 2003).
Politiques d’amélioration de la production laitière locale
L’amont de la production laitière bovine continue d’être soumis à un ensemble de contraintes qui limitent son essor et qui comprennent aussi bien le faible niveau technique des éleveurs, le potentiel génétique des animaux que les sévérités climatiques et les déficits alimentaires. Le produit obtenu est de qualité physico-chimique moyenne ou mauvaise. Ainsi, la connaissance de la réalité du terrain, associée à une analyse fine des systèmes de production du lait, constitue un outil nécessaire pour l’amélioration de cette qualité (Hassaïnya et al, 2007). Le Sénégal fait partie des pays dont le déséquilibre de l’offre par rapport à la demande en lait est très important. La production laitière traditionnelle dominante ne permet pas de couvrir la demande : 80% du lait produit en milieu rural est destiné à l’autoconsommation.
Les besoins en lait et produits laitiers sont couverts à hauteur de 60% par les importations (Dieye, 2003). 15 La dépendance accrue de la demande vis-à-vis des importations de produits laitiers est à l’origine d’une sortie importante de devises qui était en 2002 d’une valeur moyenne de 15 milliards de FCFA et dont le montant actuel est d’environ 60 milliards de Franc CFA. En 2011, la production laitière locale était estimée à 184,5 millions de litres, dont 158,6 millions pour le lait de vache (85,6%) et 25,9 millions pour le lait de petit ruminant (14%) (CEP, MEPA, 2015) (tableau II). Elle provient presque essentiellement des élevages traditionnels. Les races bovines locales sont peu productives (de 0,5 à 2 l/vache/jour).
Ainsi, la production laitière nationale reste très faible, irrégulière et fortement marquée par une variation saisonnière. Quant aux élevages semi-intensifs et intensifs, ils ne sont pas nombreux et produisent très peu de lait de vaches et de petits ruminants.Il ressort de ce tableau une faiblesse de la production laitière locale, ce qui justifie la forte volonté politique exprimée par l’Etat du Sénégal d’accroître la production laitière à travers divers programmes dont le Volet Elevage de la grande offensive agricole pour la nourriture et 16 l’abondance (GOANA). Ce programme lancé en 2008 était décliné en différentes composantes axées sur les campagnes d’inséminations artificielles bovines, la mise en place des centres d’intensification et de modernisation de l’élevage (CIMEL), les mesures d’accompagnement liées à l’alimentation, au crédit et à la mise en marché, à travers la mise en œuvre du Programme National de Développement de la Filière Laitière locale (PRODELAIT). Avec les différentes interventions du PRODELAIT dans le pays, la part des différentes régions dans la production locale de lait est relativement disparate (Figure 2).
INTRODUCTION GÉNÉRALE |