ANALYSE SOCIALE DES CONFLITS
Dans cette présente partie, il s’agit, à travers les formes, les facteurs associés, les conséquences engendrées et les mécanismes de prise en charge, de cerner les conflits sociaux dans la RBDS. Cependant, les ressources comme l’eau, le sel, les coquillages, la paille, du fait qu’elles ne sont pas déterminantes dans l’émergence des conflits manifestes, sont peu ou pas abordées dans cette étude mais pourront être approfondies ultérieurement. Il en est de même de la question genre.
Caractéristiques générales des conflits
Dans l’exploitation et la gestion du foncier, les conflits sont généralement de type inter collectivités locales, intra et inter villageois. Ils opposent aussi autochtones et allochtones ou collectivités locales et particulier. Ces conflits n’ont pas de périodes exactes de manifestation ou de recrudescence, exceptés ceux liés aux terres de culture qui sont plus fréquents en période pré saison des pluies et qui le plus souvent ne sortent pas du c adre villageois ou communautaire. Les conflits sont observés au niveau de la RBDS pendant toute l’année. Ils peuvent survenir à chaque fois qu’on note des demandes de terres soit pour un pr ojet, une infrastructure, une spéculation, ou une attribution du c onseil rural, qui touche des zones de culture.
Les conflits fonciers sont les plus complexes et les plus délicats au niveau de la RBDS dans la mesure où ils concernent une ressource capitale dont la demande est de plus en plus supérieure à l’offre. D’ailleurs, ce sont les conflits qui ont le plus fait l’objet d’altercations et de recours en justice. Quant aux conflits entre éleveurs et agriculteurs, ils sont de type intra villageois, inter villageois et dans certaines localités entre autochtones et transhumants ou villageois et étrangers. Ces conflits sont quasi permanents en saison des pluies avec deux périodes de recrudescence à sav oir la période pré et post saison des pluies, avant la fin des récoltes. Cependant, dans les zones où se pratique le maraîchage, ils se déclenchent surtout à partir du milieu de la saison sèche jusqu’à la remise sur place du tapis herbacé. Dans les zones où existent des vergers surtout d’anacardier, les conflits sont souvent notés lors de la période de fructification des arbres qui a lieu généralement entre avril et juillet voire août.
Pour ce qui est du boi s, qu’il soit d’énergie, d’œuvre ou de service, il entraîne la plupart du temps, des conflits entre exploitants et agents des services techniques de l’Etat (eaux et forêts, parc) ou entre villageois et membres des comités villageois. Ces conflits sont plus importants en période d’hivernage du f ait de la rareté du bo is de chauffe durant ces moments. Les fruits sauvages entraînent, plus de conflits inter villageois ou entre villageois et étrangers que de conflits intra villageois qui, le plus souvent sont très négligeables et mettent aux prises les membres des comités de surveillance et les populations qui ne respectent pas les modalités d’exploitation. Cependant, ces conflits sont saisonniers et tributaires des périodes de maturation des fruits.
Quant aux conflits découlant de la gestion des ressources naturelles (peu manifestes), ils opposent souvent les services de l’Etat (sous préfet, le service des Parcs, le service des eaux et forêts) et les populations locales (agriculteurs, éleveurs, pêcheurs, exploitants). Ces conflits touchent généralement les forêts classées, le Parc National et les différentes sortes de réserves de même que l’exploitation d’essences forestières interdites ou l’usage de techniques prohibées. Les conflits de compétences y concernent les services techniques de l’Etat (STE) entre eux (parc et eaux et forêts dans le cadre de l’amodiation, pêche et eaux et forêts pour ce qui est des zones de mangrove) ou avec les élus locaux dépositaires d’un certain nombre de compétences dont ils ignorent le plus souvent les contours et subtilités.
Localisation
disséminés un peu partout dans les RBDS. Les conflits liés aux fonciers sont très épars dans la réserve de biosphère ou ils sont signalés dans la périphérie et dans la zone tampon. Par ailleurs, ils sont plus importants dans les îles et dans l’axe Djilass-Palmarin. Ceux liés au bétail sont localisés aussi bien sur le plateau continental que dans le domaine insulaire mais sont plus significatifs dans les communautés rurales de Fimela, Djilass et de Keur Samba Guèye. Pour les fruits sauvages, en plus des parcs à Detarium senegalense des îles du Gandul (Bassoul, Bassar, Moundé, Siwo), les conflits sont observés dans les communautés rurales de Djilass surtout vers l’ouest, Fimela et Palmarin Facao et concernent l’exploitation des produits du rônier. Ils peuvent aussi se manifester dans l’avenir dans la communauté rurale de Toubacouta surtout sur l’axe Néma Bah – Dassilamé sérère où les populations se plaignent de plus en plus du f ait que des étrangers viennent exploiter les fruits sauvages (Neocarya macrophylla (« new »), Saba senegalensis (« maad) » etc.) se trouvant dans leur terroir.
Manifestation
Le conflit se manifeste par l’opposition entre deux parties avec une tendance à l’affrontement et à la confrontation. Dans la RBDS, la manifestation des conflits se fait de façon croissante à t ravers plusieurs niveaux. D’abord, elle commence par des altercations verbales entre individus et dans certains types de conflit entre groupes. A ce stade, l’accent est mis sur les dénonciations calomnieuses, quolibets, injures, que se font mutuellement les protagonistes. Si les causes persistent et que rien n’est fait pour solutionner le problème, le conflit peut gagner en intensité avec des rixes qui parfois laissent place à de violents affrontements physiques. Cependant, l’atteinte d’un tel niveau relève du caractère important de la ressource en jeu et des parties prenantes. Dans ce cas, le conflit est ouvert à toutes les situations d’hostilité possibles : bataille rangée, escalade de la violence, sans compter les différentes stratégies qui seront mises en œuvre pour déstabiliser l’adversaire (privation de services, isolement etc.)