Analyse pharmacocinétique-pharmacodynamique de l’ibrutinib

Analyse pharmacocinétique-pharmacodynamique de l’ibrutinib

Généralités sur l’idelalisib 

 Propriétés physico-chimiques 

L’idelalisib, a pour nomenclature 5-Fluoro-3-phenyl-2-[(1S)-1-(9H-purin-6-yl amino)propyl]quinazolin 4(3H)-one. Sa formule brute est C22H18FN7O. Sa structure chimique est présentée en Figure 10 (153). Figure 10 – Structure chimique de l’idelalisib D’après (153) L’idelalisib présente une masse molaire de 415.4 g/mol. Il se présente sous forme d’une poudre blanche. Il est insoluble dans l’eau à pH 7 mais soluble à pH 1.2 (154). Son logP est estimé à 3.88. L’idelalisib présente une faible solubilité aqueuse mais une haute perméabilité intestinale, il est classifié comme un médicament de BCS classe II (155). Le médicament sur le marché est nommé Zydelig®, il est commercialisé par les laboratoires Gilead Sciences sous forme de comprimés pelliculés dosés à 100 mg ou à 150 mg d’idelalisib. 

 Propriétés pharmacologiques 

 Propriétés pharmacodynamiques 

L’idelalisib agit par inhibition sélective de l’isoforme δ de la classe I des phosphoinositide 3-kinases (PI3Kδ). Les PI3Ks sont une famille de kinases comprenant huit isoformes répartis en trois classes (I, II et III) selon leur structure et leurs substrats. La classe I comprend les sous-classes IA et IB. Les PI3Ks de classe IA sont des hétérodimères composés d’une unité régulatrice (p85) et une unité catalytique (p110). La classe IA contient PI3Kα, PI3Kβ et PI3Kδ (unités catalytiques p110α, p110β et p110δ respectivement). La classe IB contient quant à elle la PI3Kγ (unité catalytique p110γ). Les unités p110α et p110β sont largement exprimées dans de nombreux tissus, alors que p110δ et p110γ sont principalement retrouvées dans les leucocytes (156). L’activation de récepteurs à activité tyrosine kinase (RTK) ou de récepteurs couplés aux protéines G (RCPG) entraîne le recrutement des PI3Ks au niveau de la membrane plasmatique. L’unité p110 intervient alors dans la transformation du PIP2 (phosphatidylinositol-4,5-bisphosphate) en PIP3 (phosphatidylinositol 3,4,5-triphosphate), un lipide messager qui est à l’origine de l’activation de nombreuses voies cellulaires. Notamment, PIP3 recrute AKT qui est impliqué dans la prolifération et la survie cellulaire (Figure 11). La voie de signalisation PI3K/AKT est également activée via le BCR (157). Cette cascade de signalisation est impliquée dans de nombreux cancers. En effet, la mutation du gène PIK3CA (gène codant pour l’unité p110α), la perte du gène PTEN qui régule PIP3, la mutation d’AKT ou l’amplification des RTKs sont des anomalies génétiques fréquentes menant à la surexpression de la voie PI3K/AKT liée à l’apparition de cancers (158,159). 4Figure 11 – Voie de signalisation PI3K/AKT D’après De Santis et al. (156) Le rôle des PI3Ks dans l’apparition de cancers en a donc fait une cible thérapeutique privilégiée. De nombreux inhibiteurs sont en développement mais l’idelalisib est le seul à être actuellement sur le marché. L’idelalisib cible spécifiquement la PI3Kδ qui est un élément clé dans plusieurs voies de signalisation impliquées dans la prolifération, la survie, la motilité, et la rétention des cellules leucémiques de différentes hémopathies malignes B, dont le BCR. Dans des cellules issues d’hémopathies malignes, l’idelalisib bloque la voie de signalisation PI3Kδ/AKT ce qui entraîne une inhibition de la prolifération cellulaire et une stimulation de l’apoptose. L’idelalisib est un inhibiteur compétitif du site de liaison de l’ATP sur p110δ. Cette inhibition est réversible (155). Les différences structurales entre les différents isoformes font que l’idelalisib est un inhibiteur spécifique de la PI3Kδ. Dans une étude in vitro, l’IC50 de l’idelalisib pour PI3Kδ a été estimé à 19 nM alors qu’il est de 8600, 4000 et 2100 nM pour PI3Kα, PI3Kβ et PI3Kγ respectivement (154). De plus, aucune activité significative sur d’autres kinases n’a été observée (155). 

 Propriétés pharmacocinétiques

 L’idelalisib est un médicament administré par voie orale. Son absorption est rapide puisque le pic des concentrations est observé 0.5 à 1.5 heures après une prise à jeun, et de 2 à 4 heures après une prise durant le repas. Sa biodisponibilité est estimée à 74%. L’idelalisib présente une forte perméabilité intestinale sur les cellules Caco2 avec un taux d’efflux encore plus important. Le ratio B-A/A-B est de 12.2 à une concentration de 1 µM, mais diminue quand la concentration augmente (ratio de 2.8 à 50 µM), probablement à cause de la saturation des transporteurs d’efflux. L’exposition à l’idelalisib est proportionnelle à la dose pour une dose allant jusqu’à 100 mg, puis en dessous de la proportionnalité à partir de 150 mg, ce qui est dû à une absorption limitée par la solubilité du produit (155,160). Le volume de distribution apparent de l’idelalisib est de 96 L. Aux niveaux de concentrations observés en clinique, l’idelalisib se lie aux protéines plasmatiques à hauteur de 93%. Le ratio sang/plasma après une prise unique de 150 mg a été estimé à 0.5 (154,155). L’idelalisib est majoritairement métabolisé par l’aldéhyde oxydase (AO) menant à la formation de son principal métabolite, GS-563117. Les cytochromes CYP3A4, CYP3A5 et l’UGT1A4 participent également à la métabolisation de l’idelalisib. Le métabolite GS-563117 est le seul métabolite circulant, il ne présente aucune activité vis-à-vis de la PI3Kδ. Sa concentration plasmatique est 2 à 4 fois plus élevée que celle de son parent. Il est éliminé via les CYP3A et UGT1A4. La demi-vie d’élimination moyenne de l’idelalisib est de 8.2 heures et sa clairance moyenne est de 14.9 L/h. Il est excrété principalement dans les fèces (78%) et dans l’urine (14%) (154,155,161). Des études de pharmacocinétique ont été menées chez les patients présentant une atteinte hépatique ou rénale (162,163). Aucun changement significatif n’a été observé chez les patients atteints d’insuffisance rénale. Pour les patients présentant une insuffisance hépatique sévère, la concentration maximale est inchangée mais l’AUC est augmentée de 60%. Toutefois cette augmentation n’a pas été associée à un changement au niveau de la tolérance, ce qui n’a pas entrainé de recommandations particulières dans cette population.

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Table des matières

LISTE DES ABREVIATIONS
FIGURES
TABLEAUX
INTRODUCTION
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
1 Leucémie lymphoïde chronique
1.1 Quelques chiffres
1.2 Origine et physiopathologie
1.3 Etablissement du diagnostic
1.4 Classification clinique et facteurs pronostics
1.5 Prise en charge et traitements
1.6 Complications possibles et évolution de la maladie
2 Généralités sur l’ibrutinib
2.1 Propriétés physico-chimiques
2.2 Propriétés pharmacologiques
2.2.1 Propriétés pharmacodynamiques
2.2.2 Propriétés pharmacocinétiques
2.3 Ibrutinib en clinique
2.3.1 Essais cliniques et autorisation de mise sur le marché.
2.3.2 Interactions médicamenteuse
2.3.3 Effets indésirables
2.3.4 Interruption du traitement
2.3.5 Rationnel de dose
2.4 Effets de l’ibrutinib sur les cellules de la LLC
2.5 Dosage de l’ibrutinib
3 Généralités sur l’idelalisib
3.1 Propriétés physico-chimiques
3.2 Propriétés pharmacologiques
3.2.1 Propriétés pharmacodynamiques
3.2.2 Propriétés pharmacocinétiques
3.3 Idelalisib en clinique
3.3.1 Essais cliniques et autorisation de mise sur le marché
3.3.2 Interactions médicamenteuse
3.3.3 Effets indésirables
3.3.4 Interruption du traitemen
3.4 Dosage de l’idelalisib
4 Analyse de données par approche de population
4.1 Méthodes d’analyse de données pharmacocinétiques
4.2 Modèles non linéaires à effets mixtes
4.2.1 Expression générale du modèle
4.2.2 Modèle de structure
4.2.3 Modèle statistique
4.2.4 Modèle de covariables
4.3 Estimation des paramètres du modèle
4.3.1 Méthode d’estimation
4.3.2 Estimation bayésienne des paramètres individuels
4.4 Evaluation d’un modèle
4.4.1 Fonction objective
4.4.2 Graphiques diagnostics
4.4.3 Précision des estimations
4.4.4 Visual Predictive Check
4.4.5 Evaluation externe
TRAVAUX PERSONNELS
1 Objectifs
2 Analyse de la pharmacocinétique de l’ibrutinib et de ses effets sur les lymphocytes
circulants dans le contexte de la LLC
2.1 Introduction
2.2 Dosage des échantillons patients
2.3 Modèle pharmacocinétique de l’ibrutinib et de son métabolite dihydrodiol
2.3.1 Article n°1
2.4 Modélisation de l’évolution du taux de lymphocytes circulants chez des patients atteints de LLC
traités par ibrutinib
2.4.1 Article n°2
2.5 Discussion
3 Analyse pharmacocinétique de l’idelalisib
3.1 Introduction
3.2 Matériel et méthodes
3.2.1 Patients et données
3.2.2 Dosage des échantillons plasmatiques
3.2.3 Développement du modèle pharmacocinétique de population
3.3 Résultats
3.4 Discussion
3.5 Conclusion
4 Travaux additionnels : Analyse pharmacocinétique des données de suivi thérapeutique pharmacologique de méthotrexate pour des protocoles de haute dose en oncohématologie
4.1 Introduction
4.2 Article n°3
4.3 Discussion
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
1 Control stream NONMEM du modèle PK ibrutinib
2 Control stream NONMEM du modèle PK-PD ibrutinib
3 Control stream NONMEM du modèle PK idelalisib
4 Liste des publications et communications scientifiques

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