LACATON & VASSAL
Tout au long de leur carrière, Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal se sont imprégnés par une architecture de contexte où le « construire avec » est un leit motiv. Cet état d’esprit constitue un terrain fertile pour les transformations architecturales, principalement sous forme de réhabilitations et de reconversions. Inspirés par la notion du loft, ils font de ce domaine d’investigation une obsession qu’ils ne quitteront pas jusqu’à aujourd’hui.
Anne Lacaton, née le 2 août 1955 à Saint Pardoux la Rivière en Dordogne (France) et Jean-Pilippe Vassal, né le 22 février à Casablanca (Maroc) ont étudiés ensemble à l’École d’Architecture de Bordeaux où ils ont été diplômé en 1980. Anne Lacaton décide de poursuivre ses études en se spécialisant en urbanisme (DESS) et suit Jean-Philippe Vassal pour l’Afrique de l’Ouest à Niamey (Niger). Ce-dernier travaille comme architecte mais plus particulièrement en tant qu’urbaniste dans l’organisation et la construction de différents quartiers et banlieues de la ville.
VOYAGE EN AFRIQUE
Cette expérience dure cinq années de 1980 à 1985 et sera la genèse d’une attitude architecturale remarquable encore aujourd’hui dans la plupart de leurs réalisations. Anne Lacaton dira notamment : C’était une expérience majeur à un moment majeur de nos vies, car nous sommes allés en Afrique juste après avoir fini nos études à Bordeaux.
En effet, lorsque ces jeunes architectes découvrent le Niger ils se rendirent compte que l’architecture qu’ils avaient appris, côtoyé et en laquelle ils croyaient était totalement différentes de celle découverte dans ces régions du monde. Ils perçoivent une architecture simple et basique faite de toit en pailles de riz et de murs en terre crue. Même si elle est constituée de matériaux rudimentaires, celle-ci est créatrice d’espaces et d’usages et en étroite relation avec la vie des habitants. A contrario d’une architecture formelle, exempte de tout contextes, elle s’établit dans la continuité du milieu. Le climat existant n’est donc pas un obstacle, mais un paramètre avec lequel il faut dialoguer pour aboutir à un système constructif. Son caractère vernaculaire est dû à cet ensemble de détails, de petites choses qui assemblés définissent une habitation. C’est en Afrique que né la volonté de créer une architecture libre, simple, économique et humaine. On retrouve ces caractéristiques dans leur première réalisation : la Paillote (1984).
JACQUES HONDELATTES ET L’ ÉPINARD BLEU
Après leur retour en France, Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal collaborent sur plusieurs projets avec l’architecte Jacques Hondelatte, professeur à l’Ecole d’Architecture de Bordeaux. Ils réaliseront notamment ensemble la maison Cotlenko (1989).
Cet architecte aura une grande influence sur les jeunes architectes bordelais à cette époque. Il leur ouvre les yeux et leur insuffle l’art d’enchanter et de stimuler l’imaginaire. Pour Jacques Hondelatte, tout est prétexte à l’extraordinaire. Cette vision rêveuse et irrationnelle sera présente dans nombre de projets du bureau. Elle s’exprimera sous différentes formes sans jamais totalement disparaître.
Jacques Hondelatte leur enseignera également comment s’adapter, se libérer des normes et oser ne rien faire ou alors seulement ce qui est souhaitable selon le bon sens et l’évidence. Ainsi on retrouvera notamment quelques similitudes entre la radicalité du projet de la place Léon Aucoc de Lacaton&Vassal et l’aménagement du centre ville de Niort par Hondelatte. Le respect et l’élégance dans l’appropriation d’un contexte entre la maison du Cap Ferret et la maison Lalanne, ou entre la maison Keremma et la maison Campas. La fonctionnalité et la démultiplication des circulation comme on le trouve dans l’université d’arts et sciences humaine à Grenoble réalisée par le couple d’architectes et l’école d’architecture à Compiègne imaginée par le maître.
Par ailleurs, il aimait rappeler l’importance d’une réflexion simple et « sur mesure » dans l’architecture qui par contre-pied pouvait parfois résoudre des situations délicates. Voici une histoire qu’il racontait à ce propos : Un directeur de zoo souhaitait acquérir un couple de chacal. Chacals comme festivals, ou chacaux comme chevaux? Il hésitait. Aussi écrivit-il: Monsieur, je vous prie de bien vouloir me livrer un chacal aux conditions indiquées dans votre catalogue. Il ajouta en post scriptum : tout bien réfléchi, il me faudrait plutôt un couple. C’est également en collaborant avec Jacques Hondelatte que Lacaton et Vassal rencontrent l’ Epinard Bleu, un groupe de jeunes architectes bordelais. Cette rencontre sera décisive pour la suite de leurs carrières, car ils y feront la connaissance de Frédéric Druot, membre du collectif, avec qui ils travailleront sur plusieurs projets majeurs et publieront ensemble le manifeste «PLUS» devenus une référence en matière reconversion. Encore aujourd’hui, Frédéric Druot collabore régulièrement avec l’agence et participe activement aux réflexions portées sur la transformation ville contemporaine.
INFLUENCES DU MODERNISME
à générer de l’espace sans développer beaucoup de moyen. Très vite, ils s’inspirent du modernisme, spécifiquement à travers des bâtiments phares de Mies Van der Rohe comme la maison Farnsworth (1946 – 1951) dans l’Illinois ou encore le Lake Shore Drive building (1948 – 1951) à Chicago. Ces réalisations montrent qu’avec des techniques constructives simples, on peut aboutir à une élégance sophistiquée et fonctionnelle. D’autre part, on notera l’influence dans nombreux projets des Case Study Houses californiennes. Ce programme de logement social est développé de 1945 à 1966 aux États-Unis et a pour objectif de reloger des millions de soldats revenus de la guerre en Europe. Plusieurs architectes, comme Richard Neutra, Pierre Koenig, Charles et Ray Eames ou encore Eero Saarinen, sont sollicités pour concevoir des maisons unifamiliales fonctionnelles et économiques. Ce programme donne lieu à des expériences architecturales surprenantes et de qualité. Outre son aspect économique et fonctionnel, l’architecture moderniste séduit par ses capacités, son efficacité et sa radicalité constructive. Nos architectes réinterprètent à plusieurs reprises les « mégastructures » que Frei Otto ou encore Alison & Peter Smithson avaient mises en avant dans les années 70 et 80. Ils définissent ces éléments comme un support capable de recevoir n’importe quelles activités et absorber toutes les contraintes de différents modes de vie. Pour Lacaton&Vassal l’utopie moderniste doit être aboutie dans ses valeurs estimables (la fonctionnalité, le confort pour tous, la transparence, l’efficacité constructive, l’économie). Ils poseront aussi la question de la transformation de ce patrimoine, souvent décrié comme étant une architecture sans valeur.
CRÉATION DE L’AGENCE LACATON & VASSAL
En 1987, ce couple de jeunes architectes fondent le bureau Lacaton & Vassal à Bordeaux. Après quelques années, ils déménagent à Paris où ils exercent encore aujourd’hui.
ENSEIGNEMENT
Ils sont également enseignants dans différentes universités et écoles nationales d’architecture en Europe. Anne Lacaton en qualité de professeur invitée à l’Université de Madrid (2007 – 2013), à l’EPFL Lausanne (2004, 2006, 2010-2011, 2017), Université de Floride, Studio Ivan Smith (2012), Université de NY-Buffalo, Clarkson Chair (2013), Pavillon Neuflize OBC-Palais de Tokyo, Paris (2013 – 2014), Harvard GSD : Kenzo Tange 2001 & Design critic 2015 et à la TU Delft (2016 – 2017). Jean-Philippe Vassal enseigne depuis 2012 à l’UDK de Berlin, mais fut également professeur invité à la TU de Berlin (2007 – 2011), Peter Behrens School of architecture de Düsseldorf (2005), à l’EPFL Lausanne (2010 – 2011 et au Pavillon Neuflize OBC-Palais de Tokyo, Paris (2013 – 2014). Outre le fait d’être des enseignants et architectes, Lacaton & Vassal sont fortement engagés sur plusieurs terrains,et sont amenés à expliciter leur posture sous différentes formes. Ils participent intensément à des concours, souvent internationaux. Ils président régulièrement des conférences et ont une présence remarquée dans le panorama de « l’avant-garde » de la pensée architecturale (spécialement en matière de transformation). Souvent en collaboration avec Frédéic Druot, ils écrivent et tentent de théoriser leur travail afin d’expliciter méthodiquement leur posture architecturale (cf PLUS). Enfin Lacaton & Vassal font l’objet d’un grand nombre de publications, en France et ailleurs.
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