ANALYSE GEOGRAPHIQUE DE LA CONSOMMATION MEDICALE APPARENTE DANS LE DISTRICT SANITAIRE DE THIES

ANALYSE GEOGRAPHIQUE DE LA CONSOMMATION
MEDICALE APPARENTE DANS LE DISTRICTSANITAIRE DE THIES

LA CONTRIBUTION AU FINANCEMENT DES SOINS PRIMAIRES : DES DISPARITES IMPORTANTES 

L’importance des disparités observées dans l’accès aux soins des populations à l’intérieur et entre les états ont conduit à la mise en œuvre des différentes politiques de santé dans les pays en développement et notamment au Sénégal. Cette situation a abouti à la décentralisation de la santé par l’état aux communautés. La participation des populations à l’effort de santé est définie à l’article 2 du décret fixant les obligations particulières auxquelles sont soumis les comités de santé comme étant « un processus par lequel les individus et les familles prennent en charge leur santé comme ceux de la communauté depuis l’identification des besoins jusqu’à l’évaluation des programmes » (MSAS ,1992). Mais ces politiques n’ont pas réussi à éradiquer les disparités dans l’accès aux soins des populations. Les changements annoncés lors de ces conférences internationales n’ont pas été concrètement mis en œuvre par les Etats selon toutes les composantes initialement fixées12 . Cependant des disparités sont toujours notées dans la contribution financière des populations d’un poste de santé à l’autre. Cette situation nous emmène à étudier la consommation médicale apparente et essayer d’expliquer les facteurs d’inégalités dans la contribution financière des populations. Il s’agit dans cette partie d’étudier les données du système de soins c’est-à-dire les recettes par tête, les dépenses par tête et le taux de recouvrement des postes de santé. Ces indicateurs nous permettent d’évaluer les disparités de la consommation médicale apparente dans le district sanitaire de Thiès. Mais rappelons que ces données concernent les six premier mois de l’année 2010 parce que se sont les seules données qu’on a pu avoir

Les recettes par tête au niveau des postes santé

 Les recettes par tête au niveau des postes de santé sont différentes d’un service de santé à un autre. Certains postes ont enregistré des recettes beaucoup plus importantes que d’autres. Ces recettes varient de 9 FCFA dans le poste de Notto à 632 F CFA dans le poste de Tassette comme le montre la carte 3. Ainsi, il apparait que la variation des recettes par tête des postes de santé influe beaucoup sur leurs volumes d’activités. Le constat est que les postes de santé qui ont enregistré les recettes les plus importantes ont les volumes d’activités les plus faibles et les postes qui ont enregistré les recettes par tête les plus faibles ont enregistré les volumes d’activités les importants. Il apparait donc que l’utilisation des services de santé s’explique principalement par le coût différentiel des soins qui se révèle plus importants dans certaines structures et moins importants dans d’autres. La recherche de recettes conséquentes par les postes de santé les pousse à augmenter le coût des soins. On pourrait penser que le coût des soins détermine le taux d’utilisation des structures sanitaires. La diminution de l’utilisation des structures à tarifs élevés nous amène à poser le problème des nouvelles formes de disparités spatiales créées par la mise en place de l’Initiative de Bamako. La mise en place de l’IB a créée de nouvelles formes de disparités dans la contribution financière des populations qui ont des conséquences sur l’utilisation des soins médicaux. Cette situation est contraire aux objectifs de départ des soins de santé primaires et de l’IB qui était de rendre possible l’accès aux soins et aux médicaments aux populations les plus démunies. Cette situation influe beaucoup sur le recours aux soins des populations. C’est dire qu’il y’a une corrélation entre les recettes par poste et l’utilisation des structures de soins. D’ailleurs l’analyse de la relation entre le taux d’utilisation et les recettes par tête des postes de santé révèle une corrélation significative entre ces deux variables (R2 = 0,616) comme le montre la figure 1. Les postes de santé dans lesquels les recettes par tête sont plus importantes sont ceux dont les volumes d’activités sont plus faibles. Par contre les postes dans lesquels les recettes par tête sont très faibles sont ceux dont les volumes d’activités sont plus importants. Plus le coût est élevé plus l’utilisation de la structure dimunie et plus le coût est faible plus l’utilisation de la structure augmente. 

Les dépenses par tête au niveau des postes de santé 

Les dépenses effectuées par les postes de santé sont variables d’une structure sanitaire à une autre. De ce fait certains postes ont effectué des dépenses beaucoup plus importantes que d’autres. Ces dépenses varient de 12 F CFA dans le poste de Notto à 2860 F CFA dans le poste de Tassette (voir carte 4). Carte 4: Dépenses par tête au niveau des postes de santé en F CFA 40 Avec une moyenne de 1144 F CFA, on peut classer les dépenses par tête des postes de santé en trois groupes : – Le premier groupe représente les postes de santé qui ont effectué des dépenses par tête qui sont supérieures à la moyenne. On peut citer dans ce groupe Cité Niakh avec 2516 F CFA, Silmang 2741 F CFA, Tassette 2860 F CFA, Cité Lamy 1326 F CFA, Nguinth 1803 F CFA, Mbour3 1303 FCFA, Peyckouk et Hanène 1945 F CFA. Ces postes ont effectué des dépenses par tête supérieures à la moyenne. – Le deuxième groupe représente les postes de santé qui ont effectué des dépenses par tête inferieures à la moyenne. Il s’agit de Notto 12 F CFA, Pout Diack 205 F CFA, Diakhao 261 F CFA, Thiès None 196 F CFA, Mbour II 261 FCFA, Medina Fall II 437 F CFA, Takhikao 305 FCFA, Nguinth 333 F CFA, Mbour I 530F CFA, Goutte de Lait 608F CFA, Darou Salam 624F CFA et Sam Ndiaye 805F CFA. – Le troisième groupe représente les postes de santé qui ont effectué des dépenses par tête plus ou moins égal à la moyenne. Il y’a dans ce groupe Medina Fall I avec 1078F CFA, Grand Thies 1079F CFA, Kissane 1169F CFA et Petit Thialy 1087F CFA. Ici, on peut dire que les dépenses par tête des postes de santé dépendent plus ou moins de leurs taux d’utilisation. On voit nettement que les postes qui ont effectué les dépenses les plus importantes ont enregistré les effectifs de consultants les plus importants a titre illustratif on peut citer les postes de Tassette, de Cité Niakh et de Silmang. Avec des effectifs de consultants respectifs de 3853, 4327 et 1319 consultants, ces postes ont effectué des dépenses par tête de 3853F CFA, 4327F CFA et 1319FCFA soit les plus importantes. Par contre les postes de santé qui ont effectué les dépenses par tête les plus faibles ont enregistré aussi les volumes d’activités les plus faibles. L’exemple de Notto, Thiès None et Pout Diack sont assez illustratifs. De ce fait ces postes qui ont enregistré des taux d’utilisation respectifs de 4%, 12% et 11%, ont effectué des dépenses par tête de 409F CFA, 196F CFA et 205F CFA soit les plus faibles de l’ensemble. Mais l’interprétation de la relation entre les dépenses par tête des postes de santé et leurs taux d’utilisation montre que la corrélation entre ces deux variables est faible (R2 = 0,119) comme le montre la figure 2. 41 Figure 2: Relation entre les dépenses par tête et le taux d’utilisation des postes de santé Source : Enquête SYLLA, 2012 Il apparait donc que les dépenses par tête des postes de santé sont peu corrélées aux volumes d’activités des structures sanitaires. Donc on pourrait penser que les structures sanitaires dépensent plus ou moins en fonction de leurs volumes d’activités. Mais la répartition des dépenses issues de la participation financière des patients montre que les dépenses des postes de santé sont en général plus orientées vers les autres dépenses. Même si les postes de santé enregistrent des recettes plus importantes en médicament, ils ne dépensent pas beaucoup pour renouveler leurs stocks comme le montre le graphique. Figure 3: Répartition des dépenses issues de la participation des populations dans les postes Source : MPAS, 2010 y = 0,0046x + 15,258 R² = 0,1198 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 Taux d’utilisation en % Dépenses par tête des postes de santé en FCFA Dépenses Médicaments Depense fonctionnement Depense Personnel Autres Dépenses 42 Il ressort de ce graphique que les autres dépenses occupent la première place avec 79% par rapport aux dépenses de médicaments qui ne représentent que 12% seulement. Les dépenses de personnel et les dépenses de fonctionnement représentent quant à eux respectivement 7% et 2% ce qui est très minime. La question qui se pose ici est en quoi consiste les autres dépenses étant donné qu’ils ne sont pas utilisées pour les médicaments, le personnel, le fonctionnement encore moins pour la maintenance. JAILLY, 1993 disait que la tarification ne peut pas être une condition suffisante de l’amélioration de la qualité des soins : tout dépend en réalité de l’utilisation qui sera faite de fonds recueillis. On connait des cas dans les quels les premières recettes ont servi à repeindre le logement du médecinchef ou à réparer un véhicule destiné à lui rendre les déplacements plus aisées. Or l’amélioration de la qualité des soins est essentiellement fonction du plateau technique, de la qualification du personnel, de sa motivation et de sa conscience professionnelle. Les fonds générés par la tarification des actes et la vente des médicaments essentiels sont prioritairement thésaurisés ou employés à d’autres fins que des activités visant à améliorer l’accès aux soins des plus pauvres (RIDDE. V, 2007). 

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 Le taux de recouvrement 

Le recouvrement des coûts exprime le degré avec lequel les frais engagés pour assurer le fonctionnement des services ont été recouvertes grâce à la participation des utilisateurs. Ainsi le taux de recouvrement mesure le taux d’autofinancement des structures sanitaires. Le recouvrement des coûts fait partie des quatre (4) axes majeurs de la réforme du financement de la santé et vise essentiellement deux objectifs : sanitaire c’est-à-dire accroitre l’accessibilité des populations aux soins de santé ; économique c’est-à-dire aussi accroitre les ressources financières pour pérenniser la qualité des soins. Mais selon JAILLY, 1993 la tarification ne peut être une condition suffisante de l’amélioration de la qualité des soins, tout dépend en réalité de l’utilisation qui sera faite des fonds recueillis. Dans cette étude, il y’a lieu de voir si les postes de santé du district sanitaire de Thiès ont recouvré leurs coûts grâce à la participation financière des populations. Sachant que pour le Ministère de la santé, un bon taux de recouvrement doit être supérieur ou égal à 2,5%. Mais les résultats ont montré que les postes de santé du district de Thiès n’ont pas recouvré leurs coûts vu que les dépenses sont plus importantes que les recettes dans l’ensemble de ces postes. Ainsi, pour que le recouvrement des coûts soit effectif, on doit avoir plus de recettes que de dépenses. Ce taux varie de 0,10% dans le poste de Silmang à 0,84% dans le poste de Thiès None comme le montre la carte 5. 43 Carte 5:Taux de recouvrement des postes de santé du district sanitaire de Thiès Il apparait que ces postes sont loin d’atteindre le taux du ministère de la santé avec une moyenne de 0,23% on peut classer les postes de santé en trois groupes selon le taux de recouvrement. – Le premier groupe représente les postes de santé dont leurs taux de recouvrement sont supérieurs à la moyenne 0,23%. On peut citer dans ces postes Thiès None 0,84%, Diakhao 0,71%, Takhikao 0,64%, Medina Fall II 0,49%, Mbour II, Grand Thiès et Pout Diack 0,46%, Darou Salam 0,36% , Mbour I 0,33%, Notto 0,77% et Goutte de lait 0,30% . – Le deuxième groupe représente les postes de santé dont le taux de recouvrement est inférieur à la moyenne. Il s’agit de Silmang 0,10%, Kissane 0,11%, Cité Lamy, Cité Niakh et Mbour III 0,13% et Keur Saib Ndoye 0,15%. – Le troisième groupe représente les postes de santé dont le taux de recouvrement est plus ou 44 moins égal à la moyenne. Il y’a dans ce groupe Tassette 0,22%, Petit Thialy 0,23%, Peycouk 0,19%, Nguinth, et Médina Fall I 0,18%, Hanène 0,27 et Sam Ndiaye 0,28%. Pour dire que tous ces postes de santé n’ont pas recouvré leurs coûts mais certains postes ont des taux beaucoup plus importants que d’autres. La capacité du poste de santé à couvrir ses coûts suppose une fréquentation suffisante du poste et des acteurs qui contrôlent les recettes et limitent les dépenses superflues (SY .M.D et Al, 2006). Ainsi, malgré la majoration des prix dont fait preuve les postes de santé, ils n’ont pas réussi à recouvrer leurs coûts. Sinon de rendre l’accès encore plus difficiles pour les catégories sociales économiquement défavorisées en renforçant les disparités dans la contribution financière de ces derniers. Le recouvrement des coûts à des effets désastreux sur l’utilisation des soins de santé et sur les budgets familiaux spécialement pour les plus pauvres (JAILLY, 1993). Or le recouvrement des coûts mis en place au fur et à mesure que s’implantait l’IB, était censé accroitre l’accès aux soins par une juste redistribution des revenus permettant ainsi au plus pauvres d’utiliser les services de première ligne ( CISSE. B et Al, 2004). Par conséquent pour que le recouvrement des coûts puisse être effectif dans les structures sanitaires, il faudrait l’appui de l’Etat et le soutien des ONG étant donné que les recettes seulement des comités de santé ne permettent pas le recouvrer leurs coûts. Cette situation nous amène à étudier la corrélation qui existe entre le taux de recouvrement et le volume d’activité des structures de soins. Mais la corrélation entre le taux de recouvrement et le taux d’utilisation des structures sanitaires est très faible (R2 = 0,003) voir figure 3. 

Table des matières

SOMMAIRE
SIGLES ET ABREVIATIONS
AVANT PROPOS
INTRODUCTION GENERALE
PROBLEMATIQUE DE LA RECHERCHE
1.1. CONTEXTE DE LA RECHERCHE
1.3. OBJECTIFS DE L’ETUDE
2- CADRE METHODOLOGIQUE
2.2. La collecte des données sur le terrain
PREMIERE PARTIE : LA CONTRIBUTION FINANCIERE DANS LE DISTRICT SANITAIRE DE THIES
CHAPITRE I : LA CONTRIBUTION AU FINANCEMENT DES SOINS PRIMAIRES : DES
DISPARITES IMPORTANTES
1.1. Les recettes par tête au niveau des postes santé
1.2. Les dépenses par tête au niveau des postes de santé
1.3. Le taux de recouvrement
CHAPITRE II : LA CONSOMMATION MEDICALE APPARENTE DES POPULATIONS
2. 1. Le coût moyen des soins par patient
2.2. La nature des dépenses de santé des populations
2.3. La consommation médicale moyenne en fonction des postes de santé
DEUXIEME PARTIE : LES FACTEURS DE DISPARITES DANS LA CONSOMMATION MEDICALEAPPARENTE
CHAPITRE I : DES DIFFERENCES DUES AUX COUTS DES SOINS
I.1.Les coûts de consultation dans les postes de santé
I.2. La marge bénéficiaire
CHAPITRE II : LA MORBIDITE DIAGNOSTIQUEE DANS LES POSTES DE SANTE
CHAPITRE III : LES DETERMINANTS DU RECOURS AU SOINS
III.1. La répartition des patients par âge et par sexe
III.2. Les principales activités économiques
III. 3. Le niveau d’instruction des patients
III. 4. La distance parcourue par les patients enquêtés
III.5. Les types de recours aux soins des patients
III.6. Les motifs du recours aux soins des patients
CHAPITRE IV : UNE GESTION INDIVIDUELLE DE LA SANTE COMMUNAUTAIRE
IV.1. Les comités de santé des postes échantillonnés
I V.2. Le déficit de communication entre les acteurs
IV.3. Des médicaments en rupture permanente
Conclusion
Bibliographie
ANNEXES
LISTE DES CARTES
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX

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