Analyse des données du fond diffus cosmologique
Fluctuations dans l’univers
La faible amplitude observée des anisotropies du CMB suggère qu’il est possible de traiter notre univers comme une version perturbée d’un univers homogène et isotrope, et que ces perturbations peuvent, au début de l’histoire de l’univers, faire l’objet d’un traitement linéaire. Dans cette section, nous tenterons, dans un premier temps, de présenter les grandes lignes du traitement des perturbations linéaires dans l’univers (Kodama et Sasaki, 1984). Nous expliciterons ensuite les mécanismes de génération d’anisotropies observables dans le rayonnement du fond dius cosmologique et le formalisme employé pour décrire leurs propriétés statistiques. Nous donnerons également un aperçu des mécanismes susceptibles de générer des anisotropies, qualiées de secondaires, par opposition aux anisotropies liées aux uctuations primordiales au moment de la recombinaison. Enn, nous tenterons de donner une compréhension intuitive des paramètres cosmologiques qui peuvent être contraints par l’observation du CMB. Notons que l’origine des uctuations primordiales n’est pas abordée dans cette section. La section suivante (1.3) proposera un mécanisme de génération des uctuations primordiales dans le cadre des modèles d’ination.
Fluctuations de la métrique
La démarche employée pour traiter les uctuations dans l’univers est donc d’ajouter des perturbations linéaires à la métrique FLRW ¯g (par la suite la notation x¯ dénotera les quantités de l’univers non-perturbé). Celle-ci se récrit en faisant intervenir le temps conforme et en utilisant des unités naturelles : ds2 = a 2 (η) .
Anisotropies secondaires
En plus de l’eet Sachs-Wolfe intégré déjà mentionné, plusieurs phénomènes peuvent aecter les photons du CMB sur leur trajet entre la surface de dernière diffusion et nous : La réionisation de l’univers, caractérisée de la façon la plus simple par sa profondeur optique τ . L’eet Sunyaev-Zel’dovich (Sunyaev et Zeldovich, 1972), qui provient de la diffusion des photons du fond dius cosmologique sur les électrons relativistes du gaz des amas de galaxies. Cet eet sera traité plus en détail en section 2.2.2. La distribution des amas de galaxies est particulièrement sensible à la puissance des uctuation de matière (paramétrée par σ8). L’eet Vishniac (Ostriker et Vishniac, 1986; Vishniac, 1987), qui consiste en la regénération d’anisotropies à petite échelle par les uctuations de matière baryonique ionisée. L’eet de lentille gravitationnelle faible par les structures à grande échelle (weak lensing en anglais). Cet eet est notamment responsable d’un mélange entre les modes de polarisation E et B. L’eet Sachs-Wolfe intégré (ISW), introduit auparavant, dû à la variation du potentiel gravitationnel le long de la ligne de visée. Pour les structures en eondrement non-linéaire, l’ISW doit recevoir un traitement nonlinéaire, connu sous le nom d’eet Rees-Sciama (Rees et Sciama, 1968). L’eet de lentille gravitationnelle et la réionisation, ont tous deux une inuence importante sur la détection des modes B du CMB, étudiée au chapitre 5. Nous en donnons donc quelques détails. Réionisation À la n de l’âge sombre, le contenu de notre univers est à nouveau ionisé par le rayonnement des premiers objets formés (étoiles et quasars). Les contraintes actuelles suggèrent que la réionisation est un processus étendu qui a débuté à un redshift z & 11 et n’a été complètement achevé qu’autour de z ∼ 6. Néanmoins, le modèle le plus simple est celui d’une réionisation instantanée de l’univers à un redshift donné zre. La réionisation est alors caractérisée complètement par sa profondeur optique notée τ . Une fois l’univers réionisé, et tant que la densité des électrons libres n’a pas été susamment diluée par l’expansion, les photons du CMB vont pouvoir subir une nouvelle diffusion Thomson. Le premier eet de cette nouvelle diffusion est d’atténuer l’amplitude des uctuations à petites échelles d’un facteur e −τre . Le rayonnement incident étant anistrope, la diffusion crée également une anisotropie secondaire dans la polarisation à grande échelle. Le quadrupôle au moment de la rediffusion est dominé par les modes vériant k(ηre − η∗) ∼ 2. La rediffusion d’un mode E (respectivement B) génère ainsi un nouveau mode quadrupolaire ` = 2 de type E (respectivement B) qui se propage jusqu’à notre époque et contribue aux anisotropies à ` ∼ 2(η0 − ηre)/(ηre − η∗). La réionisation crée ainsi une bosse dans le spectre de puissance des modes E et B dont l’amplitude est approximativement proportionnelle à τ et dont la position dépend de l’époque de la réionisation ηre. Cette caractéristique permet d’apporter des contraintes sur la réionisation à partir de l’observation de la polarisation du CMB. À l’heure actuelle, seule l’expérience WMAP a permis d’observer le pic de réionisation des modes E. Les contraintes placées sur la profondeur optique de la réionisation sont τ = 0.087 ± 0.017 (Dunkley et al., 2009a). L’augmentation signicative de la puissance des modes B primordiaux à grande échelle par la réionisation devrait également faciliter leur détection (voir chapitre 5). Weak lensing Les uctuations de densité à grande échelle dans l’univers altèrent la direction de propagation des photons du CMB entre la surface de dernière diffusion et l’observateur. Au premier ordre, cet eet peut être modélisé par une simple déection du signal primordial suivant : T(ξ) = T(ξ + ∇φ(ξ)) (1.65) (Q ± iU)(ξ) = (Q ± iU)(ξ + ∇φ(ξ)), (1.66) où l’angle de déection ∇φ est gouverné par la projection du potentiel gravitationnel : φ(ξ) = −2 Z z∗ 0 Ψ(z, D(z)ξ) D(z∗) − D(z) D(z∗)d(z) dz H(z) , (1.67) avec D désignant la distance comobile et Ψ le potentiel gravitationnel. Les structures à l’origine du potentiel n’étant pas particulièrement corrélées aux grandes échelles, l’eet du phénomène de lentille sur le CMB n’est sensible qu’aux petites échelles. Son action principale peut être appréhendée intuitivement comme l’ajout d’un ou de bougé sur le motif original, 1.3. L’INFLATION 23 qui a pour eet de mélanger les modes de uctuations. Le spectre de puissance des uctuations se trouve ainsi lissé (les pics acoustiques sont atténués) aux petites échelles. Le signal de polarisation présentant des pics acoustiques plus prononcés que le signal de température, est plus sensible à l’eet du lensing. Un autre eet notable sur le motif de polarisation du CMB, est que bien que le lensing conserve localement Q et U, il provoque un mélange entre les modes de polarisation E et B, car la transformation de (Q, U) en (E, B) n’est pas une opération locale. Comme nous l’avons présenté précédemment, seul les modes de uctuations de type tenseur sont susceptibles d’induire un motif de polarisation B dans les uctuations primordiales. Ces derniers pouvant être arbitrairement faibles, le transfert de puissance des modes E vers les modes B par le lensing dominera probablement les modes B primordiaux. Enn signalons que le lensing peut également être une source importante d’information cosmologique (voir par exemple Stompor et Efstathiou 1999). Il est en eet possible de reconstruire en partie le potentiel gravitationnel projeté φ, notamment à partir de l’observation de la polarisation du CMB (Knox et Song, 2002; Seljak et Hirata, 2004). Son spectre du puissance C φφ ` est sensible, en particulier, au paramètre de courbure ΩK, à la masse des neutrinos et à l’équation d’état de l’énergie noire, aidant en particulier à lever la dégénérescence sur la distance angulaire de la surface de dernière diffusion
Introduction |