Analyse de robustesse des correcteurs et Contrôle actif de modèles identifiés
Nous allons étudier dans ce chapitre la robustesse des correcteurs déterminés précédemment. Parmi les outils dont on dispose, on trouve la technique de la valeur singulière structurée (VSS) destinée pour l’analyse de stabilité de robustesse des systèmes LTI soumis à des incertitudes ayant une structure particulière. La valeur singulière structurée, introduite par Doyle, est un outil puissant en commande robuste. La détermination de ce paramètre a été étudié par plusieurs chercheurs tels que Peter M. Young, Matthew P. Newlin et John C. Doyle dans [42] [43]. Young et Newlin ont implémenté un algorithme de calcul efficace de la VSS dans Matlab ®, logiciel édité par Mathworks, que nous allons utiliser ici pour notre analyse.
Correction du modèle du système à 3 modes
Pour tester à nouveau l’efficacité des correcteurs déterminés précédemment à partir du modèle du système à deux modes, on a choisi de calculer les fonctions de transfert H en gardant les trois premiers modes. On a comparé par la suite la réponse du nouveau modèle obtenu en présence des correcteurs 𝐻Les correcteurs amortissent les trois pics de résonance en dépit du fait qu’ils soient configurés pour agir seulement sur les deux premiers modes du système. En effet, ce sont les deux premiers modes qui impactent le plus la réponse du système, surtout dans les plages de fréquence d’intérêt pour notre système. La Figure 90 montre les diagrammes de Bode des deux fonctions de transfert du système H calculées avec 7 modes dont les deux premiers sont visiblement les plus résonnants. Les essais de contrôle avec ces correcteurs prouvent leur effet amortissant puisqu’ils atténuent bien les vibrations du système usinant bien que celui-ci ait en théorie une infinité de modes. Ensuite, pour prouver davantage la robustesse de ces correcteurs, on a testé par simulation les correcteurs LQG et 𝐻 obtenus à partir de l’ancien modèle d’état (deux modes) sur le système à trois modes pour une opération de fraisage à 2800 tr/min, avec un outil à 2 dents de diamètre 16 mm, une avance de 0.05 mm/tr/dent et un engagement axial de 0.5 mm.
Robustesse
Les correcteurs robustes sont ceux qui garantissent un niveau de performance convenable en présence d’incertitudes bornées [44]. L’étude de robustesse des contrôleurs déterminés précédemment nécessite alors d’intégrer des incertitudes dans le modèle mathématique de notre système pour prendre en compte des inévitables erreurs de modélisation. Ces incertitudes doivent être considérées puisqu’on peut avoir de fortes variabilités dans le processus de coupe, mais aussi en raison de la présence des non linéarités du modèle de coupe ou de celui de l’actionneur qu’on ne prend pas en compte dans nos modèles. Pour compléter la liste de sources d’incertitudes, du bruit vient s’ajouter au niveau des mesures ou de la consigne mais aussi un phénomène physique qui n’est pas considéré à l’étape de modélisation du système. Il s’agit du phénomène de la torsion qui apparaît pendant l’usinage de l’éprouvette surtout aux extrémités où il est le plus intense à la fréquence de 500 Hz (Figure 93).
La démarche d’analyse de robustesse consiste à tester des lois de commande construites à partir du modèle nominal du système, sur des systèmes issus de ce modèle nominal, auquel on rajoute par la suite différents types d’incertitudes. Il est indispensable de disposer de correcteurs robustes qui seront capables de travailler correctement dans un environnement hostile et en présence de variations inhérentes aux processus réels. Avant de commencer l’étude de robustesse, on rappelle la notion de Transformation Linéaire Fractionnaire (Figure 94) qui est indispensable pour cette étude. Il s’agit de la fonction de transfert d’un système comprenant deux sous-systèmes reliés par boucle de retour, obtenue par une manipulation simple des éléments des matrices de transfert de ceux-ci.
Généralement, les erreurs de modélisation sont regroupées en deux grandes classes suivant la structure de la matrice ∆ ; les incertitudes structurées et les incertitudes non structurées. La matrice ∆ du premier type d’incertitudes possède une structure particulière puisqu’elle est diagonale alors que celle du deuxième type est un bloc complexe plein, et donc n’a pas de structure particulière. Dans le premier cas d’incertitudes mais aussi dans le cas où on ne tient pas compte d’une éventuelle structure de la matrice ∆, on utilise pour l’analyse de robustesse le théorème du petit gain qui dit :
La robustesse des correcteurs est naturellement mise à l’épreuve puisqu’il s’agit de contrôler une structure continue qui a donc une infinité de degrés de liberté. Or, le correcteur est évidemment calculé à partir du modèle d’état de cette structure qui provient de la décomposition modale du déplacement de celle-ci tronquée à un nombre fini de modes. Ceci fait donc apparaître l’instabilité des modes résiduels qui ne sont pas pris en compte. On trouve le phénomène de Spillover défini par le transfert d’énergie vers des modes élevés qui ne sont pas pris en compte dans le modèle. Il y a deux types de Spillover qui peuvent intervenir séparément ou même les deux en même temps. Le premier, appelé Spillover d’observation, apparaît lorsque les signaux observés du modèle réduit sont pollués par les modes d’ordre supérieur alors que le deuxième, Spillover de contrôle, a lieu lorsque ceux-ci sont excités par le contrôle. On obtient instabilité par spillover quand les deux types sont réunis.