ANALYSE DE LA LEGISLATION VETETRINAIRE MAURITANIENNE RELATIVE A LA SANTE PUBLIQUE
L’identification des textes
Les textes législatifs et réglementaires mauritaniens relatifs à la santé publique vétérinaire ont comme base le Code de l’Elevage. Même si toutes les dispositions restrictives de liberté qui seraient utiles pour une gestion exhaustive du domaine vétérinaire ne sont pas contenues dans cette loi, l’essentiel y figure et permet déjà de réglementer beaucoup d’activités du domaine vétérinaire. Concernant les règlements, certains ont été pris, notamment ceux sur la pharmacie vétérinaire et l’Ordre des vétérinaires. D’autres sont en cours d’élaboration, en particulier le décret sur la police sanitaire. D’autres textes, prévus ou non dans le Code de l’élevage, n’ont pas encore été rédigés. La tentative de « codifier » les activités du domaine vétérinaire dans un seul document est intéressante mais elle n’a pas permis de traiter de façon exhaustive chaque composante de la législation vétérinaire.
Stratégie d’élaboration des textes juridiques
L’élaboration des textes en Mauritanie en matière de services vétérinaires n’est pas chronologique et régulier. On constate un grand écart entre les textes en termes de date. La Loi 2004/024 portant Code d’Elevage manque crucialement de décret d’application dont le plus important est le décret portant police 25 sanitaire qui est toujours en projet . Les textes d’application devraient être en même temps élaborés avec les textes fondamentaux. La situation actuelle pose un problème de légitimité en matière d’activités de police zoosanitaire. La stratégie d’élaboration ne laisse pas percevoir une consultation formelle des bénéficiaires, d’où les difficultés dans l’application des textes. Le Code ayant abrogé les dispositions antérieures article 49, quelle est la base juridique de certaines activités si les décrets d’application ne sont pas pris. Les agents du MDR en charge d’élaborer et de faire appliquer les textes relatifs au domaine vétérinaire sont en nombre insuffisant au regard des normes internationales admises ce qui explique en partie une production législative et réglementaire insuffisante et des lois, décrets et arrêtés non ou peu appliqués.
L’analyse de la conformité des textes mauritaniens aux lignes directrices de l’OIE
Dans sa définition donnée par l’OIE, l’Autorité Vétérinaire Compétente désigne « l’autorité gouvernementale d’un Membre de l’OIE, comprenant des vétérinaires et autres professionnels et para professionnels, ayant la responsabilité de mettre en œuvre les mesures relatives à la protection de la santé et du bien-être des animaux, de gérer les activités de certification vétérinaire internationale et d’appliquer les autres normes et recommandations figurant dans le Code terrestre, ou d’en superviser l’exécution sur l’ensemble du territoire national, et présentant les compétences nécessaires à cet effet’’ . Néanmoins, l’Autorité Nationale souffre énormément dans ses prérogatives par la multiplicité des intervenants notamment dans le domaine de l’inspection vétérinaire. Aussi, la chaîne de commande du niveau central vers les services déconcentrés n’est pas directe car il n’y a pas de liens hiérarchiques entre la DE et les entités régionales. Dans les situations d’urgence les services vétérinaires utilisent le schéma du Réseau Mauritanien d’Epidémiosurveillance des Maladies Animales pour la transmission et la réception des informations. S’agissant de la qualité externe des textes, il est signalé un manque important de certains textes essentiels non encore promulgués et dont les prescriptions techniques et organisationnelles sont assez bien codifiées et reconnues pertinentes par les règles internationales, notamment par le Code sanitaire pour les animaux terrestres de l’OIE. C’est notamment le cas de la lutte contre les maladies, la réglementation des para professionnels vétérinaires Projet de décret portant sur l’Exercice de la Profession Vétérinaire ou la gestion sanitaire des marchés et mouvements transfrontaliers de bétail Projet de décret portant l’Exportation, l’Importation des animaux et la Transhumance. S’agissant de la qualité interne des textes, il y’a dans la législation nationale examinée des lacunes en matière de définitions, notamment pour les termes techniques du domaine vétérinaires ex : notion d’auxiliaires vétérinaires citée 26 dans le Code de l’Elevage mais n’existant pas dans le Code Terrestre. Aussi, certaines abrogations nuisent à la clarté du droit existant (Article 49 du Code de l’élevage), des contradictions entre la loi et les décrets ou projets de décrets Listes des maladies animales prévues à l’article 8 du Code de l’Elevage et non reprises dans le projet de décret. Il n’existe pas de système de commissionnement et d’assermentation, ce qui fragilise sur le plan juridique l’action des inspecteurs Projet de décret portant sur la Police Sanitaire des Animaux Domestiques. L’organisation du REMEMA et les moyens dont il dispose ne permettent pas la réalisation d’études épidémiologiques telles que recommander par les normes internationales. Les personnels des services vétérinaires ne sont pas suffisamment formés pour une analyse de risque pertinente. Du coup se pose le problème de capacité réelle de suspicion et d’alerte précoce. Les lignes directrices paraissent être en avance sur la législation vétérinaire mauritanienne, car conçues à partir de la réalité et des objectifs de la législation européenne. Cette situation pourrait expliquer les écarts observés notamment l’absence de correspondance aux points : – Les conditions de repeuplement, – Les dispositions particulières et temporaires au regard de tous les risques encourus pour la santé humaine et animale, – Les pertes d’exploitation, – La disponibilité de fonds de compensation des propriétaires en cas de mise à mort ou d’abattage des animaux, saisie ou destruction des carcasses, de la viande, des aliments pour animaux ou d’autres matériels, – Des plans d’urgence prévus pour certaines maladies.
Application des textes
L’application d’un texte est liée à son accessibilité et à sa disponibilité. La loi ne peut en effet être appliquée que si ses textes d’application sont pris. Le Code de l’Elevage qui est la loi de base en matière d’activités des services vétérinaires n’a pas de façon exhaustive tous ses textes d’application. Dans l’impossibilité d’appliquer ce qui n’existe pas le décret sue la police sanitaire par exemple, on applique ce qui est sensé être abrogé portant réglementation de la police sanitaire des animaux. L’application est tributaire également de la disponibilité des moyens humains, matériels et financiers. La Mauritanie, à l’instar des autres pays en développement souffre du manque crucial de ces moyens pour l’administration publique, d’où des insuffisances observées dans l’application effective des textes.
Recommandations
A l’issue de cette étude, certaines recommandations ont été proposées : 1. La restructuration de la Direction de l’Elevage avec la création de cadre et des outils institutionnels adaptés à une production législative de qualité et à son application, à savoir : ü la cellule de législation et réglementation pour préparer, argumenter et défendre les nouveaux textes ; ü la cellule de communication pour diffuser et permettre une meilleure compréhension et une application effective des textes ; ü la cellule de collecte et d’analyses de données statistiques fournissant aux deux autres des données pertinentes pour évaluer a priori et a posteriori les effets des textes en projet ou en vigueur ; 2. Chercher à raccourcir la chaîne de commandement entre la Direction de l’Elevage et les services déconcentrés, notamment : ü dans les textes réglementaires relatifs aux activités nécessitant une alerte précoce et une capacité de réaction rapide basée sur les textes en vigueur (foyers de maladies, intoxications alimentaires, …) ; ü cela pourrait avantageusement être inclus dans les textes d’organisation du ministère ; ü poursuivre la mise en œuvre de la base de données juridique et établir l’état du droit existant pour le domaine vétérinaire. 3. Définir une stratégie en matière de législation en fixant des axes prioritaires (textes d’application et outils pratiques de mise en œuvre de l’existant, puis production de nouveaux textes, organisation générale, ressources humaines à mobiliser, cadres de consultation des bénéficiaires, formation des cadres, modalités de l’appui juridique, etc.) ; 4. Asseoir systématiquement lors de l’élaboration la comparaison avec les principes énoncés dans les lignes directrices de l’OIE. 5. Favoriser l’émergence d’un cadre de concertation permanent entre les différentes autorités compétentes en charge du domaine vétérinaire en vue de préciser dans les textes, les modalités de coordination et de répartition des rôles. 6. Améliorer la formation juridique des principaux responsables pour une bonne compréhension des recommandations de l’OIE et une production de textes de qualité. 28 7. Accélérer la prise des textes réglementaires en projets pour combler le vide juridique actuel. 8. Impliquer les bénéficiaires dans le processus de production des règles 9. Impliquer les bénéficiaires dans les programmes de prophylaxie collective 10. Mettre en place un fonds permettant la compensation des propriétaires en cas d’abattage d’animaux ou de saisie de carcasse et d’aliments pour animaux.
Introduction |