Analyse a posteriori
Pour cette analyse a postériori, nous avons choisi de recentrer les études de vidéos sur les moments d’introduction de la définition formelle et la gestion des exercices. Nous avons observé trois enseignants (M, A et L) qui ont utilisé le logiciel et un enseignant ordinaire (N) qui n’a utilisé que le manuel. Donc, en premier lieu nous proposons une analyse des traces (sur le logiciel) des élèves de la classe de l’enseignante « M » puis celle de l’enseignant « A ». Notons que nous n’avons pas récupéré les traces des activités des binômes de la classe de l’enseignant « L » sur leurs ordinateurs. Cela nous permet une première validation de notre ingénierie à partir des traces des productions des élèves. Ensuite, nous proposons une analyse des extraits des séquences filmées de chacun des enseignants (M, L, A et N) qui ont participé à l’expérimentation de notre ingénierie. Ces extraits ne concernent que l’introduction de la définition formalisée à l’issue de la gestion de l’activité 1 du logiciel dans son « approche formelle », ainsi que la partie des exercices (mais uniquement pour les professeurs M et L). D’une part, il n’était pas possible matériellement de nous livrer à des analyses de l’intégralité des séquences (logiciel ou ordinaire) des 4 professeurs (ce qui aurait représenté plus de 10 heures de séances). D’autre part, des problèmes de récupérations de données ont fait que nous n’avons pas pu avoir accès à tout ce qu’il aurait été possible de récupérer (approches cinématiques, formelles et exercices du logiciels chez M, L, A ainsi que la séance ordinaire de deux heures chez N). Les sources de données ne sont donc pas homogènes d’un enseignant à l’autre. Enfin, étant donné que notre problématique porte sur l’introduction de la définition formalisée de la continuité (au sein d’un certain niveau de conceptualisation que nous avons décrit dans le chapitre IV), nous avons choisi de ne transcrire que les épisodes qui précèdent cette introduction dans les 3 séances logicielles, les épisodes d’exercices pour étudier le réinvestissement de la connaissance nouvelle par les élèves dans ces exercices, et la séance ordinaire d’une heure, dans laquelle l’enseignant N suit le cours et les activités proposés par le manuel
Analyse des traces des élèves sur le logiciel Analyse des traces des élèves des enseignants « M » et « A »
Nous avons reçu, à la fin des séances assurées par le professeur « M » pour les élèves de la troisième année section mathématique, neuf (09) dossiers enregistrés par le logiciel TIC_Analyse. Cette classe comporte neuf binômes (M1, M2, … et M9), chacun d’eux a travaillé sur sa propre machine (PC). Nous avons choisi d’analyser aussi la trace des élèves de l’enseignant « A ». Cette fois-ci, nous n’avions récupéré que six (06) dossiers pour les binômes (A1, A2, … et A6) pourtant il y avait beaucoup de binômes qui ont travaillé sur leurs PC personnels.
Commentaires à l’issue du tableau de l’enseignant A
– On retrouve le même type de résultats que dans le cas de l’enseignant M même si on peut regretter que beaucoup d’étapes n’ont pas été enregistrées par les binômes, ce qui occasionne des trous (sans données) dans le tableau. – Toutefois, il y a ici des binômes (A2, A3, A5 et A6) qui ont réussi à proposer une valeur de α pour la non continuité de l’activité 2 dans le cas de β = 0,5. Dans le cas où la valeur trouvée est > 0,01 (en l’occurrence A5 propose 0,48 sans utiliser la recherche automatique), on peut se demander dans quelle mesure il a effectivement en ce qui le concerne compris la consigne. Dans le cas où la valeur de α trouvée est 0,01, les binômes peuvent avoir utilisé la recherche automatique ou non : A2 et A3 ont trouvé 0,01 en utilisant la recherche automatique et 0,01 est justement la valeur de α affichée par le logiciel à la fin de sa recherche automatique (copie d’écran ci-dessous). Les élèves ont recopié le α affiché par le logiciel alors qu’il n’y a pas de α qui correspond à β = 0,5. Les élèves ont-ils vu le commentaire du logiciel à compléter qui apparaît à la fin de la recherche ? Ont-ils compris que dans le cas β = 0,5, il n’y a aucune valeur de α satisfaisante ? Sinon comment expliquer que pour les valeurs de β suivantes, ils ont su qu’il n’y a pas de recherche à faire ? Il y a certainement dans ces cas un effet des interventions du professeur auquel il n’est pas possible d’accéder à partir de ces seules données extraites des traces logicielles. Dans le cas de A6, c’est encore plus questionnant car A6 ne semble pas avoir utilisé la recherche automatique et donc pour α = 0,01, il n’apparait pas d’intervalle I tel que f(I) soit inclus dans J, donc il aurait dû ne pas conclure ainsi.
Commentaires à l’issue de l’analyse des traces des binômes chez M et A –
Dans les deux classes dont nous avons les traces du logiciel, on observe que tous les binômes, dans les cas 1 et 4 de continuité, ont manipulé le logiciel pour trouver des valeurs de α correspondantes aux valeurs de β fournies par le logiciel. Cela nous semble déjà un aspect positif car ces actions se sont nécessairement accompagnées d’activités mathématiques (reconnaissances et traitements) qui sont pour nous constitutives d’une entrée dans la bonne compréhension – si ce n’est la conceptualisation – de la définition formelle. Les commentaires dans le langage naturel sont toujours à peu près corrects, même s’ils sont souvent maladroits. Par exemple dans leurs commentaires, des élèves utilisent le mot « dans » au lieu de « inclus dans » ce qui peut être induit par l’effet de la visualisation des intervalles dans les autres sur le logiciel. – Mais on constate surtout que les formulations en langage naturel, quand bien même le champ est totalement ouvert, sont très proches d’un binôme à l’autre dans la classe de M et dans la classe de A. Les binômes de la classe de l’enseignante « M » utilisent presque la formulation « f(I) est (ou non) inclus dans J » lorsqu’ils complètent les commentaires. Les binômes de l’enseignant « A », eux aussi utilisent presque des formulations basées sur le mot « voisinage » comme « f(x) appartient au voisinage centre en f(x0) et de rayon beta » ou « … il existe des réels appartenant au voisinage centrée de x0 et de rayon alpha et leurs image n’appartiennent pas au voisinage centré de f(x0) et de rayon beta ». Il y a donc clairement un effet professeur à ce niveau, qui a donné des aides aux élèves. En fait, nous voyons que la façon de relire la consigne par l’enseignant à un instant où les élèves sont en train de réfléchir sur la tâche en question influe sur la façon dont les élèves formulent leurs commentaires. On peut se demander si ces interventions (aides) étaient uniquement procédurales ou si elles avaient des aspects constructifs. Toutefois cela fait preuve aussi que les élèves se sont montrés très attentifs aux interventions de leur enseignant qui les a aidés (semble-t-il). C’est pour nous un facteur d’engagement clair des élèves dans les activités qui étaient proposées. – Dans les cas de non continuité, on constate que les élèves, soit à partir de l’activité 2, au plus tard dans l’activité 3, ne remplissent pas les champs correspondants à des valeurs de β dès qu’ils ont trouvé une valeur de β pour laquelle il n’y a pas de α (tel que f(I) soit inclus dans J). Même si à nouveau il y a certainement un effet professeur, nous retenons cette observation comme un signe de l’entrée des élèves dans la compréhension – si ce n’est dans le niveau de conceptualisation visée – de la définition formalisée et le lien entre le β formel qui est proposé par le logiciel et le saut qui apparaît sur le graphique. Toutefois, il convient de rester prudent compte tenu par exemple de ce qu’on observe pour les binômes A2, A3, A5 et A6 dont nous avons parlé plus haut. Il y a cependant dans l’activité des élèves une nécessaire forte interaction entre le paradigme AI (l’existence d’un β) et le paradigme AG (le saut). Le travail sur la non continuité permet certainement en retour de mieux comprendre pourquoi dans l’activité 4, le fait que le graphique ne présente pas de saut est étroitement associé au fait que pour tout β on peut trouver α tel que f(I) soit inclus dans J ; ce qui à nouveau fait le lien entre les paradigmes AG et AI.