Amplification paramétrique d’images
Introduction L’optique non linéaire, d’un point de vue expérimental, est née avec la construction des premières sources lasers dans les années soixantes. Il s’agissait alors de vérifier les études théoriques menées sur les interactions lumière-matière. Les résultats les plus remarquables à l’époque étaient l’observation des phénomènes de génération de second harmonique [1] et d’amplification paramétrique dans la gamme des ondes optiques [2]. L’efficacité de ces phénomènes de conversion de fréquences, par mélange à trois ondes, dans les milieux non linéaires quadratiques est régie en partie par les conditions d’accord de phase. La première solution proposée pour satisfaire ces conditions a été l’alternance successive de milieux de non linéarité positive et négative compensant le désaccord de phase au delà de la longueur de cohérence. Mais à l’époque cette solution n’était pas techniquement réalisable. L’autre solution était l’exploitation des propriétés anisotropes des milieux non linéaires cristallins permettant de satisfaire les conditions d’accord de phase . De fait, l’anisotropie des cristaux privilégie certaines directions de propagation qui permet l’égalité des vitesses de phase d’ondes de fréquences et de polarisations différentes et assure l’accord de phase entre elles. Ensuite, R.C. Miller et al. [4] ont démontré que l’accord de phase était conservé sur une plage angulaire maximale pour des directions de propagation suivant les axes cristallins. En effet, dans ces conditions, les surfaces d’indices sont perpendiculaires aux axes de symétrie et peuvent ˆetre tangentes entre elles. Une telle configuration, dite non critique en angle, permet d’accroître l’efficacité de l’interaction non linéaire en focalisant les faisceaux lasers dans le milieu non linéaire; augmentant ainsi la densité de puissance des ondes en interaction tout en préservant l’accord de phase. Ces travaux ont permis d’appliquer l’optique non linéaire à l’imagerie. Notamment la conversion haute en fréquence d’images du proche infrarouge vers le visible a été vue comme une solution pour palier le très faible rendement quantique des détecteurs dans cette gamme de longueurs d’onde [5]. L’amplification d’images a également été étudiée soit par interaction non linéaire à trois ondes [6, 7] soit dans des milieux photoréfractifs [8]. Toutefois, dans le cas des interactions par mélange à trois ondes, la résolution des images converties ou amplifiées était limitée par des configurations d’accord de phase peu ou pas optimisées d’un point de vue de l’imagerie. La démonstration de l’existence d’accord de phase non critique en angles et en longueurs d’onde pour deux des ondes en interaction [9] a permis la réalisation de dispositifs d’imagerie non linéaire o`u la résolution spatiale et spectrale de l’image traitée est suffisante dans la perspective d’un traitement tout optique de l’information [10]. D’autre part, les interactions non linéaires en régime impulsionnel ont ouvert de nouveaux champs d’applications pour la résolution temporelle de phénomènes très brefs [10–15]. Ainsi en alliant les propriétés spatiale, spectrale et temporelle des interactions non linéaires, des dispositifs d’imagerie ultra rapide et d’imagerie résolue dans le temps ont été proposés pour diverses applications. Mais, les propriétés les plus étonnantes et remarquables de l’optique non linéaire sont d’ordre quantiques. En effet, le phénomène de génération spontanée de lumière par conversion basse de fréquences dans un milieu quadratique, communément appelé fluorescence paramétrique, s’explique uniquement par un formalisme quantique [16, 17]. Par ailleurs, les travaux théoriques de Caves et al [18–20] explorent les propriétés quantiques de l’amplification paramétrique optique (APO). Ils sont suivis d’autres études théoriques étudiant plus en détail ces propriétés. Du point de vue spatial, les premiers travaux théoriques des états non classiques de la lumière sont à l’actif de Sokolov et Kolobov, synthétisés dans la référence [21]. C’est dans la continuité de ces travaux théoriques que s’inscrit la deuxième partie de ce manuscrit de thèse. Tout d’abord, cette deuxième partie s’appuie entièrement sur les notions et les résultats de la première partie, tant pour le formalisme théorique que pour la détection de distributions spatiales du nombre de photons dans les images
Rappels sur l’amplification paramétrique
La propagation des ondes lumineuses dans le vide ou dans un milieu matériel telle qu’elle est décrite par les équations de Maxwell est en général linéaire. Toutefois lorsque les champs électromagnétiques deviennent intenses, l’interaction des champs avec la matière engendre à son tour des ondes qui en se couplant avec les champs incidents vont engendrer un ensemble de phénomènes remarquables tels que la génération d’harmoniques, le mélange d’ondes ou la bistabilité optique [16, 22]. Un certain nombre d’effets non linéaires sont liés aux susceptibilités non linéaires des matériaux qui engendrent une polarisation non linéaire du milieu matériel. La polarisation totale du milieu s’écrit alors [16] : P = ε0(χ(1)E + χ(2)EE + χ(3)EEE + …) (4.1) O`u ε0 est la permittivité du vide, χ(1) la susceptibilité linéaire du milieu, χ(j) la susceptibilité non linéaire d’ordre j et E le champ électrique classique de l’onde électromagnétique. Dans les milieux cristallins anisotropes, la polarisation non linéaire d’ordre deux est souvent prépondérante. Aussi lorsque deux ondes lumineuses de fréquences ω1 et ω2 se propagent dans un tel milieu, elles induisent une polarisation non linéaire aux fréquences ω1 − ω2 et ω1 + ω2. Cette polarisation non linéaire donne à son tour naissance à une troisième onde de fréquence ω3 = ω1 − ω2 et ω3 = ω1 + ω2. Les conditions d’accord de phase permettent de favoriser une des deux polarisations. Ainsi trois ondes vont se trouver couplées entre elles par un système d’équations issues de la résolution de l’équation de propagation pour chacune de ces ondes. Dans le premier cas (ω1−ω2) on parlera de génération par différence de fréquences et dans l’autre cas (ω1 +ω2) de génération par somme de fréquences 1. Désormais, notre propos se limitera uniquement à la différence de fréquences. Pour ce processus de mélange à trois ondes faisant intervenir la non linéarité quadratique d’un matériau, la polarisation non linéaire pour la différence de fréquences est usuellement notée pour sa composante i: [P(ω3) NL (z,t)]i = 2ε0dijkEω1 j (z)Eω2∗ k (z)ei[(ω1−ω2)t−(k1−k2).z] + c.c. (4.2) Ici, les ondes sont supposées se propager selon un axe z. Les indices i, j et k sont relatifs aux variables x et y de l’espace transverse à la propagation et décrivent la direction de polarisation des différentes ondes. dijk = 1 2χ(2) ijk représente les éléments du tenseur d’ordre trois qui caractérise la non linéarité du milieu et qui dépend du groupe de symétrie auquel appartient celui-ci. kl avec l ∈ {1,2,3} est le module du vecteur d’onde de l’onde à la fréquence ωl tel que k2 l = µ0εlω2 l . La résolution des équations de propagation nous donne alors pour chacune des ondes : dEω1 i dz = −iω1 µ0 ε1 dijkEω2∗ j Eω3 k e−i∆kz (4.3a) dEω2∗ j dz = +iω2 µ0 ε2 djikEω1 i Eω3∗ k ei∆kz (4.3b) dEω3 k dz = −iω3 µ0 ε3 dkijEω1 i Eω2 j ei∆kz (4.3c) O`u les indices sont tels que (i, j, k) ∈ {x,y} et ∆k représente le désaccord de phase entre les ondes en interaction. Ici, nous faisons l’hypothèse que le milieu est parfaitement transparent pour les fréquences considérées et que les ondes se propagent colinéairement dans le milieu. Pour simplifier les écritures, nous allons réexprimer le système 4.3 à l’aide des amplitudes Al des champs électriques classiques El, telles que : Al,α = nl ωl El,α (4.4) O`u l ∈ {1, 2, 3} et α = (i, j, ou k) ∈ {x,y}. Ensuite, pour les milieux sans pertes, on utilise la règle de Kleinman : tous les coefficients du tenseur susceptibilité dijk qui résulte de la permutation des indices sont égaux (dijk = djik = dkij ). Enfin, en réalisant les conditions d’accord de phase à l’aide des propriétés de biréfringence des cristaux, on détermine le coefficient non linéaire effectif def f dépendant de la direction de propagation θ par rapport à l’axe optique, mais aussi de l’orientation de la propagation dans le plan perpendiculaire à l’axe optique repérée par l’angle φ.