Ambohipo et les collines environnantes du XVIème au XIXème siècle

ANKATSO, AMBOHIDEPONA, SITES PERCHES

D’après le Tantara ny Andriana, Ankatso et Ambohidepona appartiennent à la période Vazimba. Il s’agit de deux sites perchés remarquables, parallèles à celui sur lequel est installé Antananarivo. Les accès sont difficiles, dominant de leurs hauteurs le reste de la région, c’est-à-dire des monticules, des étangs et des marais. Ces sites sont situés sur des pitons inexpugnables qui se distinguent par leurs statures. Les tout premiers habitants de la région les ont sans nul doute choisis pour leurs qualités stratégiques et leurs positions ; l’on s’y sent en sécurité, et l’on peut y voir au loin. Les terres non encore épuisées par une longue occupation humaine, devaient offrir des ressources naturelles bien plus considérables qu’aujourd’hui.
Une topographie accidentée : La topographie de la région est comparable à celle qu’on rencontre sur la plus grande partie des Hautes Terres. D’une manière générale, elle offre à la vue des moutonnements de collines parfois très accidentées et rocheuses, parfois bouleversées sur les sommets par des boules rocheuses, comme à Ankatso, ou encore par des filons de quartzites comme à Ambohidepona. Les bas fonds sont des dépressions marécageuses et lacustres qui contournent les collines d’une manière irrégulière. Ici, on a des altitudes moyennes, variant entre 1352 et 1382 m et s’élevant dans la partie orientale, avec des pentes abruptes et de très fréquents affleurements rocheux. On peut dire que la région d’Ankatso et d’Ambohidepona constitue la première cible d’installation des Vazimba, par sa position topographique surélevée, permettant d’assurer la sécurité.

LA COMPLEXITE DES BASSES TERRES

Le type de milieu le plus répandu à l’origine sur les basses terres était celui des marais et des étangs, en grosse partie occupés par une végétation formée de zozoro (joncs, cypéracées), et des herana (Eleocharis). Cette végétation, était encore visible sur de larges étendues à une époque récente (années 1970 et 1980), et on n’en rencontre de nos jours que des éléments résiduels en certains lieux. Les zones situées en bas de pente, au pied des tanety ou des plateaux, sont beaucoup plus épaisses, mieux alimentées en eau, et plus riches notamment en matières organiques. Elles se prêtent ainsi à la culture maraîchère et fruitière, mais leur extension est assez limitée. Jadis, les habitants d’Ambohipo et d’Ampahateza rencontraient beaucoup de difficultés pour entretenir leurs lopins de terre et leurs rizières. Les sols des tanety sont plus ou moins rentables pour les petits agriculteurs et peuvent en tirer des revenus suffisants pour chaque famille. Par contre, les sols de la plaine sont alluvionnaires ou colluvionnaires, et présentent une bonne aptitude à la riziculture à condition d’être correctement assainis et drainés. A partir des années 1970 – 1980, la plupart des zones des basses terres étaient envahies par des zozoro et des herana, qui s’étalaient par exemple entre Ambolokandrina et Andranovory, nécessitaient à la fois un travail long et pénible, pour être aménagés en rizières.

LES SITES VAZIMBA, LIEUX DE CULTES TRADITIONNELS

En Imerina, toutes les anciennes nécropoles, toutes sortes de sources, de tombeaux, de vestiges anciens, que ce soit des stèles, des pierres, des monuments historiques, étaient traditionnellement des lieux de cultes ancestraux. C’étaient des lieux magiques où avaient siégé les esprits des ancêtres d’après les croyances des hommes d’autrefois. Les Malgaches étaient par la suite convaincus que les ancêtres devenus sacrés après leurs morts, étaient des intermédiaires entre l’homme et le Andriamanitra tsy hita maso ou Dieu invisible () ; et pouvaient se communiquer avec les vivants, par le biais des prières et à travers les sacrifices et les offrandes pour mettre en relief la divinité des lieux où habitaient les ancêtres autrefois. A Madagascar, à l’époque des royautés, les lieux ou les terres des ancêtres apparaissaient sacrés et dans beaucoup de régions on pratique encore des conversations auprès des tombeaux, et des sources utilisées antérieurement par les ancêtres, croyant que leurs âmes y sonnt.. En dépit de l’entrée du christianisme, la persistance de ces cultes traditionnels reste encore immuable dans le temps et dans l’espace actuellement ; mais elle apparaît sous une autre forme dans des endroits appelés « Doany », considérés comme des sièges des esprits ancestraux doté de pouvoir magique et de plus, thérapeutiques, guérisseurs de différentes maladies. Aujourd’hui, toutes les nécropoles Vazimba d’Antampon’ Ankatso et d’Antsobolo jouent encore ces rôles primitifs de lieux de cultes traditionnels. De nombreuses personnes venant des zones périphériques s’ y rendent fréquemment ; pour faire du pèlerinage et demander plus particulièrement de secours, de l’aide, de santé et de prospérité dans leurs vies quotidiennes et dans leurs préoccupations habituelles .En effet, malgré le développement de la religion chretienne, les anciennes nécropoles et les monuments historiques ancestraux montrent l’aspect de la véritable culture authentique malgache.

LES DONNEES DE L’ARCHEOLOGIE

Dans le cadre d’une documentation historique, l’intervention de l’archéologie est parmi les moyens permettant de reconstituer les données anciennes de tel ou tel site d’occupation humaine. L’archéologie avec ses études et techniques très élaborées et efficaces, peut secourir d’une manière scientifique les traditions orales à travers les résultats de fouilles, en présentant des preuves irréfutables d’une existence remontant à un temps fabuleux. Actuellement, pour bien connaître l’histoire de Madagascar, beaucoup de recherches archéologiques ont été déjà faites par des archéologues tels que Pierre Verin, René Battistini, Jean François Lebras, Adrien Mille, Ramilisonina, Rafolo Andrianaivoarivony et David Ramel. Les études ont été effectuées dans le but d’exploiter l’installation primitive du premier peuplement de l’île ainsi que le choix d’un site offrant un abri commode pour les vazimb, les premiers occupants d’Analamanga et ses environs avant la formation du Royaume Hova.
L’archéologie au secours de la tradition : Les collines d’Ankatso et d’Ambohidepona, offrent des vestiges importants, terrasses, murettes de pierres, surfaces aplanies et bien bordées au sommet ayant sans doute porté des maisons dont il ne subsiste plus rien, des tessons de poteries, des ossements de zébu et surtout des sépultures de différentes formes. Les résultats de recherches archéologiques d’Ankatso, et d’Ambohidepona témoignent d’une existence ancienne rapportée par la tradition orale, et mettent en exergue l’évolution du genre de vie ou de la culture malgache depuis l’époque vazimba jusqu’à nos jours.

Table des matières

INTRODUCTION 
CHAPITRE I : UN MONDE DE COLLINES ET DE MARAIS CHARGES D’HISTOIRE 
1- ANKATSO, AMBOHIDEPONA, SITES PERCHES 
A- Une topographie accidentée
B- Une position naturelle privilégiée
2- AMBOHIPO, COLLINE A PART
A. Une situation géographique favorable
B- Bassins versants destinés aux cultures sèches
3- LA COMPLEXITE DES BASSES TERRES 
A- Une zone marécageuse à conquérir
B- Avantages et risques d’une rivière
CHAPITRE II PLAINES ET MARAIS : TOPOGRAPHIE ET IMPLANTATION HUMAINE 
1- ECOLOGIE DES MARAIS
A- Des ressources naturelles, fondements du Royaume
B- Des ressources variées
C- Plantes utiles, à la base d’un savoir-faire ancien
D- Des rizières aux formations végétales anthropiques
2-Les plaines et marais : ressources naturelles et enjeux socio-politiques
A- Plaines et marais : base des besoins alimentaires
B- Frontières naturelles et remparts contre les ennemis
CHAPITRE III « ESPACES TANETY » ET « TERRES BASSES » : UN POTENTIEL CONTRASTE 
1- PAUVRETE DES «ESPACES TANETY » 
A- Sols pauvres, pâturages et parcs royaux
B- Des plaines aux sols médiocres et ingrats
C-La Conquête progressive des terres basses
Conclusion de la première partie 
DEUXIEME PARTIE : « UNE VIEILLE TERRE VAZIMBA » 
INTRODUCTION 
CHAPITRE IV : LES FORMES PRIMITIVES D’OCCUPATION HUMAINE 
I- Les sites d’habitat primitif 
A- Les sites d’Ankatso et d’Antsobolo
B- Les sites d’Ambohidepona et du Campus
2-Les traditions et mythes anciens 
A- La tradition du Tantara ny Andriana
B- La tradition villageoise
C- Les témoignages visibles
CHAPITRE V : LES SITES VAZIMBA, LIEUX DE CULTES TRADITIONNELS 
1- Les sites aujourd’hui 
A- Le territoire d’Andrianankatso haut lieu de cultes traditionnels
B- Les sources vazimba d’Ankatso
C- Les sources sacrées célèbres d’Antsobolo
2- Une resacralisation des lieux du passé 
A- Une tentative de récupération des cultes traditionnels
B- Une continuité de l’histoire
3-Les lieux vazimba comme enjeux 
A- Ankatso- Antsobolo, carrefour des différentes religions
B- Le développement de l’infrastructure urbaine
CHAPITRE VI : LES DONNEES DE L’ARCHEOLOGIE 
1- L’archéologie au secours de la tradition 
A – L’archéologie, une preuve irréfutable d’un passé
B – L’apport des vestiges trouvés
2-L’archéologie, témoin d’une évolution culturelle
A- L’évolution de l’espace habitable
B –L’évolution de l’architecture funéraire
Conclusion de la deuxième partie 
TROISIEMEPARTIE « AMBOHIPO ET SA REGION DANS L’ESPACE ET L’HISTOIRE MERINA
AU XIXEME SIECLE »
INTRODUCTION 
CHAPITRE VII : LA TRANSITION VERS L’HISTOIRE MERINA 
1-Nampoina fonde Ambohiponimerina
A- Ambohiponimerina, une villégiature royale
B-Ambohiponimerina, siège du palais Miandrivola
2- Les « Taureaux »de Nampoina à Ambohipo 
A – Ambohipo, lieu de garde des bœufs volavita du Nampoina
B –Combat de taureaux : divertissement royal
3- Le triangle Andohaniato- Ampahateza- Ambohipo : terre héritage des Tsiarondahy 
A – Les Tsiarondahy : serfs royaux
B – Ambohipo et ses environs, un héritage des Tsiarondahy
CHAPITRE VIII : LE TRIANGLE AMBOHIPO- ANKATSO AMBOHIDEPONA COMME ENJEU DE
COMPETITION INTERCONFESSIONNELLE
1- Ambohipo, cible du protestantisme 
A – Ambohipo et la mission protestante
B – Le protestantisme, une religion des « andevo »
C- Le protestantisme, une religion en perte de vitesse vers la fin du XIXème siècle
2- Ouverture d’ une autre religion : le catholicisme à Ampahateza- Ambohipo
A – Une forte présence du catholicisme à Ampahateza-Ambohipo
B- Le catholicisme, une mission de « prêtrise » et d’éducation
Photo N°9 : Le Petit Séminaire d’Ambohipo (Ancienne Ecole normale d’Ambohipo)  (Cliché de l’auteur)
3- Problèmes et litiges permanents entre les deux missions 
A – Hostilité de Rainimaharavo
B –Déclaration du protestantisme comme religion d’Etat
CHAPITRE IX : AMBOHIPO VERS LA FIN DU XIXEME SIECLE ET AU DEBUT DU XXEME
SIECLE, UN NO MAN’S LAND
1-Ambohipo, territoire des voromahery
A –La perte du privilège de  » territoire des voromahery  »
B – Abandon de l’héritage royal
2-L’histoire d’un « rova oublié »
A Le« rova »un lieu de passage
B- B-Une villégiature royale abandonnée
Conclusion de la troisième partie
CONCLUSION GENERALE 
BIBLIOGRAPHIE 

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