Les bifidobactéries
Historique et taxonomie
Les bactéries appartenant au genre Bifidobacterium, ont été décrites pour la première fois par Tessier (1900) qui a isolé à partir de fèces d’un enfant allaité au sein, une bactérie anaérobie de morphologie bifide qu’il appela Bacillus bifidus communis. Au même moment, en Italie, Moro découvrait des bactéries semblables qu’il a identifiées comme des Lactobacillus (Ballongue, 1993).
Depuis leur première description, les bifidobactéries ont été assignées à divers genre passant du genre Bacillus, à celui de Bacteroïdes (Castellani et Chalmers, 1919), Lactobacillus (Holland, 1920), Bifidobacterium (Orla-Jensen, 1924), Bacterium (Lehmann et Neumann, 1927), Tissieria (Pribram, 1929), Nocardia (Vuillemin, 1931), Actimocyces (Nannizzi, 1934), Actinobacterium (Puntoni, 1937) et Corynebacterium (Olsen, 1949).
En raison des similitudes entre les bifidobactéries et les bactéries du genre Lactobacillus, ils ont été inclus dans ce genre comme classifier dans la 7e édition du Bergey’s Manual of Systematic Bacteriology (Breed et al., 1957). Après 1965, suite à l’apparition des nouvelles technologies génétiques, deux équipes de recherche (Sebald et al., 1965;Werner et al., 1966) ont démontré, grâce au pourcentage G+C, que les bifidobactéries étaient différentes des lactobacilles, des corynébactéries ainsi que des propionibactéries. Ces équipes ont démontré que le pourcentage de G+C était de 60,1% pour les bifidobactéries alors qu’il était de 67,6% pour les propionibactéries, de 54,7% pour les corynébactéries et se situait entre 33 et 49% pour les lactobacilles. Les études effectuées par Scardovi et Trovatelli, (1965) et De Vries et al., (1967) ont mené à la découverte d’une nouvelle voie de fermentation des hexoses chez les bifidobactéries, qui ne se trouve pas dans aucune des espèces du genre Lactobacillus. L’enzyme principale de cette voie est une fructose-6- phosphate phosphocétolase qui clive le fructose-6-phosphate en érythrose-4 phosphate et en acétyle phosphate. C’est seulement après cette découverte que le genre est séparé des lactobacilles. En 1971, Scardovi et al., ont entrepris à appliquer largement le procédé d’hybridation ADN-ADN afin d’évaluer la validité des espèces de bifidobactéries précédemment décrites et de reconnaître de nouveaux groupes de séquences d’ADN homologique parmi les souches qui ont été isolaient à partir de diverses niches écologiques. Cette technique d’identification a aidé à résoudre une grande partie de la confusion précédemment rencontrée en matière de la différenciation entre espèces de Bifidobacterium qui a été faite principalement sur les tests phénotypiques de fermentation des carbohydrates.
Les caractérisations physiologiques et biochimiques telles les constituants de la paroi cellulaire, la morphologie et le contenu (%) en guanine-cytosine de leur ADN ont démontré clairement que les bifidabactéries appartenaient à un genre distinct (Mitsuoka, 1982).Dans la 9e édition du Bergey’s Manual of Systematic Bacteriology (Scardovi, 1986), les bifidobactéries sont reconnues comme des membres de la famille des Actinomycetaceae. Selon ce manuel, le genre Bifidobacterium est composé de 29 espèces différentes, dont 14 seraient d’origine humaine, 12 d’origine animale à sang chaud et 3 proviendraient d’abeille.
Stackebrand et al., (1997), par l’analyse de RNAr 16S, ont proposé une nouvelle structure hiérarchique rassemblant le genre Bifidobacterium avec le genre Gardnerella dans une seule famille de Bifidobacteriaceae dans l’ordre de Bifidobacteriales.
L’enzyme clé, considérée comme un caractère taxinomique pour ce groupe des bactéries est la fructose-6-phosphocétolase (EC 4.1.2.2) (Felis et al., 2009). Avant la reclassification de certaines espèces de Bifidobacterium dans des nouveaux genres, cette enzymes fut considérée en tant que caractère taxinomique pour l’identification du genre, néanmoins, à présent il est considérée comme un identifiant taxinomique pour la famille des Bifidobacteriaceae (Russell et al., 2011).
Selon Pokusaeva et al., (2011) trente neufs (39) espèces ont été assigner au genre Bifidobacterium (Tableau 02). En outre, il semble que beaucoup de bifidobactéries sont encore à être découvrir tel que suggérer par plusieurs études métagénomique.
Les bifidobactéries, micro-organismes du microbiote intestinal
Description générale de l’écosystème gastro-intestinal
Le tractus gastro-intestinal est un écosystème complexe et ouvert aux microorganismes exogènes. De par sa surface totale (muqueuse) estimée à 200-300 m2 , il représente la plus grande surface du corps en contact avec l’environnement (Holzapfel et al., 1998). L’écosystème gastro-intestinal est généré par une alliance stable entre l’épithélium gastro-intestinal, le système immunitaire et une importante flore microbienne. Ces trois composants sont continuellement liés entre eux et évoluent ensemble en assurant une fonction et une activité normales de l’écosystème. Si l’un des trois composants de l’écosystème est défaillant, l’alliance est altérée et par conséquent diverses pathologies s’y installent (Mc-Cracken et Lorenz, 2001).
Les interactions entre les microorganismes et l’hôte peuvent être de trois types : symbiose, commensalisme et pathogénicité (Hooper et Gordon, 2001). L’hôte est protégé contre la microflore intestinale pathogène par les barrières chimiques et physiques formées par l’épithélium gastrointestinal (Kagnoff et Eckmann, 1997).
La situation des bifidobactéries dans cet écosystème complexe
La connaissance de la composition et la compréhension de la succession de l’écologie du microbiote intestinal sont nécessaires pour saisir l’importance des bifidobactéries. Le genre Bifidobacterium est présent dans le tractus intestinal de la naissance à la mort de l’humain, mais les espèces et leur proportion varient selon l’âge (Gueimonde et al., 2004; Matsuki et al., 2004; Matsuki et al.,1999).
La proportion de Bifidobacterium en rapport à la population totale du microbiote est très faible ou inexistante chez l’adulte lors des études ciblant par amplification PCR l’ADNr 16S total avec des amorces universelles (Eckburg et al., 2005 ; Palmer et al., 2007 ; Suau et al., 1999; Wang et al.,2003). Par contre, le genre Bifidobacterium a été mis en évidence chez presque tous les volontaires adultes lors de deux études ciblant spécifiquement la détection des bifidobactéries par PCR conventionnelle ou en temps réel (Q-PCR) (Matsuki et al., 2004; Matsuki et al.,1999). Les trois espèces prédominantes chez les adultes sont B. catenulatum, B. longum et adolescentis, mais des espèces généralement associées aux enfants ont également été détectées (B. infantis et B. brève) .
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