De la place de l’activité caféière au sein d’un univers agricole hétérogène et fragmenté
Avant même d’aborder les stratégies de valorisation adoptées par les acteurs de la filière café au Pérou, il convient de s’intéresser aux déterminants de la compétitivité agricole au Pérou. Il faut considérer la compétitivité des activités agricoles sous un double angle d’étude : ce qui rend l’agriculture rentable par rapport aux autres activités économiques (c’est-à-dire ce qui incitera les individus à consacrer leur capital et leur force de travail aux activités agricoles plutôt qu’à d’autres secteurs) et ce qui est à l’origine de la performance de certaines activités agricoles plutôt que certaines autres (par exemple, dans le cas péruvien, pourquoi les acteurs de la filière asperge au Pérou paraissent plus compétitifs que la majorité des acteurs de la filière pomme de terre). Il nous semble que deux éléments sont à prendre en compte pour tenter de déterminer les fondements de la compétitivité des activités agricoles au Pérou : l’impact des modèles macroéconomiques et l’extrême hétérogénéité de l’univers agricole au Pérou.
En effet, les modèles macroéconomiques ont toujours eu une influence tangible sur le développement des activités agricoles au Pérou. Enfin, l’étude de l’hétérogénéité des agricultures au Pérou permet de saisir que l’accès au crédit, le modèle institutionnel ou encore l’approche de la qualité sont autant de déterminants de la compétitivité des activités agricoles au Pérou. Au sein de cette agriculture fragmentée, l’activité caféière fait figure d’activité iconoclaste. Que ce soit au niveau historique, géographique ou économique, l’apport de l’activité caféière fut particulièrement original et suffirait à lui seul à justifier une étude sur la filière café. Un regard un peu plus précis sur ce dernier permet de distinguer deux sous filières aux caractéristiques singulières. I) L’évolution des modèles macroéconomiques et leur impact sur le développement agricole l’adoption de modèles macroéconomiques spécifiques. Il s’agit là d’un déterminant indirect, extérieur à la sphère agricole, mais ayant un impact particulièrement marqué sur les performances des activités agraires.
Tenter de déterminer la corrélation entre modèles macroéconomiques et compétitivités de l’agriculture au Pérou implique de procéder à une étude historique permettant de constater les phases de développement économique et de développement agricoles. Nous savons que ce genre d’étude est pour le moins complexe. « L’identification de périodes est délicate, car la notion de stabilité d’une agriculture est toute relative. Cette opération dépend du degré de finesse que l’on souhaite et que l’on peut atteindre. (…). Poussé à l’extrême, le découpage en périodes pourrait être infini. (…). Les périodes de recomposition sont des moments charnières où des formes d’exploitation régressent et d’autres émergent, où des mouvements sociaux importants s’opèrent.
Dans l’histoire, il est important de faire la part entre les moments où les signes précurseurs d’une transformation apparaissent (par exemple, telle nouvelle variété est introduite, telle innovation est adoptée par des paysans pilotes) et le moment où le changement se généralise. Enfin, il faut être très prudent quand on se risque à expliquer le changement et donc à établir les relations de cause à effet. Fréquemment, des explications simples, mono-causales, sont avancées pour expliquer, par exemple, la disparition d’une culture. (…). C’est donc chaque fois un ensemble d’éléments de nature économique, technique et sociale qu’il faut mettre en perspective. » (Ferraton, Touzard, pp.24-25).
Il est évident qu’une étude historique sur l’agriculture péruvienne est un exercice particulièrement difficile, dont les résultats prêteront sans aucun doute à contestations. Cependant, notre objectif n’est nullement de saisir le développement de chaque activité agricole au Pérou que de déterminer l’influence des politiques macroéconomiques sur les différents types d’agriculture au Pérou. A travers une succincte histoire économique et agricole il devrait néanmoins être possible de mettre en avant une corrélation entre politique économique nationale et développement agricole. La périodisation adoptée correspondra aux grandes ruptures d’orientation des politiques de développement économique. 1.1) Histoire économique du Pérou ou la faible évolution des modèles macroéconomiques..