Accumulation du capital, progrès technique et croissance
Aujourd’hui, quelque chose d’extraordinaire est en train de se produire dans le monde développé. Pour la première fois dans l’Histoire, les sociétés sont confrontées à des problèmes non plus de pénurie, mais de surabondance. Nous vivons dans une économie d’excédents où presque tous les secteurs d’activité, anciens et nouveaux, souffrent de surcapacité. Il y a tant de voitures en circulation qu’il n’y a presque plus d’espace pour les conduire. Nous avons tant à manger que nous connaissons une épidémie d’obésité. Il y a tant de choses à acheter, à voir et à faire que nous ne trouvons pas le temps d’en profiter. Trop de tout ? (…) Si le récent boom économique a considérablement accru le niveau global de prospérité, il ne s’est pas accompagné d’un sentiment accru de bien-être. De fait, les « enquêtes sur le bonheur » menées aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et en Europe continentale montrent que le niveau de bonheur est resté au mieux stationnaire et qu’il a parfois décliné au cours des trente dernières années. (…)Quelles en sont les implications ? Depuis un demi-siècle au moins, les Etats ont utilisé le produit intérieur brut (PIB) comme indicateur de bien-être. Mais, s’il n’y a plus de corrélation entre le PIB et le bonheur, cela remet en cause l’un des objectifs clés des politiques publiques, qui est de maintenir le PIB sur une trajectoire ascendante.
Le problème de l’utilisation du PIB comme indicateur du bien-être, c’est qu’il ne mesure que des éléments auxquels on peut donner une valeur monétaire. En conséquence, il ne rend pas compte des choses qui prennent de l’importance pour les gens une fois que leurs besoins élémentaires ont été satisfaits. Ainsi, le temps est devenu si précieux pour beaucoup d’entre nous qu’on le surnomme « la nouvelle monnaie », et pourtant le PIB ne le prend pas en considération. Pis encore, le PIB compte souvent comme des gains des choses qui rendent en fait les gens plus malheureux. Lorsque la criminalité augmente, l’accroissement des dépenses en systèmes de surveillance, alarmes antivol, armes à feu et bombes anti-agression contribue à la croissance du PIB. Mais les gens sont moins heureux parce qu’ils se sentent moins en sécurité. L’augmentation du taux de divorce fait aussi progresser le PIB parce qu’elle se traduit par des dépenses accrues en frais d’avocat, en aide psychologique, en logement.Une course de vitesse est engagée à l’échelle planétaire pour préserver un bien commun universel : les millions de kilomètres carrés de forêts qui contribuent à l’équilibre de la nature et du climat. Au rythme actuel, plus de 140 000 km2 de forêts sont détruits chaque année, soit à peu près la superficie de la Grèce. Mercredi 25 mai, à New York, lors de la 5e édition du Forum sur les forêts des Nations unies (UNFF), la Banque mondiale et le World Wildlife Fund (WWF) réunis au sein de l’Alliance pour la forêt (Forest Alliance) ont à nouveau tiré la sonnette d’alarme.
« Les forêts à haute valeur écologique et économique comme les forêts boréales de l’extrême orient russe, celles des basses terres de Sumatra, les forêts tropicales d’Amazonie et du Congo sont en train de disparaître sous l’effet d’abattages sauvages et des coupes illégales ou peu réglementés ainsi que du défrichage agricole », affirme le directeur général du WWF, Claude Martin. Les chiffres sont là : 280 000 m2 de forêts disparaissent chaque minute. La mise en garde lancée à New York par la Banque mondiale et le WWF rappelle à la communauté internationale qu’il faut agir vite. La préservation de l’environnement, et donc de la forêt, est un des huit objectifs du Millénaire, lancé en 2000 par les Nations unies »Un certain nombre de facteurs expliquent pourquoi la protection de l’environnement s’accroît avec la prospérité et le niveau de développement. Il est difficile de donner la priorité à un environnement sain lorsqu’on sait à peine comment on va se procurer son prochain repas. La lutte pour atténuer la misère et la faim passe avant la conservation de la nature. C’est seulement lorsque notre niveau de vie augmente que nous commençons à accorder de l’importance à l’environne ment et aux moyens de l’améliorer. L’Europe est passée par cette étape, et les pays en développement y sont aujourd’hui. Pour y arriver, les gens doivent pouvoir s’exprimer et mobiliser l’opinion publique dans un contexte démocratique, sinon leurs préférences ne pourront se concrétiser dans la réalité. Le saccage de l’environnement est pire sous les dictatures, mais c’est la prospérité et la mentalité des habitants qui font qu’il est plus facile de protéger l’environnement dans une société riche. Un pays riche a les moyens de s’attaquer aux problèmes écologiques; il peut développer des techniques qui aident à réduire la pollution – des filtres non pollueurs ou des méthodes de traitement des eaux usées, par exemple – et nettoyer les dégâts déjà faits. (…)