Les entretiens individuels semi-dirigés croisés
L’entretien individuel semi-dirigé comme méthode de collecte de données Le mode de collecte de données utilisé a été celui des entretiens individuels semi-dirigés. Il permet d’accéder à deux niveaux de connaissance chez les participants : les pratiques et les représentations (Boutin, 1997 ; Kaufmann 2007).
Il était primordial d’accéder non seulement aux actions et aux comportements concrets des participants, mais aussi, à leurs attitudes, à leurs perceptions ainsi qu’au point de vue subjectif et particulier des participants sur la relation intergénérationnelle et sur les rôles qui sont attribués à chacun.
Par ailleurs, lorsqu’il est question d’avoir accès à certains renseignements concernant des situations ou des événements passés, comme la transition à la parentalité et à la grand-parentalité, l’entretien constitue la méthode la plus efficace pour recueillir rétrospectivement de l’information détaillée et approfondie (Giordano, 2003).
Cette méthode permet aussi de cadrer et d’orienter la rencontre afin que chacune des dimensions de la solidarité familiale intergénérationnelle soit abordée, tout en laissant une certaine liberté aux participants dans l’enchaînement de leurs idées et du récit dont ils font part. Cette méthode permet également aux participants d’exprimer leurs interprétations personnelles par l’entremise de questions ouvertes et plus générales.
Puisqu’un entretien rétrospectif fait appel à la mémoire, le discours des participants est nécessairement « soumis aux mécanismes de sélection, d’omission et de condensation des faits et des événements biographiques dans le processus narratif » (Gherghel, 2013, p.58-59). À chaque événement ou expérience vécue par un individu se superposent des « schèmes » de perception et d’interprétation lorsqu’ils sont mémorisés; le discours qu’il porte sur ceux-ci est donc nécessairement altéré (Bertaux, 2005, p.39).
Mais « qu’il y entre une large part de sélection et d’interprétation, sans laquelle il n’y aurait que successions de faits sans articulations, cela est indéniable et inévitable : sinon il n’y aurait pas de récit » (Ibid., p.77).
Les « schèmes » de perception et d’interprétation ne sont donc pas perçus ici comme des biais de cette méthode de collecte des données que l’on doit tenter de refouler, mais plutôt comme des pistes de réflexion qui donnent accès à un discours réflexif du participant sur ses expériences passées, et sur la manière dont ce discours réflexif peut orienter ses pratiques et intégrer ses représentations actuelles.
Les entretiens croisés
Afin d’interroger la solidarité familiale intergénérationnelle en transition et le rôle grand-parental d’un point de vue relationnel, il était pertinent d’utiliser la méthode des « regards croisés », c’est-à-dire de réaliser un croisement des discours d’au moins deux personnes ayant vécu des situations communes, mais avec une perspective différente (Gherghel, 2013 ; Giordano, 2003).
Cette méthode est particulièrement pertinente dans les études portant sur les relations familiales, car les parcours biographiques des individus d’une même famille sont souvent interreliés et s’interinfluencent. Les entretiens croisés sont d’autant plus appropriés lorsqu’il est question de relater comment ont été vécues, d’un point de vue relationnel, les différentes transitions du parcours biographique (Gherghel, 2013).
La méthode des « regards croisés » utilisée ici est inspirée entre autres des travaux d’Attias-Donfut et al. (2002) et de T. Godbout et al. (1996). Ces travaux nous ont permis de réaliser que cette méthode était tout à fait indispensable pour répondre aux objectifs de recherche, surtout le second objectif qui visait à comprendre comment le rôle grand-parental et les différentes manifestations de la solidarité familiale intergénérationnelle sont perçus et vécus par chacun.
Les discours recueillis par l’entremise des entretiens croisés de parents et de grands-parents, en donnant accès à des perspectives différentes sur de mêmes événements, ont permis de comparer, et parfois de confronter, les perceptions de chacun.