Des contraintes et des spécificités naturelles
Outre la particularité de l’insularité, les DROM intègrent des spécificités en termes de superficie pouvant être contraignantes. D’une superficie totale de 376 km² pour Mayotte jusqu’à 2 512 km² pour la Réunion, ces territoires ne représentent qu’une fine partie du territoire national. La Guadeloupe, avec ces 1 629 km², représente un peu moins de 0,3 % du territoire national84. La Guyane, avec 83 846 km², se rapproche de la superficie du Portugal (92 900 km²). Elle est le plus étendu des départements français et la forêt équatoriale dense occupe 98 % de son territoire.
Par ailleurs, leur situation géographique impose également des contraintes climatiques. Une majorité d’îles ou d’archipels se situent en zone tropicale ou subtropicale et sont pour beaucoup d’origine volcanique. Très montagneuses, leur topographie conditionne largement le peuplement et sa localisation sur des plaines côtières ou sur des bandes littorales parfois étroites. Une majorité de la population réside sur un espace parfois réduit. Ils sont de ce fait exposés à des aléas naturels qui fragilisent leur développement. Comme nous le verrons, ces données engendrent des conséquences sur la configuration de la production et de la distribution d’énergies.
Marqués par leur caractère insulaire (hormis la Guyane), les départements et régions d’Outre-mer sont touchés par un isolement géographique, notamment par rapport à la France continentale. Cette caractéristique commune implique d’organiser les relations qu’entretient ces territoires avec la métropole, puisque véritablement intégrés à la souveraineté française.
Des statuts particuliers sous République française
La France d’Outre-mer, désignée par les abréviations DROM/COM signifiant « départements et régions d’Outre-mer » ou « collectivités d’Outre-mer », regroupe l’ensemble des territoires sous souveraineté française hors du continent.
Une diversification croissante des statuts Outre-mer
Dans le texte initial de la Constitution de 1958, deux catégories de collectivités territoriales situées hors du continent étaient prévues : les départements d’Outre-mer (DOM) et les territoires d’Outre-mer (TOM). Mais à partir des années 1970, cette classification va évoluer par une multiplication de statuts particuliers (Mayotte en 1976, Saint-Pierre-et-Miquelon en 1985, Nouvelle-Calédonie depuis 1985, la Polynésie française), en plus de ceux déjà existant.
La réforme du cadre constitutionnel de l’Outre-mer en 2003
La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République comporte d’importantes dispositions concernant les collectivités territoriales situées Outre-mer. L’article 72 de la Constitution redéfinit la classification de l’ensemble des collectivités territoriales, et établit les catégories suivantes :
– « Les départements et les régions d’Outre-mer » (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Mayotte85) et qui fond l’objet de ce mémoire ;
– « Les collectivités d’Outre-mer » (Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna).
Restent à l’écart de cette classification la Nouvelle-Calédonie et les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), qui possèdent chacun des particularités en termes de statut.
Les régimes législatifs pour l’Outre-mer
Aujourd’hui, il existe deux régimes législatifs :
– le régime de l’identité législative (article 73 de la Constitution) : les lois et règlements nationaux sont alors applicables de plein droit en Outre-mer. Pour tenir compte de leurs spécificités, des adaptations sont néanmoins possibles.
– le régime de spécialité législative et d’autonomie (article 74 de la Constitution) : une loi organique définit le statut particulier de chaque collectivité soumise à ce régime. Elle détermine également les lois qui s’y appliquent.
En principe, les cinq départements et régions d’Outre-mer (DROM) relèvent du régime d’identité législative, tandis que les collectivités d’Outre-mer (COM) relèvent du régime de spécialité législative. De plus, les DROM font partie intégrante de l’UE dont ils constituent, avec d’autres entités comme les Açores, les régions dites « ultra périphériques » (RUP). Par ce régime d’identité législative, les DROM sont soumis à la politique énergétique nationale et européenne.
Reflétant une catégorie particulière de collectivités territoriales, les DROM ont connu une évolution législative marquée par une révision constitutionnelle faisant évoluer l’organisation décentralisée de la République française. A ce jour, ils sont concernés par les lois et règlements nationaux, avec des adaptations possibles en fonction des spécificités de ces territoires. La présentation de ces statuts particuliers démontre que ces DROM rentrent pleinement dans la politique énergétique de la France et notamment dans l’objectif d’une croissance économique et sociale.
Une conjoncture socio-économique complexe, liée à la situation énergétique
La situation sociale et économique de ces territoires ultramarins paraît particulièrement difficile, comme l’illustrent la plupart des indicateurs socio-économiques, la dépendance majeure à l’hexagone ainsi que les problématiques de logement. Il parait alors judicieux de soulever ces problématiques, pouvant influencer le développement énergétique des DROM.
Un PIB par habitant moindre et un taux de chômage importants
Le taux de chômage ou encore le PIB par habitant montrent qu’un écart important perdure par rapport à la métropole et les inégalités qui y règnent sont beaucoup plus importantes que sur le reste du territoire national.
« En 2012, les niveaux de richesse par habitant des DOM étaient inférieurs au PIB hexagonal par habitant dans une proportion allant de 31 à 37 % pour la Martinique et la Guadeloupe jusqu’à 79 % pour Mayotte, en passant par 38 % pour La Réunion et 51 % pour la Guyane. […]. Loin derrière, le département de Mayotte enregistrait en 2009 un niveau de richesse par habitant près de cinq fois plus faible que le niveau national. »
Figure 9 : Comparaison des PIB par habitant en euros, en 201287. Réalisation : Mélanie De Azevedo
A ce retard de développement par rapport à l’hexagone s’ajoute un dynamisme de l’emploi contraint par la présence d’un chômage qui ne diminue pas. « Les dernières données d’Eurostat montrent que les quatre départements français d’Outre-mer sont les régions de l’Union européenne qui enregistrent le plus fort taux de chômage88 ».
En 2011, 29,7 % des actifs réunionnais âgés de 15 à 64 ans sont au chômage, ce qui est le taux le plus élevé des DOM. Il est de 22,9 % en Guadeloupe, 21,0 % en Martinique et 21,2 % en Guyane alors que le taux de chômage en France métropolitaine s’élève à 9,3 %. Malgré le dynamisme de l’emploi dans les DROM, la croissance de la population active et la crise économique n’ont fait qu’augmenter le taux de chômage. Par ailleurs, le taux d’activité reste très faible (61 %), inférieur de 9 points à celui de France métropolitaine89. Ces niveaux très importants de chômage sont liés à la situation économique de ces territoires, à leur relatif isolement et à la surreprésentation des jeunes, peu qualifiés, qui peinent à trouver des emplois.