Principes de l’interférométrie stellaire
Résolution angulaire d’un télescope monolithique
Les interféromètres sont des systèmes complexes, délicats, et à la sensibilité relativement limitée. Pourquoi donc construit-on actuellement des interféromètres géants en plusieurs endroits de la planète? La réponse tient en un mot: leur résolution.
Expression théorique
En fait de résolution, il faudrait plutôt parler de pouvoir de résolution angulaire, mais le terme précédent est une abréviation passée dans le langage courant de l’astronome. Le pouvoir de résolution angulaire d’un instrument optique est sa capacité à séparer deux points (on dit aussi résoudre deux points) situés à une faible distance angulaire l’un de l’autre.
L’angle de séparation en dessous duquel les deux points apparaissent confondus est la limite de résolution encore appelée résolution de l’instrument. Elle est souvent exprimée en secondes d’angle (dont l’abréviation est « , et qui vaut 4,848 10-6 radians) pour les télescopes classiques et en millisecondes d’angle pour les interféromètres astronomiques (aussi appelées milliarcsecondes par abus de langage, dont l’abréviation est mas).
On commence à entrevoir dans ce terme tout l’intérêt de l’interférométrie, mais j’y reviendrai un peu plus loin. Une parenthèse pour compliquer un peu les choses, un télescope est d’autant plus résolvant que la valeur numérique de son pouvoir de résolution est basse. Un télescope de 50 centimètres de diamètre, qui a un pouvoir de résolution de 0,3″, est plus résolvant qu’une lunette astronomique de 10 centimètres, de pouvoir de résolution 1,6″ (ces valeurs sont données aux longueurs d’onde visibles).
La résolution théorique d’un instrument est directement proportionnelle au diamètre de son collecteur primaire de lumière. Pour un télescope classique à pupille circulaire de diamètre D, la résolution q exprimée en secondes d’angle est donnée les lois de la diffraction: Ê q =0,25 l Ë Á 1mm ˆ ¯ ˜ Ê Ë Á ˆ 1 m D ¯ ˜ avec l la longueur d’onde d’observation. Pour D = 100 m et l = 0,6 mm par exemple, on obtient une résolution de 1,5 mas, soit 3 mètre à la surface de la Lune… Spectaculaire résultat!
Peut-être bientôt atteint par le projet OWL de télescope de 100 mètres de l’ESO, mais encore très spéculatif. Et si maintenant on veut atteindre une résolution d’un centimètre sur la Lune (ou bien faire une image d’une autre Terre située à environ 20 années lumière) alors on doit simplement construire un télescope de 28 kilomètres de diamètre…
Outre que mécaniquement et optiquement un tel télescope est totalement impossible à réaliser (une focale de plusieurs dizaines de kilomètres…), il ne permettrait jamais, installé au sol, d’atteindre sa résolution théorique. La raison en est simple: la Terre possède une atmosphère (et c’est fort heureux…).
Atmosphère
La traversée de l’atmosphère ne se passe jamais sans quelques incidents pour une onde lumineuse en provenance d’une étoile… Le front d’onde est la surface imaginaire où la phase d’une onde, lumineuse dans notre cas, est constante. Le front d’onde émis par une source ponctuelle est sphérique, mais pour une source stellaire située à une très grande distance, il est extrêmement proche d’un plan.
L’effet destructeur de l’atmosphère sur le front d’onde provient de l’inhomogénéité thermique de l’air. Des bulles d’air plus chaud (et donc moins dense) sont en permanence en mouvement, entraînées par la poussée d’Archimède ou bien brassées dans des vortex de turbulence. Tout irait pourtant bien si l’indice de réfraction de l’air était parfaitement constant.
Mais il ne l’est pas malheureusement, et sa dépendance en fonction de la température est la source de tous les problèmes de résolution à partir des observatoires au sol. Le changement d’indice à l’interface entre une bulle d’air chaud et un milieu environnant d’air froid par exemple produit une variation de phase locale du front d’onde (Figure 1). En termes moins techniques, l’image de l’étoile sera floue pour un télescope d’un diamètre D plus grand que la taille r0 de la bulle.