Pressions et impacts sur les rivières en milieu (péri-) urbain
Cycles et processus biogéochimiques en rivière
Un écosystème aquatique est l’ensemble des êtres vivants (biocénose) qui interagissent entre eux et avec leur environnement (biotope) (CNRS). Ce biotope est composé de différents compartiments comme l’eau, le sédiment, le sol, l’atmosphère, en interaction les uns avec les autres. Il est le siège de nombreuses réactions chimiques, physiques, biologiques et géologiques (Sigg et al., 2014) qui contrôlent la composition des rivières, des lacs et plus largement des océans. Pour ce qui suit, nous nous intéresserons uniquement aux masses d’eaux continentales de surface.
En plus des paramètres physiques (taille, écoulement…), un écosystème aquatique est défini par des paramètres physico-chimiques ou également appelés, paramètres généraux. Ces variables donnent des informations globales, nécessaires pour caractériser la nature de la masse d’eau étudiée : oxygène, température, conductivité, matières en suspension (MES), pH, potentiel d’oxydoréduction (Eh)…
Les variations de ces paramètres peuvent être liées à des processus biologiques (e.g. photosynthèse) et/ou des apports anthropiques. L’évolution de ces paramètres au cours du temps peut être par exemple, saisonnière, hebdomadaire ou journalière. De nombreux auteurs (e.g. Lundquist et Cayan, 2002 ; Manny et Wetzel, 1973 ; Wright et Mills, 1967 ; Odum, 1956) se sont intéressés à la dynamique journalière de ces paramètres qui peut être aussi importante en amplitude que des variations saisonnières ou annuelles (Nimick et al., 2011).
En effet, les cycles biogéochimiques nycthéméraux dans les cours d’eau sont beaucoup étudiés depuis les années 1990 grâce aux innovations technologiques concernant l’échantillonnage (Nimick et al., 2011). Les premiers cycles mis en évidence sont ceux dus à des processus simples comme la photosynthèse et la respiration, qui contrôlent les variations d’oxygène et de pH.
Les principaux cycles biogéochimiques à l’échelle de la journée sont schématisés Figure 1 (Nimick et 5 Chapitre I – Pressions et impacts sur les rivières en milieu (péri-) urbain al., 2011). Ils dépendent de facteurs physiques mais également de processus biologique et chimique, parfois antagonistes, qui seront détaillés dans les parties suivantes. Figure 1. Cycles biogéochimiques simplifiés en milieu aquatique du carbone, de l‘azote, du fer, du manganèse ainsi que d’un métal divalent (ici Zn) et d’un oxo-anion (ici As). Les notations R et P indiquent respectivement les processus de respiration et de photosynthèse (Nimick et al., 2011).
Paramètres physico-chimiques et généraux
Le débit d’une rivière peut connaître des variations au cours de l’année, avec des périodes de hautes-eaux et de basses-eaux, dues à des épisodes pluvieux, généralement plus importants en période hivernale. Des échanges avec la nappe peuvent également se produire. Généralement, la nappe alimente la rivière en période d’étiage, et le cours d’eau alimente la nappe en période de crue.
Pour les rivières qui ne sont pas impactées par la fonte des neiges ce qui est le cas pour notre étude, le débit fluvial peut présenter une augmentation graduelle durant la nuit avec un maximum atteint le matin, et une diminution au cours de la journée (Lundquist et Cayan, 2002). Ces variations sont particulièrement visibles en période d’étiage en été (Nimick et al., 2011) et sont attribuées à l’évapotranspiration des plantes ripariennes (Nimick et al., 2011).
Ces cycles dépendent également des variations de température entre le jour et la nuit (Lundquist et Cayan, 2002 ; Seyhan et al., 1983 ; Erup, 1982 ; Wicht, 1941 ; Troxell, 1936) qui vont influer sur la 6 Chapitre I – Pressions et impacts sur les rivières en milieu (péri-) urbain viscosité par exemple. En effet, l’augmentation de la température va diminuer la viscosité de l’eau et donc favoriser son infiltration à travers la couche hyporhéique (Gammons et al., 2015 ; Gribovski et al., 2010 ; Constantz et al., 1994).
Les variations journalières de la température de l’eau sont principalement dues à la luminosité (Poole and Berman, 2001) et les amplitudes sont d’autant plus grandes en été lors de faibles débits, dans des cours d’eaux peu profonds et peu ombragés (Webb et al., 2008 ; Nimick et al., 2005). Les variations de température vont engendrer des changements vis-à-vis des réactions de solubilité et de sorption, des cinétiques de métabolismes, de la toxicité des contaminants et de la productivité du biote (Nimick et al., 2011).
La concentration en dioxygène dissous varie saisonnièrement avec des teneurs plus importantes au printemps dues à la photosynthèse qui est plus active lors des blooms phytoplanctoniques. La production primaire est assurée par les algues (macro et microscopiques) et les macrophytes, ces dernièrs pouvant avoir un rendement photosynthétique plus efficace (Wetzel, 2001). Lors de la période estivale, la minéralisation de cette masse végétale conduit à de forte diminution de l’oxygénation des eaux (Elbaz-Poulichet et al., 2006).
A l’échelle de la journée, les processus de photosynthèse/respiration ont des conséquences importantes sur la dynamique de l’oxygène dissous et du pH (Gammons et al., 2015). En présence de lumière, la photosynthèse produit du dioxygène et consomme du dioxyde de carbone (CO2), ce qui entraîne une augmentation de la valeur du pH. En conséquence, la photosynthèse s’accompagne d’une nette augmentation d’oxygène dissous dans l’eau avec possibilité de sursaturation (Odum, 1956).