Processus d’infection d’une plante par les champignons mycorhiziens à arbuscules

Processus d’infection d’une plante par les champignons mycorhiziens à arbuscules

Chez les champignonns mycorhiziens à arbuscules (CMA), il n’y a pas de spécificité entre la plante-hôte et le partenaire fongique (Mosse et al., 1981). Un champignon endomycorhizien peut s’associer à plusieurs plantes et une même plante peut être infectée par plusieurs espèces de CMA. Le cycle de développement des CMA peut être divisé en 5 grandes étapes (Figure 11). Lorsque les spores, qui constituent les formes de conservation du champignon, sont dans des conditions de température et d’hygrométrie satisfaisantes, elles peuvent germer en absence d’une plante-hôte (Smith et Read, 1997). La croissance du tube germinatif du champignon en absence de la plante-hôte, ou croissance asymbiotique, est limitée dans le temps (1 à 3 semaines selon les espèces de CMA) et elle est caractérisée par une faible utilisation des réserves du champignon (Bécard et Piché, 1989). En absence de la plante-hôte, la croissance s’arrête et des septa se mettent en place à partir des apex cellulaires (Mosse, 1988). Cette septation s’accompagne d’une vacuolisation intense et d’une rétraction du cytosol, des noyaux et des mitochondries vers la spore (Logi et al., 1998)
Les spores des champignons MA germent lorsqu’elles se trouvent dans des conditions de température et d’hygrométrie optimales (1). Le tube germinatif du champignon se développe de manière limitée avec une utilisation minimale des réserves (2). Lorsque le champignon perçoit la présence d’une plante hôte, il manifeste une réaction typique de ramification intense des hyphes appelée « branching » (3). Lorsque le champignon rentre en contact avec la racine hôte, il différencie des appressoria à la surface du rhizoderme (cellules bleues) (4). Après un développement apoplastique, les hyphes intraracinaires du champignon atteignent les cellules corticales (cellules vertes) où ils différencient des structures très ramifiées appelées arbuscules (5). Après différentiation des structures intraracinaires, le champignon produit des spores à partir de son mycélium extraracinaire (5).
Le champignon détecte la présence d’une racine hôte grâce à des molécules présentes dans les exsudats racinaires (Buée et al., 2000). Les hyphes les plus proches des racines se ramifient de façon plus intense pour former un « branching », qui présente une finalité d’augmenter les probabilités de contact entre les hyphes du champignon et les racines hôtes (Nagahashi et Douds, 2000). Ce processus, qui marque le passage du champignon à une phase de développement présymbiotique, est caractérisé par une prolifération cellulaire accrue et une utilisation des réserves principalement lipidiques du champignon (Bécard et al., 2004), constituant une véritable « biotrophie sporale ».
Une fois le contact avec une cellule rhizodermique établi, le champignon forme un appressorium. De manière concomitante, un appareil de pré-pénétration, constitué essentiellement par des microtubules, des filaments d’actines et du réticulum endoplasmique, est mis en place dans la cellule rhizodermique ciblée par le champignon. Celui-ci provoque ensuite une invagination de la paroi et de la membrane plasmique de la cellule rhizodermique.
Le champignon se développe alors à l’intérieur d’une sorte de conduit entouré par l’appareil de pré-pénétration (Genre et al., 2005). Il est important de noter que le champignon se développe de manière apoplastique. La croissance du mycélium intraracinaire se poursuit de façon essentiellement intercellulaire jusqu’aux cellules corticales à l’intérieur desquelles le champignon va former des structures très ramifiées appelées arbuscules. Le développement de l’arbuscule se déroule dans un compartiment résultant de l’invagination de la membrane hôte appelée membrane périarbusculaire (Bonfante-Fasolo et Perotto, 1995) ou symbiosome (Parniske, 2000). Le symbiosome représente un nouveau compartiment, caractérisé par une grande surface d’échange entre les deux partenaires symbiotiques et comportant de nombreux transporteurs. L’arbuscule est donc défini comme un lieu d’échange privilégié entre la plante et le champignon. La mise en place d’un arbuscule s’accompagne de profonds réarrangements dans les cellules corticales (Genre et Bonfante, 1998 ; Fester et al., 2001). Les arbuscules ne sont pas des structures permanentes, leur développement se fait de manière asynchrone et la durée de vie d’un arbuscule est contrôlée par la cellule végétale selon des mécanismes mal connus (Fester et al., 2007 ; Walter et al., 2007). Le développement du mycélium intraracinaire permet la croissance simultanée, dans le sol, du mycélium extra-racinaire et finalement la sporulation.

Matériels d’étude

Le choix du site d’étude

L’écosystème forestier de Mandena est le premier site d’exploitation de la société Qit Madagascar Minerals (QMM). Il est localisé dans la partie orientale de la Grande Ile (entre les latitudes 24°56’S et 24°58’S, et les longitudes 46°59’E et 47°01’E avec 50m d’altitude). Cet écosystème forestier se singularise par la présence d’une importante diversité d’essences forestières endémiques. Cependant, l’exploitation des minerais a entrainé d’importantes perturbations à ne citer que l’appauvrissement du sol en éléments nutritifs qui devient inhospitalier pour les espèces végétales, la perte de la diversité végétale et animale, le changement de l’occupation du sol… Il y a également les difficultés liées à l’exploitation du topsoil (sol de surface obtenu après excavation avant l’extraction des minerais) dans le processus de restauration écologique. D’une part, il y a la méconnaissance de ses potentialités biologiques (qualités biologiques et microbiologiques) et d’autre part, l’insuffisance de la quantité de topsoil à utiliser. Cette étude couvrira essentiellement l’évaluation de la qualité biologique des topsoils en se focalisant sur la dynamique des communautés de champignons endomycorhiziens (densité, diversité et efficacité d’infection) qui y vivent, en fonction de la couverture végétale présente avant l’excavation. Ceci afin de pouvoir identifier quel type de topsoil pourrait être valorisé dans le programme de restauration écologique

Caractéristiques floristiques du site de Mandena

Ramanankierana et al (2008) ont rapporté la présence de 53 espèces de plantes dont le statut mycorhizien est résumé en annexe 1. Cette diversité floristique pourrait également être liée à la dynamique des communautés de champignons mycorhiziens contenus dans les topsoils.

Les matériels

topsoil

La figure 12, montre les différents types de topsoils utilisés lors de cette étude. Il s’agit respectivement des topsoils de la forêt naturelle décapée (TF.d), des topsoils de la forêt dans la zone de conservation (TFC), des topsoils sous Erica sp (TE), des topsoils de la forêt à l’intérieur de la Mine (TFM) et du sable déminéralisé (SD) c’est-à-dire du sable récupéré après l’extractiondes minerais.
Les échantillons de topsoil (environ 1500g par type de topsoil avec trois points de prélèvement par type de topsoil) ont été prélevés au sein du site de Mandena. Pour chaque zone de prélèvement de topsoil, un triangle de 5m de côté a été tracé. Les échantillons de sol ont été prélevés au niveau des 3 points entre 0 et 20cm en dessous des litières (500g de chaque) en évitant les effets de bordure. Les échantillons ont été conservés respectivement dans des sachets de prélèvement stériles à +4°C jusqu’à l’arrivée au laboratoire où les analyses ont débuté.

Matériels végétaux

Les matériels végétaux utilisés sont le sorgho et le maïs. Ces plantes ont été choisies et utilisées en tant que plante-test pour l’évaluation de l’infection mycorhizienne et pour faire multiplier les spores des champignons endomycorhiziens contenues dans les échantillons de topsoils prélevés dans le site d’étude.

Le sorgho

Le sorgho (Sorghum bicolor) a été référencié comme étant une plante hautement mycotrophique (Plenchette et Morel, 1996) car elle peut s’associer avec diverses espèces de champignons endomycorhiziens et avec un taux de colonisation des racines relativement haut (Figure 14). Il s’agit d’une plante graminéenne de la famille des POACEAE. Elle pousse rapidement et germe au bout de 3jours. Cette plante possède une touffe racinaire très dense et très fine. Elle est utilisée en microbiologie pour faire multiplier les spores des champignons. La densité des graines est de l’ordre de 15 000graines/Kg. Les graines de sorgho (variété IRAT 204) utilisées lors de cette étude ont été fournies par le FoFiFA (Foibem-pirenena Fikarohana ampiharina amin’ny Fampandrosoanaeny Ambanivohitra). Voir classification (tableau 1).

Le maïs

Le maïs est une plante tropicale herbacée annuelle. Il s’agit également d’une plante mycotrophe appartenant à la famille des POACEAE, genre Zea et espèce mays. Elle pousse rapidement et germe au bout de 3 jours. Les semences utilisées lors de ce travail appartiennent à la variété IRAT200 (figure 13) obtenues par pollinisation manuelle en 2018 et vendu au marché d’Antananarivo TSANTSAHA Petite vitesse. Voir classification (tableau 1).

Méthodes

Extraction, isolement et dénombrement des spores de champignons endomycorhiziens

Extraction des spores

L’extraction des spores de champignons a été réalisée à partir de 100g d’échantillon de sol selon le protocole décrit par Sierverding en 1991. Trois répétitions par type de topsoil ont été analysées. Pour ce faire, 100g de sol ont été déposés dans un récipient contenant de l’eau du robinet (figure 15). L’ensemble a été énergiquement agité à l’aide d’une spatule préalablement stérilisée afin de briser les mottes de terre et les agrégats pour libérer les spores. Sans laisser la solution se reposer, la suspension a été filtrée par des séries de tamisage sous un jet d’eau courante à l’aide d’un tamis moléculaire de maille 200 μm, 100 μm, 80 μm, 50 μm (Figure 16). Le contenu de chaque tamis a été récupéré séparément et versé dans des tubes de centrifugation. Deux séries de centrifugation ont été réalisées : la première à 3000 tours/minute pendant 5 minutes avec de l’eau afin que toutes les spores puissent se décanter dans le culot. Ensuite, une deuxième centrifugation à 1000 tours/minute pendant 3 minutes a été réalisée après élimination du surnageant puis rajout d’une solution de saccharose 60% (m/v). Les spores ayant migré vers le surnageant par gradient de concentration seront récupérées par filtration à travers une membrane filtrante (papier Wattman n°2) préalablement quadrillée.

Tests du potentiel infectieux et de la capacité de multiplication des spores de champignons mycorhiziens à l’aide des plantes-hôte mycotrophes en conditions contrôlées

Préparation de la prè-gérmination des graines

Le sorgho et le maïs, deux espèces végétales hautement mycotrophes, ont été utilisées pour ces tests. Les graines ont été stérilisées superficiellement par immersion dans l’alcool 95° pendant 30 secondes puis rincées abondamment avec de l’eau distillée stérilisée avant le semis.
L’opération de stérilisation a été répétée 5 fois. Ces graines ont été par la suite déposées dans des grandes boites de pétri contenant du sable stérilisé. L’ensemble a été placé dans une étuve à une température de 30°C (figure 19) pendant 72 heures. Ensuite, les graines qui ont germé (figure 18) ont été repiquées dans des pots plastiques de 100 ml contenant 100g de sable stérilisé à raison de trois plantules par pot.

Préparation de l’inoculum fongique 

Le topsoil sous Erica sp (TE) a été choisi comme source de propagules fongiques lors de cette étude étant donné que selon les observations sur terrain, ce topsoil est disponible en grande quantité et que les résultats obtenus au laboratoire ont également montré qu’il contient une densité significativement élevée de spores de champignons endomycorhiziens au même titre que le topsoil forêt dans la mine TFM (cf tableau 2 partie résultats).
De ce fait, les spores qui présentent les mêmes caractéristiques morphologiques (couleur identique et même taille) ont été choisies et isolées à partir de ce topsoil. Les individus ont été placés dans de l’eau distillée stérilisée contenue dans un verre de montre en attendant l’inoculation qui s’est déroulé au plus tard dans les deux heures suivant leur isolement.
Pour notre cas, ce sont les spores de couleur noire de diamètres 80µm et 50µm qui ont été choisies à cause de leur dominance par rapport aux autres morphotypes (cf tableau 3 partie résultats).
Pour ce faire, 20 spores vivantes de morphotype noire 80µm et noire 50µm ont été inoculées respectivement dans chaque pot contenant du sable stérilisé avant le repiquage des plantules de maïs ou du sorgo (figure 20). Pour chaque morphotype et pour chaque espèce végétale, 20 répétitions ont été mises en place et placées en randomisation totale sous serre (température moyenne variant de 18°C à 28°C et une photopériode de 12 heures suivie d’un arrosage 5 fois par semaine avec de l’eau distillée).
Au total, il y avait eu 80 pots contenant des plantules inoculées avec des spores de champignons endomycorhiziens, dont 40 pots pour le maïs (20 pots inoculés avec les spores noires de taille 50 et 20 pots inoculés avec les spores de taille 80) et 40 pots pour le sorgho (20 pots inoculés avec les spores noires de taille 50 et 20 pots inoculés avec les spores de taille 80).

Taux de mycorhization des racines de maïs (Zea mays) et de sorgho (Sorghum bicolor)

Deux méthodes complémentaires permettent d’estimer la colonisation des racines par les champignons endomycorhiziens (Trouvelot et al., 1986). L’une en utilisant une échelle de colonisation et l’autre en effectuant un calcul du taux de mycorhization. Une racine est considérée comme infectée par des champignons endomycorhiziens lorsque des hyphes, des vésicules ou des arbuscules sont observés à l’intérieur des cellules corticales.
 La première méthode se base sur un système à six classes d’infection de racine tout au long de l’observation au microscope (figure 22). Le pourcentage de colonisation a été déduit à partir des observations de cette échelle.

Analyse des résultats et traitement des données

Les données ont été soumises à une analyse de variance au seuil de probabilité de 5% en utilisant le test de Newman-Keuls à l’aide du logiciel XLSTAT 2008 et respectent les conditions requises de la loi normale et de l’homogénéité de variance (ANOVA). Les analyses suivantes ont été réalisées afin de faciliter la compréhension des tendances et l’interprétation des résultats :
– Analyse 1 : Effets du type de topsoil sur la densité des spores
– Analyse 2 : Effets du type de topsoil sur la diversité des spores
– Analyse 3 : Fréquence relative des morphotypes observés
– Analyse 4 : Effets des plantes cultivées sur la multiplication des spores (spores noires 50 et spores noires 80) : Nombre de spores après culture
– Analyse 5 : Analyse en Composante Principale des données
– Analyse 6 : Capacité d’infection des spores inoculées (Taux de mycorhization des racines)

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