L’étude de dangers, pour l’évaluation vis-à-vis des tiers
La méthodologie de réalisation d’une étude de dangers n’est pas définie dans la réglementation. Son contenu doit permettre d’identifier et de recenser les phénomènes dangereux pouvant être générés par les activités d’un site industriel et d’évaluer leurs intensités, leurs conséquences, leurs probabilités d’occurrence et leurs cinétiques, ainsi que les moyens de prévention et d’intervention mis en place pour les éviter, les réduire ou, à défaut, les compenser.
De ce fait, les études de dangers de sites pyrotechniques ou non pyrotechniques, seront articulées de la même façon, même s’il existe différentes analyses de risques telles que la méthode HAZOP, WHAT IF, SWIFT, ou encore les arbres de défaillances ou d’événements.
Les différents facteurs permettant de quantifier ces phénomènes dangereux seront toujours déterminés, mais les outils définis dans les réglementations mentionnent des méthodologies d’évaluations différentes selon l’activité réalisée.
L’étude de dangers dans un DDAE pyrotechnique sera la pièce maîtresse de l’évaluation des risques vis-à-vis de l’environnement et des tiers. Elle contiendra une analyse poussée des scénarios envisagés au vu des risques majeurs d’explosion et d’incendie liés aux produits.
DUERP, pour l’évaluation des risques auxquels sont exposés les travailleurs
Toute entreprise, dès lors qu’elle emploie un salarié, doit évaluer les risques auxquels ces derniers sont exposés, et cela pour tous les postes de travail. Ceci se fait au travers du DUERP.
Avant la refonte du code de l’environnement en 2017 et pour les sites soumis à Autorisation au titre de la nomenclature des ICPE, l’évaluation des risques commençait par la rédaction d’une NHS, comme vu au chapitre 4.1. Ce dossier reprenait les éléments de base nécessaires à l’élaboration du DUERP.
En pyrotechnie, cette généralité s’applique également, néanmoins le DUERP est complété par une ou plusieurs EST. Ce type d’étude permet de définir les conditions de travail et d’évaluer l’exposition des travailleurs aux risques pyrotechniques selon différents paramètres.
Etant réalisées avant la mise en service des installations, elle contribue à la mise enplace d’une protection collective en éliminant les situations dangereuses liées à la conception et à l’implantation des installations.
Dans une EST, l’évaluation des risques est réalisée pour chaque activité, en prenant en considération les différents postes receveurs et émetteurs, pyrotechniques et non pyrotechniques.
La spécificité d’un site pyrotechnique est donc qu’il est impératif de justifier de la maîtrise des risques, afin de pouvoir avoir les autorisations nécessaires à l’exploitation, comme développé au chapitre 4.6.
De ce fait, l’EST représentera l’évaluation des risques internes au site, contrairement à l’étude de dangers qui évalue les risques externes au site.
La réglementation prévoit deux types d’évaluations des risques pour les sites pyrotechniques, à savoir :
– Les EST, pour une activité impliquant un produit pyrotechnique unique ;
– Les EST « cadres », réalisés lorsque les activités impliquent différents produits pour une même activité / pour un même poste de travail.
Pour notre site, au vu des produits impliqués dans les différentes activités, l’ensemble des EST seront dites « cadres ».
Sur le futur site de stockage, montage / communicage / picking, d’assemblage et de destruction d’artifices de divertissement, les activités réalisées par les travailleurs consistent au stockage et à la manutention, à l’assemblage et au montage, à la destruction, et aux transferts internes des dits produits.
Application de l’évaluation des risques à un cas concret
Afin de mieux appréhender la méthodologie d’évaluation des risques pour un site pyrotechnique, nous développerons un exemple basé sur une situation rencontrée lors de la réalisation des différentes études, soit celui relatif à l’aire de chargement / déchargement, dénommée ACH/DCH.
Nous commencerons par développer les étapes dites de « généralités », car les éléments en résultant sont indispensables à la réalisation de l’ensemble des études associées au projet. Puis nous développerons les étapes propres à l’étude de dangers, et pour terminer, celles spécifiques aux EST.
Certaines étapes feront référence à des notes réglementaires jointes en annexes. Ces notes constituent une analyse réglementaire. Elles ne sont pas indispensables à la compréhension de la démarche présentée.
Etape n°5 – EDD : Analyse préliminaire des risques
La note réglementaire jointe en annexe 6 du présent mémoire développe la méthodologie d’analyse des risques.
L’APR est un pré diagnostic permettant d’identifier parmi l’ensemble des scénarios envisagés, ceux susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’extérieur. Ces derniers sont appelés scénarios majorants.
Dans cette étape, nous déterminerons l’intensité du phénomène. Sa gravité sera déterminée dans l’analyse détaillée des risques. L’intensité dans l’APR d’un scénario impliquant des explosifs ne prendra que très peu en considération la nature de l’effet (intensité de l’événement selon les zones d’effet), mais plutôt si ces effets sortent des limites de propriétés.
La probabilité d’occurrence
La note réglementaire jointe en annexe 7 explicite les relations entre probabilités générales et probabilités pyrotechniques.
La probabilité d’occurrence d’un événement pyrotechnique est prédéfinie dans la littérature, et plus précisément dans le guide des bonnes pratiques en pyrotechnie.
Comme vu à l’étape n°1, selon une méthode qualitative, la probabilité d’occurrence de notre scénario d’explosion d’un camion sur l’ACH/DCH est cotée P1, soit D.
Cette cotation théorique est basée sur l’activité réalisée et ne prend en compte qu’une partie des barrières de prévention et de protection pouvant être mises en place par l’exploitant sur son site. L’analyse détaillée des risques permet de répertorier l’ensemble des barrières mises en place en identifiant leur type et leur efficacité. Ainsi, il sera possible de justifier de la diminution (du déclassement) de la probabilité d’occurrence de l’événement étudié.
Pour le scénario d’explosion d’un camion sur l’ACH/DCH de notre site, la méthodologie des nœuds papillon a permis de mettre en évidence toutes les barrières de sécurité mises en place. Le résultat de cette analyse est joint en annexe 8 Au vu des barrières de prévention et de protection identifiées, la cotation de la probabilité d’occurrence résiduelle de l’événement passe de P1, soit D, à P0, soit E.
Les modalités d’éloignement
Les modalités d’éloignement ont pour but de protéger les populations en créant des distances de sécurité entre des sites pouvant générer des phénomènes dangereux et des infrastructures sensibles. Afin de répondre à ces requêtes une analyse de faisabilité préalable est réalisée. L’analyse de faisabilité préalable du projet a permis de valider ces mesures d’éloignement. Les zones d’effets générées par les installations n’impactent aucun site ou infrastructure sensible.
Le comptage des tiers
Le comptage des tiers est réalisé afin de prévenir toute surexposition des tiers aux risques pyrotechniques.
Le comptage des tiers pour un site pyrotechnique présente des modalités très strictes.
En effet, ceci est lié à la cinétique dite « rapide » de l’événement redouté, comme développé en annexe 11.
Notre scénario d’explosion d’un camion sur l’ACH/DCH expose les tiers de la manière suivante.
En ce qui concerne le risque toxique, aucune méthodologie réglementaire pour la définition des effets toxiques dans les établissements pyrotechniques n’a encore été arrêtée, toutefois, des résultats d’essais de référence existent et sont disponibles dans le guide des bonnes pratiques en pyrotechnie du SFEPA.
L’analyse préliminaire des risques permet de faire un état des lieux des risques, en identifiant les scénarios majorants. Leur identification prend en considération, principalement, la maîtrise des zones d’effets dans les limites de propriétés du site. Les barrières de sécurité ne sont prises que partiellement en compte dans cette première évaluation. Les paramètres dépendent des données de la littérature. Cette analyse est « théorique ».
L’analyse détaillée des risques, quant à elle, permet d’affiner les cotations des différents paramètres en prenant en considération la réalité du terrain. La probabilité sera revue en prenant en compte les moyens de protection et de prévention mis en place sur le site, et la gravité du phénomène dangereux, en déterminant l’impact réel de ce dernier sur les tiers grâce à des modalités d’éloignement et de comptage. Cette analyse est « pratique ».
La littérature, et plus particulièrement le guide des bonnes pratiques en pyrotechnie, définie selon l’activité exercée et les barrières de maîtrise des risques mises en place, la probabilité d’occurrence d’un événement. Ce paramètre a été défini selon les différents retours d’expériences, et une grande partie des activités pyrotechniques sont ainsi recensées, et cotées.
Le fait que cette probabilité soit prédéfinie dans la réglementation, permet de les rendre plus faciles à appréhender. En effet, contrairement à un phénomène non pyrotechnique, comme par exemple un BLEVE ou un UVCE, ces probabilités sont définies selon l’accidentologie du secteur d’activité ou des produits mis en œuvre.
L’avantage de la réglementation pyrotechnique, qui mentionne dans ses textes beaucoup d’éléments, permet au bureau d’études de statuer sur la conformité d’une installation sans avoir à faire d’approximation ou de déduction.
De plus, la détermination de l’acceptabilité de l’exposition des travailleurs à un événement pyrotechnique permet de vérifier la conformité selon les impacts encourus. Cette évaluation des risques peut être assimilée à une conformité vis-à-vis du DUERP qui définit les risques aux différents postes de travail.
La réalisation des EST avant la mise en service des installations permet de mettre en place une protection collective efficace, directement liée à l’implantation des installations du site.
La réglementation en pyrotechnie prédéfinit tous les éléments relatifs à l’évaluation des risques. Si ces éléments sont respectés, le site est dit « conforme ». Ainsi, aucune zone d’ombre n’existe sur l’évaluation des risques et sur leurs cotations, contrairement à l’évaluation des risques réalisée au travers du DUERP où la forme, la méthodologie et le contenu ne sont pas définis dans la réglementation.