Les formalités obligatoires pour le salarié

L’accident de trajet

Le Code de la Sécurité sociale, dans son article L. 411-2, définit le trajet protégé par la loi par des extrémités.
Les extrémités du trajet protégé par la loi s’entendent du trajet aller-retour entre la résidence principale, une résidence secondaire présen-tant un caractère de stabilité ou tout autre lieu où le travailleur se rend de façon habituelle pour des motifs d’ordre familial, et le lieu de travail.

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Les extrémités du trajet protégé par la loi s’entendent également du trajet aller-retour entre le lieu de travail et le restaurant, la cantine ou d’une manière générale le lieu où le salarié prend habituellement ses repas.

Les différentes extrémités du trajet

La résidence principale peut être définie comme tout lieu où le salarié a son principal établissement (traditionnellement le domicile).
Pour être prise en compte au regard de l’article L. 411-2, la résidence secondaire doit présenter un critère de stabilité qui se traduit par des séjours fréquents et réguliers. L’éloignement de cette résidence n’a pas pour effet de lui ôter son caractère de stabilité.

Exemple : maison de campagne.

Enfin, il faut entendre par lieu de restauration la cantine ou le restaurant situé à l’extérieur de l’entreprise ou de ses dépendances, ou le lieu où le salarié prend habituellement ses repas (domicile, restaurant…).
Dans l’hypothèse où la cantine se trouve dans l’enceinte de l’entreprise ou dans ses dépendances, l’accident qui survient entre le lieu de travail et cette cantine sera qualifié d’accident du travail et non d’accident de trajet car le salarié se trouve dans un lieu où l’employeur exerce son autorité et sa surveillance.
La condition d’habitude exigée par la loi n’impose pas un rythme quo-tidien de fréquentation du lieu où le salarié prend ses repas. Seul le lieu de repas occasionnel ne répond pas à la condition d’habitude.

La notion de « détour »

Le détour doit être nécessité par la vie courante. Dans ce cas seule-ment, le détour est couvert par la législation professionnelle applicable en matière d’accident de trajet.
Attention : il convient d’être en « trajet » donc il ne faut pas avoir retrouvé son autonomie personnelle, la protection ne s’appliquerait plus dans ce dernier cas. Par exemple : accompagner son enfant jusqu’à sa classe et se tordre la cheville dans la cour de l’école.
Vous l’aurez remarqué, il s’agit d’une notion très factuelle.
Sont classiquement assimilés à des détours le fait d’emmener ses enfants à l’école ou chez la nourrice, aller chercher son pain, aller chez le kinésithérapeute dans le cadre d’une série de massages…

Le lien entre le trajet et le contrat de travail

Pour qu’un accident survenu sur le parcours entre le domicile et le travail du salarié soit qualifié d’accident de trajet, il faut que ce dépla-cement ait pour but l’exécution de la prestation de travail et qu’il se produise pendant le temps normal de trajet. Autrement dit, si un salarié se rend à son entreprise pour un motif non lié directement à l’exécution du travail, il ne peut pas en principe revendiquer le bénéfice de la pro-tection légale.
Ces trajets sont, en effet, effectués dans un intérêt personnel.
Exemple : un salarié qui travaille de nuit et qui est victime d’un accident en allant chercher sa paie dans la journée pendant les heures d’ouverture des bureaux.
L’accident doit donc survenir dans un temps normal par rapport aux horaires de l’entreprise
Le temps normal doit être apprécié en fonction de la distance à par-courir et du moyen de transport du salarié.
Tout décalage horaire important prive le salarié de la protection légale à partir du moment où il correspond à une volonté du salarié d’effectuer un acte personnel ou indépendant de son travail. Exemple : s’arrêter faire des courses sur son trajet de retour le soir entraîne une inter-ruption de trajet.
Le temps normal pour effectuer un trajet s’apprécie également compte tenu des conditions concrètes de circulation (ex. embouteillage…).
Dans un arrêt, la Cour de cassation 4 a rappelé que le temps habituel de trajet entre le domicile et le lieu de travail ne constitue pas en prin-cipe du temps de travail effectif sauf si le temps de trajet déroge au temps normal de trajet effectué par le salarié pour se rendre de son domicile à son travail.
Exemple : être obligé de quitter plus tôt ou de partir la veille de son domicile pour se rendre sur son lieu de travail.
En revanche, le temps de trajet entre deux lieux de travail constitue du temps de travail effectif et rémunéré en tant que tel.
Le trajet ne sera protégé que dans la mesure où le parcours s’effectue par un chemin normal et qu’il n’est ni interrompu ni détourné pour un motif personnel ou étranger aux nécessités de la vie courante ou indé-pendant de l’emploi.
L’interruption de trajet consiste en une modification du trajet dans le temps susceptible de faire perdre au salarié le bénéfice de la législation sur les accidents du trajet.
Le principe est le suivant : tout accident survenu au cours d’une inter-ruption ne peut être un accident de trajet.
Dans la plupart des cas, l’accident survenant sur la chaussée elle-même est considéré comme un accident de trajet car les juges consi-dèrent que le trajet n’est encore ni détourné, ni interrompu. Exception : les accidents survenus au cours d’une interruption du trajet nécessitée par un acte de dévouement peuvent être considérés comme accidents de trajet. Un acte de dévouement se définit comme une intervention à laquelle est tenue un citoyen en vertu à la fois d’une obligation morale ou légale (ex. nécessité d’assistance à personne en danger).
En bref, vous l’aurez compris, la notion d’accident de trajet est une notion très factuelle qui ne peut, en aucun cas, être appréciée in abstracto.
Exemple
Prenons le cas d’un salarié qui prétend s’être fait une entorse en quittant son domicile : il faut distinguer le salarié habitant un immeuble collectif et le salarié habitant un pavillon. Dans le premier cas, sa chute ayant lieu dans l’escalier de l’immeuble, qui est considéré comme partie commune donc assimilée voie publique, il s’agira d’un accident de trajet. Dans le second cas, s’il ne se trouve pas sur la voie publique au moment des faits mais encore dans l’enceinte de sa propriété, il sera question d’un accident domestique, indem-nisé au titre de la maladie.
L’intérêt de la distinction entre accident du travail et accident du trajet
Pour le salarié, la distinction ne change rien quant à sa réparation en matière de Sécurité sociale. En matière de tarification des accidents
En revanche, financièrement la qualification d’accident du trajet est plus intéressante pour l’employeur eu égard à sa tarification des acci-dents du travail.
En effet, la tarification des accidents de trajet fait l’objet d’une cotisa-tion forfaitaire nationale indépendante du nombre d’accidents de trajet survenus dans chaque entreprise.
Le risque d’accident de trajet est financé par une majoration forfaitaire fixée chaque année par arrêté ministériel (cf. chapitre III).
Il est donc très important pour l’employeur de veiller à la qualification d’un accident en trajet ou en travail.
Pour les recours complémentaires de la victime
Une victime d’un accident du travail bénéficie d’une présomption d’imputabilité entraînant une réparation économique forfaitaire, l’empêchant d’exercer contre l’auteur de l’accident un recours de droit commun.
En revanche, la victime d’un accident du trajet peut exercer un recours de droit commun contre l’auteur de l’accident quand celui-ci est l’employeur ou un de ses préposés, sur le fondement des articles 1382 et 1384 du Code civil.
Une exception toutefois à ce principe concernant les accidents du tra-vail résultant d’un accident de la circulation. Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 27 janvier 1993 5 créant l’article L. 455-1-1 du Code de la Sécurité sociale, la victime d’un accident du travail résultant d’un acci-dent de la circulation peut exercer un recours de droit commun contre le responsable de l’accident dès lors qu’il s’agit d’une voie publique et que l’accident implique l’employeur ou l’un de ses préposés apparte-nant à la même entreprise.
Dans ce cas, la réparation complémentaire offerte à la victime est régie par les dispositions de la loi Badinter no 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de l’indemnisation des victimes d’accidents de la cir-culation et à l’accélération des procédures d’indemnisation.
Actuellement, le système d’indemnisation des accidents de droit com-mun apparaît incontestablement plus favorable que le système de réparation des accidents du travail. En effet, les victimes perçoivent une réparation intégrale de leurs préjudices, qu’ils soient économiques ou personnels, ce qui n’est pas le cas dans le système actuel de répa-ration des accidents du travail. À noter sur ce point : est en cours une réforme qui viserait à mettre en place une réparation intégrale des victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, c’est-à-dire en incluant à la fois une réparation du préjudice économique et une indem-nisation des préjudices personnels des victimes. Cette réforme, très attendue, devrait voir le jour.
Quant à la protection du salarié en cas de licenciement
La loi du 7 janvier 1981 a inséré dans le Code du travail, des disposi-tions visant à la protection de l’emploi des victimes d’accidents du travail 6.
Il est interdit de licencier une victime d’un accident du travail pendant son arrêt de travail ainsi que pendant le délai d’attente et la durée du stage de réadaptation, de rééducation ou de formation professionnelle. Pendant ces périodes de suspension du contrat de travail, l’employeur ne peut résilier le contrat sauf s’il justifie d’une faute grave de la victime, ou de l’impossibilité de maintenir ledit contrat pour un motif non lié à l’accident.
Les victimes d’un accident du trajet sont exclues de ces dispositions. Un accident du trajet ne pouvant ni être prévu ni évité par l’employeur, l’inaptitude du salarié qui en est victime entraîne la rupture du contrat de travail.
Toutefois, la victime d’un accident de trajet est, au regard du droit du travail, assimilée à une victime d’un accident ordinaire, donc elle béné-ficie en tout état de cause des dispositions des articles L. 1132-1 et s. du Code du travail aux termes duquel il est interdit de sanctionner ou de licencier un salarié en raison de son état de santé ou de son han-dicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail.
La victime d’un accident du trajet pourra toujours être licenciée, non pas en raison de son état de santé mais au motif de la désorganisation de l’entreprise ou de la nécessité de remplacer définitivement le salarié absent qui perturbe le fonctionnement de l’entreprise de par son absence prolongée ou répétée.

L’accident de mission

Contrairement aux accidents de travail et de trajet, l’accident de mis-sion n’est pas défini par le Code de Sécurité sociale. C’est une notion avant tout jurisprudentielle.
On entend par « mission » : le déplacement du salarié hors de l’entre-prise dans le cadre de ses fonctions c’est-à-dire avec un objectif pro-fessionnel (formation, visite client, chantier extérieur, etc.). Les critères de temps et de lieu de travail ne peuvent pas être pris en compte dans le cadre d’un accident survenu lors d’une mission professionnelle.
L’évolution de la notion dans la jurisprudence
La jurisprudence a longtemps considéré ce type d’accident comme étant un accident du travail sans se poser la question d’un éventuel temps de trajet dans l’emploi du temps de la victime.
La Cour de cassation, réunie en assemblée plénière, s’est positionnée sur ce point dans un arrêt « Olives » du 5 novembre 1992 7.
Au regard de cette jurisprudence, peuvent être qualifiés d’accidents de trajet les accidents survenant durant les périodes au cours desquelles :
■ le salarié se rend de l’endroit où il réside (domicile, hôtel…) à son premier lieu de mission (chantier, lieu de formation, client…) ;
■ et idem entre son dernier lieu de mission et l’endroit où il réside. Tout événement survenant en dehors de ces périodes et ayant un rap-port avec l’activité professionnelle, sera qualifié d’accident du travail. Une distinction était faite toutefois entre les actes de vie profession-nelle effectués dans le cadre de la mission et les actes relevant de la vie courante.
Cette jurisprudence, jusqu’alors constante, a été remise en cause par deux arrêts du 19 juillet 2001 8, la Cour de cassation opérant alors un revirement de jurisprudence. Dans ces deux espèces, il s’agissait de salariés en mission à l’étranger et décédés dans leurs chambres d’hôtel.
Désormais, l’accident d’un salarié en mission est présumé accident du travail, peu importe s’il survient à l’occasion d’un acte professionnel ou d’un acte de vie courante, sauf possibilité pour l’employeur ou la Caisse primaire d’assurance maladie de rapporter la preuve que le salarié a interrompu sa mission pour un motif personnel.
Cette jurisprudence, régulièrement reprise depuis 2001, tend à se confirmer.
Concrètement, il est désormais très difficile pour l’employeur ou pour la Caisse de contester la qualification d’accident du travail survenu à un salarié en mission. Il faudra prouver que le salarié s’est délibérément soustrait à l’autorité de l’employeur en accomplissant un acte sans relation avec son activité professionnelle ou un acte de vie courante (une activité de loisir, par exemple). Récemment la Cour de cassation a confirmé sa position dans un arrêt du 1er juillet 2003 9 et a gommé définitivement sa jurisprudence de 1992. Dès lors que l’accident intervient au cours du trajet entrepris par le salarié pour se rendre sur son lieu de mission, l’origine professionnelle de l’accident est avérée, l’accident doit donc être qualifié d’accident du travail.
Enfin, cette position se trouve confirmée dans un arrêt de la Cour de cassation en date du 16 septembre 2003 10. Dans cette affaire, il est ques-tion d’un salarié chargé de la conduite de train. Entre ses deux services, il est libre de disposer de son temps et de choisir le lieu où il passera la nuit. Victime d’un malaise au moment de se rendre aux toilettes de l’endroit où il avait choisi de passer la nuit entre deux missions, le salarié a contesté la décision de rejet de la Caisse de qualifier son malaise en accident du travail. Ce rejet a été confirmé par le Tribunal et par la Cour d’appel. La Cour de cassation, elle, censure cette décision de rejet.
Elle confirme ainsi sa position en relevant que le salarié se situait dans le cadre d’une mission et que le malaise dont il a été victime doit relever de la législation professionnelle.
Cet arrêt a le mérite d’ouvrir plus largement la notion de mission qui était jusqu’alors limitée à des déplacements ponctuels aux yeux de la jurisprudence.
Cas particuliers : quid lorsqu’un intérimaire en poste dans votre entreprise est victime d’un accident?
Pour mémoire, le contrat d’intérim est un contrat tripartite, qui met en présence une entreprise de travail temporaire, un intérimaire et une entreprise utilisatrice.
La société de travail temporaire est l’employeur juridique du salarié intérimaire. Un contrat de travail les lie. La société de travail temporaire met à la disposition de l’entreprise utilisatrice son intérimaire dans le cadre d’un contrat de mise à disposition. Aucun contrat ne lie l’intéri-maire et la société utilisatrice.
Lorsque l’accident du travail se produit, c’est la société de travail tem-poraire qui effectuera la déclaration d’accident comme tout employeur juridique.
Vous devrez, en tant qu’entreprise utilisatrice, remplir une déclaration d’information préalable. Compte tenu de l’essor du travail temporaire dans les années 1980, les pouvoirs publics ont pris des mesures afin de sensibiliser les entre-prises utilisatrices au fait que les intérimaires devaient être traités dans l’entreprise avec les mêmes égards qu’un salarié permanent.
Une loi de 1990 a donc prévu en cas d’accident du travail concernant un intérimaire une répartition du coût entre la société de travail tem-poraire et l’entreprise utilisatrice.
Peu précise sur ces modalités de répartition du coût, la loi n’a pas eu l’effet escompté.
Un décret du 25 juin 1992 11 est venu compléter cette loi en fixant arbi-trairement les modalités de répartition entre les deux sociétés.
Dès lors qu’un accident du travail survient, entraînant une incapacité supérieure ou égale à 10 % ou un décès pour l’intérimaire, le capital représentatif de rente sera réparti de la manière suivante : 1/3 à la charge de l’entreprise utilisatrice et 2/3 à la société de travail tempo-raire. Le reste des frais (médicaux, pharmaceutiques, hospitalisation et indemnités journalières) restent à la charge de la société de travail tem-poraire, employeur juridique de l’intérimaire.

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