Dimensions et variables
Dimension sociologique
Les variables et les indicateurs de la dimension « sociologique » Au cours de l’analyse menée dans le premier chapitre (chapitre 1- L’effet Pygmalion), nous avons mis en évidence le choix des variables utilisées dans des recherches ciblant l’influence des perceptions des enseignants sur les performances des élèves. L’examen de ces recherches montre que des caractéristiques individuelles de l’élève exercent un impact sur les représentations des enseignants à l’égard des performances cognitives des élèves. Le niveau de l’intelligence, le genre, la classe Chapitre 8. Méthodologie de recherche 154 socioéconomique ou l’origine ethnique de l’élève jouent un rôle dans la construction des représentations à l’égard des performances cognitives des élèves.
Au-delà de ces caractéristiques propres à l’élève, le niveau de la classe, l’école d’appartenance ou le comportement de l’enseignant entretient une relation avec les performances cognitives de l’élève. Malgré les difficultés rencontrées sur le terrain, qui nous ont empêché l’accès à certaines variables, nous conservons pour notre expérimentation une partie des variables. Il s’agit de la variable « genre », la variable « classe », la variable « école d’appartenance » et la variable « origine ethnique de l’élève ». Ces variables sont des variables indépendantes, en fonction desquelles dépendront nos variables dépendantes. Pour garder la variable « origine ethnique de l’élève », nous avons fait recours à un indicateur représenté par la consonance du nom de l’élève.
Le nom et/ou le prénom à consonance étrangère
La problématique des inégalités à l’école nous ramènent inévitablement à la question ethnique, question taboue et phénomène qualifié « d’invisible » en France (Felouzis et all., 2002), qui demeure une démarche particulière, fondée sur le recours à des indicateurs indirects de l’origine ethnique des élèves, plutôt que de l’aborder de manière directe. L’un de ces indicateurs, d’ailleurs assez puissant, est représenté par le nom ou/et le prénom qui marque l’origine culturelle, nationale et parfois l’appartenance religieuse de la personne. Dans son ouvrage « Un prénom pour toujours. La cote des prénoms hier, aujourd’hui et demain », Phillipe Besnard (1986) aborde la charge symbolique, de point de vue social et culturel, d’un prénom. Felouzis et all. (2002) souligne l’utilisation différente des prénoms selon la classe sociale auxquelles appartiennent les familles et l’emploi des prénoms marquant plus ou moins la catégorie sociale de la personne. Selon Besnard, pour les familles d’immigrés, le prénom garde le lien avec l’origine culturelle, nationale et l’appartenance religieuse de celui qui le porte
. Des prénoms tels que Mohamed, Illyas, Youssef, indiquent clairement l’origine musulmane de leur porteur, car ces prénoms sont employés exclusivement par des familles musulmanes. D’autres prénoms assez spécifiques Chapitre 8. Méthodologie de recherche 155 sont ceux d’origine turque. De prénoms tels que Ismail, Yaqot, Yasmin, Yusuf sont rarement utilisés par d’autres populations que celle d’origine turque. D’autres catégories des prénoms, qui donnent une indication sur l’origine ethnique de son porteur, sont celles des prénoms employés en Afrique ou Asie. Le prénom n’indique pas toujours la vraie origine ethnique d’une personne, ce qui constitue une limite importante de cet indicateur. C’est le cas des prénoms chrétiens, adoptés par des populations chrétiennes de l’Afrique, ou encore des prénoms exotiques qui commencent, selon une tendance récente, à être porté par des personnes qui n’ont guère d’origines étrangères.
Cependant, le nombre de personnes d’origine étrangère, qui participent à des études à visée ethnique, est en général sous-estimé (Félouzis et all., 2002). Une grande partie des travaux qui traitent d’une manière indirecte la discrimination ethnique ont été menés dans le domaine économique et visent plus particulièrement la discrimination à l’embauche (Riach et al., 1991 ; Kenney et al., 1994 ; Bertrand et al., 2004 ; Cédiey et al., 2007 ; Duguet et al., 2010)