La décision médicale est souvent une décision sous incertitude. Sans cesse, quand il est confronté à un malade, le médecin essaie d’établir l’identification de l’état du malade (diagnostic), se donne une prévision raisonnable de l’évolution (pronostic), et propose des actes dont les uns serviront essentiellement à valider le diagnostic (actes ou investigations), les autres à modifier dans le sens de l’amélioration ou l’évolution de la santé du malade (actes thérapeutiques) .
La démarche médicale est une démarche scientifique qui repose sur l’observation, la génération d’hypothèses, la mise en place d’expériences pour tester les hypothèses. Toutefois, on peut dire avec Claude Bernard que « l’acte médical est le plus souvent un acte scientifique inachevé ». Car, faute de temps, faute de pouvoir faire toutes les recherches et les expérimentations nécessaires, il arrive bien souvent que les décisions soient prises avant que le praticien ait atteint la certitude. Les signes cliniques regroupés ou pris séparément, classés par ordre d’importance dans leurs manifestations, constituent en l’absence d’autres informations disponibles les bases de décision. Ainsi, il est donc important d’avoir une idée sur la valeur qu’on peut accorder à une information ou à un signe clinique.
GENERALITES SUR L’HYPERTENSION ARTERIELLE ET L’AIDE A LA DECISION MEDICALE
RAPPELS SUR L’HYPERTENSION ARTERIELLE
Définition de l’hypertension artérielle
La pression artérielle n’est, dans la majorité des cas, qu’un des indicateurs du risque vasculaire. Elle est plus élevée pendant l’état de veille que durant le sommeil ; elle s’élève à l’effort, lors des émotions et de la fatigue. Cela explique qu’une seule mesure de la pression artérielle soit insuffisante pour porter le diagnostic d’hypertension artérielle.
Dès lors, la définition de l’hypertension artérielle (HTA) est purement pragmatique : on déclare hypertendus les sujets qui ont une pression artérielle telle qu’une surveillance vasculaire renforcée et/ou un traitement sont justifiés. Lorsque la pression artérielle est en permanence supérieure à 140/90 mmHg, une surveillance vasculaire et des règles hygiéno-diététiques sont justifiés. Lorsque la pression artérielle est en permanence supérieure à 160/95 mmHg, un traitement est justifié.
Cette affirmation comporte des limites dans sa validité. Elle n’est valable qu’entre 20 et 65 ans, les valeurs supérieures tolérables sont plus faibles chez l’enfant et chez la femme enceinte ; elles sont plus élevées chez le sujet âgé. Il faut savoir également que de rares ethnies, primitives et isolées ont des pressions artérielles tellement basses qu’on est tenté de croire qu’elles en sont épargnées : aborigènes d’Australie, de Nouvelle-Guinée, des îles du Pacifique ; pygmées d’Afrique Centrale ; tribus nomades d’Afrique de l’Est. On ignore pourquoi la pression artérielle de ces sujets ne s’élève pas avec l’âge.
Les outils classiques d’aide à la décision
Méthodes statistiques
Elles sont légions mais on peut en citer deux.
Méthodes d’analyse discriminante
Mathématiquement, le problème revient à chercher s’il est possible, dans l’espace à p dimensions, de séparer deux nuages de points correspondant aux deux groupes de malades d’un service. En calculant une « fonction discriminante », on teste cette fonction sur un nouvel échantillon de sujets. Si la discrimination est satisfaisante pour cet échantillon test, la méthode peut être considérée comme valide.
Exemple :
On part d’un échantillon de malades connus, appartenant les uns au groupe des ictères chirurgicaux, les autres au groupe des ictères médicaux. Sur chacun des malades, un certain nombre de signes et symptômes ont été recueillis (données d’interrogatoire, examen clinique, examens de laboratoire). Ainsi, pour chaque malade dispose-t-on :
a). de la variable du groupe Y (Y = 0 : ictère chirurgical, Y = 1 : ictère médical) ou variable à expliquer et,
b). d’un ensemble de variables explicatives Xi (i = 1 à p) qui représentent les signes recueillis.
Méthodes de régressions
Ici, au lieu d’être qualitative, la variable Y à expliquer est quantitative (exemple : durée de survie). La technique relève alors des méthodes de régressions. Sur un échantillon d’apprentissage, on bâtit une fonction de régression Y = f (X1) ; on la valide ensuite sur un échantillon test. Après quoi, on peut l’appliquer à de nouveaux sujets pour lesquels on prédit Y à partir des Xi mesurés.
Méthodes algébriques
i). L’algèbre de Boole
Celle-ci concerne les variables qui ne peuvent prendre que 2 états. Exemple : la variable splénomégalie est absente ou présente. En algèbre de Boule, on peut définir un certain nombre d’opérations :
• complémentation
Sp : Présence de splénomégalie
Sp : Absence de splénomégalie
• somme logique (fonction ou)
Si ER = éruption de la rougeole
EX = exanthème
K = signe de Köplick
On peut écrire : ER = EX + K
Ce qui signifie que l’on peut parler d’éruption de la rougeole si l’exanthème et le signe de Köplick sont présents, soit ensemble, soit séparément. Pour que ER soit vrai, il suffit que l’une des 2 variables EX et K soit vraie.
• Produit logique (fonction Et)
Exemple :
Syndrome néphrotique (SN) = protéinurie (P) ET hypoproteinémie (H)
SN = P x H
SN n’est vrai que si P et H sont vrais simultanément.
INTRODUCTION |