Dualité non-commutative de Gelfand-Naimark

Depuis la création de la Mécanique Quantique au début des années 20 jusqu’à aujourd’hui, la théorie des Algèbres d’Opérateurs et ses extensions, parmi lesquelles la Géométrie Non Commutative, ont toujours eu de rôles importants dans la compréhension des nouvelles théories de la Physique Quantique. La Géométrie Non Commutative, lancée par le mathématicien Alain Connes en 1980, porte sur la description des constructions géométriques à partir des algèbres d’opérateurs, et a pour idée centrale la dualité de Gelfand-Naimark [3,27,31,32]. En 1943, Gelfand et Naimark montrent comment définir une espace topologique à partir d’une algèbre et vice versa. Au début, cela concernait essentiellement les espaces Hausdorff (localement) compacts et leurs duales algébriques appelées C*-algèbres commutatives à (sans) élément unité; cette correspondance s’appelle dualité de Gelfand-Naimark. Cette dualité est entre la C*-algèbre commutative A et son espace de structure ∆(A) qui est l’espace des représentations irréductibles de A [3].

D’un point de vue physique, C(X) peut être vue comme algèbre d’observables classiques sur l’espace d’états X, le premier théorème traduit donc une dualité entre catégorie d’algèbres des observables classiques et catégorie d’espaces des états classiques. Alors, il est naturel de se demander ce qui se passe si on remplace la C*-algèbre commutative par une C*-algèbre arbitraire (c à d non-commutative en général); en d’autres termes, quel est le concept mathématique généralisant l’espace de structure pour une C*-algèbre. Un des meilleurs candidats est la K-théorie. Comme on le sait, on peut étudier les espaces topologiques à partir de leurs invariants topologiques, c’est à dire des ensembles algébriques isomorphes pour des espaces équivalents par homotopie, grâce aux théories (co)homologiques ; cette étude s’appelle la topologie algébrique . La K-théorie sur la catégorie cHaus, est une théorie cohomologique appelée K-théorie topologique,  et grâce au théorème de Serre-Swan, on peut naturellement définir une théorie appelée K-théorie algébrique sur la catégorie duale c1C*Alg. On peut même la définir sur C*Alg ; cette généralisation s’appelle K-théorie C*-algébrique .

Sans négliger l’importance mathématique de la dualité de Gelfand-Naimark, cette dernière a également des applications physiques importantes, comme en théorie classique de Jauge ou dans la construction d’un espace de spineurs sur une variété espace-temps. La théorie de Jauge est une théorie physique ayant comme objet la description des forces responsables des interactions des particules. La force est représentée par un champ appelé potentiel de jauge et est introduite dans le Lagrangien de manière à ce que ce dernier soit invariant sous une transformation appelée transformation de jauge [21]. Pour décrire mathématiquement la théorie de jauge, on utilise la théorie des fibrés principaux, ‘voisins’ des fibrés vectoriels [18,22]. Ainsi, potentiel de jauge, transformation de jauge et champ de matière ont leurs concepts associés dans cette théorie mathématique.

Dualité non-commutative de Gelfand-Naimark

Théorèmes de Gelfand-Naimark

Algèbre des observables et espace d’états

D’une manière générale, on appelle observable O d’un système physique une fonction définie sur l’espace des états Σ du système et qui donne une propriété physique de ces états telles que la position, la vitesse ou la charge [2]. Dans le cas d’un système physique classique d’espace d’états M, les observables du système sont les fonctions complexes sur M et forment un ensemble notons C(M) ; la propriété physique décrite par f∈C(M) d’un état q∈M est donnée par la valeur f(q) appelée spectre de f. Lorsqu’on munit M d’une topologie particulière, on obtient un résultat important appelé dualité de Gelfand-Naimark : (la topologie de) l’espace de configuration M est complètement déterminé par l’ensemble C(M) des observables. Dans le cas d’un système quantique d’espace d’états H, les observables sont les opérateurs sur H, formant un ensemble notons B(H), et les propriétés décrites par un opérateur O sont données par ses ‘valeurs propres’, appelées spectres de O également. Lorsqu’on munit H d’une structure d’espace de Hilbert, on n’obtient rien d’intéressant, à part que B(H) peut être défini de façon à ce que C(M) et B(H) aient la même structure algébrique appelée structure C*-algébrique.

Premier théorème de Gelfand-Naimark

Le premier théorème de Gelfand-Naimark a été trouvé en 1943. Il établit une dualité entre la topologie de Hausdorff et la C*-algèbre commutative. Ce théorème permet de construire un espace de configuration classique à partir de son algèbre d’observables classiques et vice versa.

Enoncé du théorème : Toute C*-algèbre commutative à élément unité est *-isomorphe à C(X) pour un espace compact Hausdorff X.

Notre démonstration est une version détaillée de :

La démonstration du théorème utilise essentiellement le fait que ∆(A) est un espace Hausdorff compact et qu’il existe une fonction, appelée transformée de Gelfand tg, de la C*-algèbre A vers C(∆(A)) où ∆(A) est l’espace des caractères de A (ou espace de structure) ; un caractère sur A est un homomorphisme non nul d’algèbres de A vers C. Ensuite, on montre que tg est un isomorphisme d’algèbres ce qui signifie que ∆(A) est la topologie associée à l’algèbre A.

Dans toute la démonstration, A est une C*-algèbre commutative à élément unité.

Commençons donc par le lemme suivant :
Lemme 1. Soit ∆(A) l’espace des caractères de A, alors ∆(A) est un espace Hausdorff compact.

Démonstration du lemme 1:
Définissons une topologie sur ∆(A) le rendant Hausdorff compact. Soit Gt la topologie dite de Gelfand définie comme étant la topologie la plus fine rendant toute fonction tg(a) : ∆(A)∋ωa tg(a)(ω) := ω(a)∈C , continue ∀a∈A . Donc (tg(a))⁻¹(O)⊂ ∆(A) est un ouvert de (∆(A),Gt) ∀O ouvert de C , et {(tg(a))⁻¹(O) / a∈A, O ouvert de C} génère la topologie Gt.

Construction de Gelfand-Naimark-Segal

La construction de Gelfand-Naimark-Segal est à la base de la construction des états quantiques à partir de l’état de vide en théorie quantique des champs. De cette construction, on constate que l’état de vide est analogue à la notion de vecteur cyclique Ω d’un espace de Hilbert H et que les opérateurs de création et d’annihilation sont représentés par des opérateurs de B(H).

Table des matières

Introduction
1. Dualité non-commutative de Gelfand-Naimark
1.1. Théorèmes de Gelfand-Naimark
1.1.1. Algèbres d’observables et espace d’états
1.1.2. Premier théorème de Gelfand-Naimark
1.1.3. Construction de Gelfand-Naimark-Segal
1.2. Théorème de Serre-Swan
1.2.1. Structure de module projectif généré fini
1.2.2. Structure de fibré vectoriel
1.2.3. Théorème de Serre-Swan
1.3. K-théorie C*-algèbrique
1.3.1. Catégorie C* et équivalence de Morita
1.3.2. Espace des représentations irréductibles
1.3.3. K-théorie C*-algébrique
2. Applications en Théorie de jauge et Structure de Spinc
2.1. Théorie Classique de Jauge
2.1.1. Origine de la théorie de Jauge
2.1.2. Fibré principal et transformations de jauge
2.1.3. Suites courtes exactes et connexions
2.2. Structure de Spinc
2.2.1. Algèbres de Clifford
2.2.2. Espace de spineurs et Structure de Spinc
Conclusion
A. Théorie spectrale pour les C*-algèbres
B. Catégories et foncteurs
C. Topologies et variétés différentiables
D. Modules et fibrés vectoriels
Bibliographie

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