L’internationalisation de l’enseignement supérieur européen
L’internationalisation devint un thème clef dans les années quatre-vingt-dix, aussi bien dans les débats politiques sur lenseignement supérieur que dans la recherche. Le processus est accompagné d’une politique européenne qui semble favoriser une dénationalisation de l’enseignement supérieur, une augmentation de la responsabilité des établissements et une popularité accrue du managérialisme. En regardant de plus près la mise en place complexe et dynamique de l’internationalisation au sein de l’enseignement supérieur européen, on constate bien plus qu’une simple diversification des activités transfrontalières en hausse. En effet, on remarque essentiellement des changements substantiels vers des politiques systématiques et une conscience croissante de la concurrence et de la coopération internationale sur un marché de l’enseignement supérieur de plus en plus mondial.
Trois développements majeurs se sont produits dans les systèmes d’enseignement supérieur en Europe au cours des deux dernières décennies : L’internationalisation de l’enseignement supérieur européen Nadine Rombert Trigo– « Utopie et dystopie dans l’internationalisation de l’enseignement européen » ‐ Université du Sud Toulon‐Var – 2009 122 Tout d’abord, les établissements d’enseignement supérieur, et plus spécialement les systèmes d’enseignement supérieur au niveau institutionnel, sont devenus des acteurs importants. Nous pouvons remarquer plusieurs initiatives et des débats sur la gestion institutionnelle dans l’enseignement supérieur, l’évaluation institutionnelle, le financement des universités et d’autres outils apparentés pour une adaptation des institutions aux environnements changeants.
Ensuite, nous observons divers changements, que l’on peut regrouper sous l’expression « internationalisation » de l’enseignement supérieur. Deux différents types de phénomènes sont fréquemment mentionnés dans ce contexte : d’une part, une croissance des opérations et de la coopération transfrontalière d’une particulière visibilité, comme la mobilité du personnel enseignant et des étudiants, l’enseignement des langues étrangère ou les activités coopératives de recherche ; d’autre part, une tendance à l’internationalisation, à la régionalisation ou à la mondialisation ou des structures de l’enseignement supérieur, par exemple, la convergence des systèmes en ce qui concerne les modèles institutionnels, les programmes d’études ou les cursus.
Enfin, ces développements – sur les niveaux institutionnel et international de l’enseignement supérieur – semblent tous deux refléter et contribuer à un relâchement des liens traditionnels entre l’université et l’État-nation que certains peuvent accueillir comme la nouvelle liberté des universités, alors que d’autres considèreront l’université dans ce contexte comme l’ultime frontière du capitalisme. Ainsi, la restructuration de l’État-nation et l’émergence de l’internationalisation fonctionnent en parallèle dans la réforme et la transformation des universités. Un document préparé pour la réunion de Salamanque entre les recteurs européens et les gestionnaires internationaux chargés de l’enseignement supérieur illustre cette nouvelle «religion séculaire» de l’autonomie institutionnelle utilisée pour donner pleins pouvoirs aux universités dans un ordre mondial concurrentiel : « Les universités ont besoin d’être autonomes – et elles le souhaitent. Dans plusieurs pays d’Europe, la surréglementation empêche l’innovation et le progrès et constitue un sérieux handicap dans l’environnement mondial et européen. Les universités demandent le pouvoir de planifier leur propre futur, en trouvant un juste équilibre entre l’autonomie et la responsabilité entre la diversité et l’organisation ».