Evolution de la migration au Sénégal
La migration ne date pas d’aujourd’hui. Depuis toujours l’humanité a migré à la recherche de conditions de vie meilleure. Pendant la colonisation, elle était organisée par l’administration coloniale. Il s’agissait d’une immigration de travail en l’occurrence de travail forcé. Ce type de migration a entraîné l’implantation de communautés transnationales dans tous les pays d’Afrique et en particulier dans les colonies de l’ancienne AOF. Après une immigration « forcée », on est passé à une immigration volontaire. Cependant, même dans le cas de l’immigration volontaire, la principale raison d’immigrer est la recherche de travail.
L’immigration soninkée pour exemple est ancienne, elle remonte aux années 50 et est essentiellement une immigration de travail. (Timera 1996). Le processus migratoire est considéré dans cette ethnie comme un rite de passage ou une étape importante dans le cursus individuelle. (Fall 2007). Les émigrés détiennent le pouvoir économique et sont les principaux acteurs de la reproduction des communautés villageoises. D’abord concentrée sur la vallée du fleuve Sénégal, la migration s’est intensifié dans tous le pays du essentiellement au contexte économique morose. La migration est un moyen pour les migrants et leur famille de s’en sortir. Malgré les différents plans d’ajustement structurel, l’Etat n’a pas réussi à résorber les crises que traverse la société sénégalaise qui est marquée par une crise de l’emploi, de l’éducation, énergétique etc.
Cette crise multisectorielle pousse de plus en plus de jeunes à tenter l’ émigration. 20 Même si on assiste à une féminisation des migrants, les migrants sont pour la plupart de sexe masculin (84%), sont âgés de moins de 35 ans (71,7%), célibataires à 46%, d’ethnie Wolof et installés pur la plupart en Europe 5 . Les destinations privilégiés des émigrés sénégalais sont l’Europe/Etats-Unis/ Canada à 53,5% et les autres pays africains à 30%.(ESAM II) Aujourd’hui on assiste à un changement de destination des émigrés. De plus en plus d’émigrés se tournent désormais vers l’Espagne et l’Italie. Dans une ville comme Kébémer l’essentiel des migrants se trouvent en Italie. Dans un village non loin de Kébémer ; Tobi la plupart des migrants vont en Italie et leur principale ville de destination est Pise. Il existe aussi de véritables réseaux qui permettent aux jeunes de partir en Italie.
Migration et développement.
De nombreuses études ont porté sur le rapport entre migration et développement. Dans ce contexte, la migration apparaît comme une solution pour échapper au chômage et à la pauvreté mais elle contribue aussi au développement de la région d’origine. Les émigrés sont perçus comme des acteurs de développement ou de co-développement ou encore comme des promoteurs de projets économiques et sociaux (Congrès International de la Population Tours 2005). D’après le groupe de recherche et de réalisations pour le Développement rural 6dans les pays du tiers-monde depuis les années 70 dans le bassin du fleuve Sénégal les relations entre migrants et villageois ont beaucoup changé notamment à la suite de sécheresses qui ont changé les fonctions de la migration. Depuis cette période celui-ci constitue une solution extérieure pour résoudre des problèmes internes.
La raison du départ est celle d’aider les familles restées au village ou en ville. Au Sénégal, 41,7% des émigrés envoient très régulièrement de l’argent à leur famille et 30% irrégulièrement (ESAM 2 2004) « Les transferts financiers sont d’autant plus significatifs que la dévaluation du FCFA intervenue en janvier 1994 a contribué à les rendre encore plus importantes ». (Fall 2003). Dans les régions à fort solde migratoire comme la vallée du fleuve Sénégal les transferts financiers constituent la principale source de revenu. « En 1991, les transferts des immigrés 5 5Direction de la prévision et de la statistique, Rapport de synthèse de la 2′ enquête sénégalaise des ménages (ESAM2) ,2004. 6 http://www.hcci.gouv.fr/lecture/note/n1087.html 21 au Sénégal étaient estimés par l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économique) à 652 millions de FCFA soit la moitié de l’aide publique française pour le pays estimée à 1200 millions de FCFA ».
Ils permettent de faire face à la crise alimentaire. « On assiste à un développement urbain dans les quartiers d’origine du migrant dans les banlieues. La dépendance aux revenus de la migration accélère la désaffection de l’agriculture ». (Fall 2003). L’essentiel des dépenses des migrants sont tournés vers les dépenses d’entretiens les autres sont investis dans l’immobilier et les investissements communautaires. La manne émigrée représente dans certains villages de la région de Louga 90 % des revenus des ménages (TALL S.M. : 2001 in Fall 2003). Elle constitue un des éléments régulateurs de la crise et un des facteurs de réduction de la pauvreté. Les fonds des émigrés constituent dans beaucoup de zones le principal apport financier de beaucoup de familles (Fa112003) Le rapport de la Banque de France de 1998 estime à près de 60 milliards les rapatriements financiers des Sénégalais de l’Extérieur. Une étude du GRDR de 1999 estime les transferts des émigrés vers le pays d’origine à 65 milliards de francs CFA pour le Sénégal et 76 millions de $ pour le Mali. Babou (2000) évalue après un recoupement des instruments de transfert du n° 1225 Broadway (Kara, Touba M’Backé Trading et Lamp Fall) les transferts des migrants d de New York vers le Sénégal à 20 000 000 $ par an.