Nombreux sont les pays qui s’intéressent de plus en plus à la recherche de l’équité entre les générations successives et la maîtrise de sa dette publique. Ces pays sont surtout des pays qui ont déjà atteint un certain niveau de développement, en particulier les pays de l’Europe et les Etats-Unis. Nombreuses sont les raisons qui les poussent à cette recherche mais la plus fondamentale est l’existence d’un déséquilibre entre les générations présentes et les générations futures du fait d’un gonflement de la dette publique.
Les autorités, parallèlement aux théoriciens, ont été conscientes de ces problèmes. Ils se demandent d’où vient ce déséquilibre et quelle est sa nature. Il y a un déséquilibre intergénérationnel quand le paiement net dû des générations futures et les générations présentes sont inégaux. L’endettement ou les engagements financiers de l’Etat constituent la cause principale des paiements nets des générations et le gonflement de la dette publique constitue une lourde charge fiscale future. Est-il nécessaire alors de recourir à l’endettement ? Quels sont les enjeux de l’endettement public ? Nous verrons dans le premier chapitre les réponses à ces questions.
Depuis ces derniers temps, les économistes commencent à s’intéresser de plus en plus aux relations qui se posent entre les générations à cause de ce problème de déséquilibre intergénérationnel. Un de ces économistes contemporains, célèbre dans ce domaine, est André MASSON. Il a publié beaucoup d’articles concernant ces relations intergénérationnelles. Il a développé les différentes problématiques de ces relations ainsi que ses solutions.
Les causes de l’endettement
Etalement du fardeau fiscale lié à certains chocs
Le but du recours à l’emprunt est de lutter contre une chute brusque du niveau de revenu des agents du secteur privé face aux chocs. Cet argument a entre autres été développé par Barro (1974 et 1979). Si l’Etat choisit de relever l’impôt face aux chocs, le revenu des agents se heurtait à une chute brusque, ce qui va provoquer une conséquence néfaste sur l’économie. Alors, le recours à l’emprunt est donc un moyen d’étaler les charges fiscales lourdes car d’après Barro, le remboursement de cet emprunt ne sera faite que par un prélèvement obligatoire supplémentaire ultérieur.
Présentation de la contrainte budgétaire intertemporelle de la Nation
Comme les ménages, l’Etat doit gérer son budget. La contrainte budgétaire de la nation définit par Ch Bialès dans son article intitulé « Choix intertemporelle et équivalence ricardienne » est donnée par la relation suivante :
C1 + C2 (1+r)⁻¹ = [R1 + R2 (1+r)⁻¹] – [G1 + G2 (1+r)⁻¹]
Valeur actuelle de la richesse du secteur privé = valeur actuelle des dotations privées – valeur actuelle des dépenses publiques.
C1 et C2 : consommations des agents privés dans les périodes 1 et 2
R1 et R2 : dotations des agents privés dans les périodes 1 et 2
r : taux d’actualisation
G1 et G2 : les dépenses publiques effectuées dans les deux périodes.
Cette relation signifie que les dépenses publiques dans les deux périodes ne sont qu’une partie des revenus des agents privés recouvrée par des prélèvements obligatoires. Dans le cas où il y a un choc sur l’économie, le financement du déficit de l’Etat ne doit pas être par une hausse brusque de l’impôt car cela influe fortement le revenu des agents. Alors, pour maintenir une stabilité du revenu des agents l’Etat va recourir à l’endettement pour le financement de son déficit ; et le remboursement sera faite par l’étalement du fardeau fiscal dans le temps.
Stimulation de l’économie dans une situation où il y a des problèmes macroéconomiques
L’Etat doit stimuler l’économie en période de récession. Keynes a initié cette idée dans sa théorie de lutte contre le chômage.
Le multiplicateur budgétaire
Le multiplicateur est une mesure de l’ampleur des variations du revenu, c’est le rapport entre une variation du revenu national et la variation des dépenses qui lui a donné naissance. Pour Keynes, une dépense publique effectuée produit un effet multiplicateur du revenu national qui permettra de relancer l’économie. Une hausse de dépense publique permettra une hausse de consommation des agents privés qui agit à son tour sur la demande effective et cette dernière crée un investissement dans les entreprises qui permettra une hausse du revenu national.
L’endettement public est utile et nécessaire pour les politiques contracycliques de l’Etat du moins pour période de récession. Dans cette période, l’Etat doit jouer le rôle de stabilisateur. Il devra alors augmenter son déficit budgétaire afin de relancer l’économie. Cette période exige une dépense publique plus élevée que les recettes des impôts. L’Etat doit donc recourir à l’endettement pour satisfaire cet énorme besoin de financement du déficit budgétaire afin de relancer l’économie. Keynes a défini la politique de « stop and go » pour illustrer cette idée. L’Etat doit adopter la politique de « stop » en période marquée par l’inflation et la politique de « go » dans une période de sous – emploi marquée par une forte inflation. Il est question d’amorcer la pompe.
Principe de bénéfice intergénérationnelle
Cette idée a été initiée par Boadway 2004. Ici, l’objectif de l’Etat est d’entretenir une bonne et meilleure allocation des ressources dues au recours à l’endettement en finançant des investissements qu’il juge rentable. A long terme, les bénéfices de ces investissements seront perçus par les héritiers contribuables. Les principales dépenses qui peuvent justifier le recours à une telle politique d’endettement public sont les dépenses d’investissement en capital physique (ou immobilisations). Une dépense d’investissement sert à acquérir un actif qui aura une vie utile qu’il est généralement possible d’estimer ex-ante ; il est alors justifié d’étaler sur une certaine période la charge fiscale liée à cet investissement. Certains auteurs sont d’avis que la définition du concept d’investissement public devrait être élargie pour inclure d’autres dépenses que celles qui sont liées à l’acquisition de capital fixe, par exemple, dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Les dépenses liées à la protection de l’environnement pourraient également entrer dans la catégorie des investissements publics.
La redistribution de la richesse entre les générations
Le recours à l’endettement public peut enfin se justifier par des considérations de transfert entre les générations ou d’équité intergénérationnelle. Pour plusieurs économistes, il s’agit même de l’essence du recours à la dette publique (Scarth 2004 ; Boadway 2004). En effet, la dette publique permet à des générations qui ne sont pas nécessairement contemporaines de procéder à des transferts entre elles (les dépenses de santé et les pensions de vieillesse en sont des exemples), qui peuvent s’avérer nécessaires et efficaces. Cette idée a notamment été élaborée par Diamond (1965). Si cette dernière justification de la dette publique occupe une place centrale dans la littérature économique, force est toutefois de reconnaître qu’elle n’est pratiquement jamais invoquée par les gouvernements lorsque vient le temps de motiver le recours à l’endettement pour financer de nouvelles dépenses.
Les problèmes de l’endettement
Dans le cas où l’Etat décide de financer son déficit par l’impôt, cela présente une limite car la hausse brusque de l’impôt va influencer sur le revenu des agents privés. Cette hausse d’impôt aura par l’effet d’éviction une conséquence néfaste sur l’activité économique privée. De la même façon, le recours à l’endettement public comme mode de financement du déficit présente aussi des limites car, il se heurte à des problèmes occasionnés par une dette publique trop élevée.
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