Un camion militaire chargé d’une cinquantaine de rondins de bois de rose a été intercepté, le 18 décembre 2010, par les forces de l’ordre de Fort-dauphin, Commune Manantenina, (anonyme, 2011), prise de 56 rondins de bois de rose dans le district de Vangaindrano le 17décembre 2010 (anonyme, 2011), embarquement de 100 conteneurs empêché au port de Vohémar le 12 Novembre 2010 (anonyme, 2011), trafic de bois de rose à Mahajanga où plus de 90 containers ont été exportés en catimini le mois de novembre dernier, (anonyme, 2010a)… Ces faits tirés d’articles de presses et sur internet attestent que le bois de rose Malgache fait l’objet d’une exploitation illicite importante en accroissement continu. Certains auteurs, Organisations Non Gouvernementales (ONG) et institutions parlent même de « pillage des ressources » à travers leurs communiqués : Communiqué des ONG Environnementales à Madagascar du 27 mars 2009 et communiqué de International Community and conservation partners resident in Madagascar en juin 2009 .
Le bois de rose, un produit rare et de grande valeur, présentant d’énormes enjeux économiques tant à l’échelle local, régional, national et surtout au niveau international, car générant des flux financiers considérables, est devenu un produit très recherché sur le marché international, mais aussi un produit interdit d’exploitation selon les textes en vigueur à Madagascar, et figure parmi les produits inscrits dans la liste de la CITES (anonyme, 2010b). Ces deux faits apparaissent contradictoires : comment répondre à une demande croissante en bois de rose tout en interdisant l’exploitation ? C’est impossible mais résume notre problématique dans la mesure où elle est significative de deux logiques, la première liée à la conservation des écosystèmes et défendue par les ONG internationales et l’Etat, et la deuxième où on retrouve une alliance objective entre des collecteurs – bûcherons pauvres et des commerçants pour qui il importe d’approvisionner des marchés, le plus souvent internationaux. Cette filière constitue l’objet de la recherche intitulée « La filière bois de rose dans la presqu’île de Masoala : entre contraintes environnementales et réalités locales, quel diagnostic 1990-2010 ». Une période où une forte recrudescence de l’exploitation des produits bois de rose a été observée. Mais pourquoi y a-t-il une recrudescence de l’exploitation illicite de bois de rose malgré les efforts de conservation réalisés et le statut d’AP? Les méthodologies d’analyse reposent sur l’analyse de la gouvernance des ressources et l’analyse des filières. Les résultats se subdivise en trois chapitres: les défaillances administratives à l’origine de la recrudescence de l’exploitation illicite de bois de rose suivi du chapitre portant sur la filière vanille et recrudescence de l’exploitation illicite de bois de rose terminé par le dernier chapitre, bénéfices issus de l’exploitation de la filière bois de rose.
HISTORIQUE DE LA RECHERCHE : SERIES CHRONOLOGIQUES DES EVENEMENTS MARQUANTS DE L’EXPLOITATION DE LA FILIERE BOIS PRECIEUX A MADAGASCAR
HISTORIQUE DE L’EXPLOITATION DES BOIS PRECIEUX DANS LA REGION
Presque toutes les exploitations de bois précieux dans la région SAVA ont pris fin en 2000. 45 exploitants possédant en moyenne 145ha chacun, ont été recensés dans la région.
Les lots d’exploitation appartiennent aux forêts s’étendant sur une superficie de 110 000 Ha, hors AP. La densité des individus de bois de rose était de 5 pieds à l’hectare. De 1980-1995, le principal produit exploité était le bois d’ébène. Mais à partir de 1995, le bois de rose commence à prendre de l’importance, en termes de demande. C’est le début de la recrudescence des pressions sur les AP, selon le responsable du MNP Masoala. Actuellement, des centaines de villageois coupent des bois de rose (RANDRIAMALALA et al, 2010).
ANNEE 2000 : SUSPENSION DE LA DELIVRANCE DU PERMIS D’EXPLOITATION
Le 30 octobre 2000, un arrêté interministériel interdisait l’octroi de nouveaux permis d’exploitation et d’exportation des bois précieux (bois de rose et bois d’ébène) pour une durée de trois ans. L’objectif était l’assainissement de la filière. Mais, les permis en cours restaient en vigueur, selon l’article 18 du contrat d’exploitation. Seuls 13 exploitants ont donc pu continuer leurs activités d’exploitation. En 2006, toutes les activités d’exploitation ont cessées, date correspondant à l’expiration de la validité des permis d’exploitation restants, et à laquelle l’administration a suspendu toutes activités afférentes au bois précieux. La réforme adoptée par le Ministère dans le cadre de l’assainissement consistait à la mise en place du système d’adjudication pour la délivrance de permis d’exploitation, en remplacement au système de gré à gré, et où les arguments essentiels évoqués sont la transparence dans la gestion des ressources, l’ajustement des politiques de gestion des ressources, en conformité avec la politique de réforme mondial (soutenu par les bailleurs) et la bonne gouvernance. Cependant, les exploitants dénoncent une manipulation de l’Etat à travers cette décision. En somme, la suspension des activités d’exploitation a fortement influencée l’économie locale, où une partie de la population vivant des activités d’exploitation, notamment les bûcherons et les exploitants, privés de leurs sources de revenus, ont éprouvés des difficultés financières.
ANNEE 2000 : CYCLONE HUDAH ET AUTORISATION DE RAMASSAGE
Suite au passage du cyclone HUDAH, en 2000, les régions d’Antalaha et de Cap Est ont été sévèrement touchées. Les diverses activités professionnelles ont été vivement ralenties par les dégâts causés aux cultures et aux forêts. Pour aider les populations locales, une dérogation spéciale, relative à l’autorisation d’exportation des bois précieux, à partir de ramassage de bois abattus dans les forêts touchées par le cyclone, a été accordée à 13 opérateurs. La dérogation concernait l’évacuation de 10 000T de Bois de rose sous forme brute. Mais il semblerait que des dérogations supplémentaires aient été octroyées à certains exploitants et exportateurs (STASSE, 2002). C’est alors que l’exploitation du Bois de rose s’est fortement intensifiée (STASSE, 2002).
La date butoir à laquelle tous les bois devaient être transférés à Tamatave était le 30 juin 2001. Or à cette date, 2500 tonnes seulement ont été transférées vers Tamatave. Il reste donc officiellement des stocks. Cependant, des transports de Bois de rose se poursuivaient, en direction de Tamatave (STASSE, 2002). A titre d’exemple, en 2001, sur 5000T de bois de rose destinés à l’exportation, près de 4/5 ont été frappés d’illégalité. C’est alors que des questions se posent: que vont devenir ces bois? Selon les textes en vigueur, ils doivent être saisis. Ces dérogations ont été une solution temporaire pour les populations. Mais elles ne constituent pas une solution satisfaisante à long terme (STASSE, 2002). Elles ont permis de valoriser des bois menacés de pourrir, mais n’ont pas favorisé la mise en place de structures permettant la création de valeur ajoutée (STASSE, 2002). Les emplois créés sont temporaires (STASSE, 2002).
ANNEE 2004 : CYCLONE GAFFILO ET AUTORISATION DE COLLECTE
En 2004, Madagascar a été de nouveau frappé par des cyclones : Elita et Gafilo. Ces cataclysmes ont fortement éprouvé la population mais également la nature, notamment les zones forestières de SAVA. Le 28 octobre 2004, le gouvernement a promulgué un arrêté ministériel (n°17939/2004, du 21 septembre 2004 stipule dans son article premier que » sont autorisés à l’exportation, les produits principaux de forêts d’essence de 2e, 3e, 4e et 5e catégories sous forme de bois semi travaillé ou travaillé”, autorisant 18 opérateurs à collecter, commercialiser et exporter les bois cyclonés. L’autorisation de collecte prend fin officiellement le 30 mars 2005.
INTRODUCTION |