L’acceptation des innovations et le changement dans les organisations

L’acceptation des innovations et le changement dans les organisations

Les innovations et leur propagation dans un système social

Les modèles de diffusion et d’adoption des innovations ont permis de clarifier la notion d’innovation, et la manière dont les innovations se propagent dans un système social.

L’innovation

Même si les deux concepts sont souvent utilisés de manière indistincte, il existe une différence entre innovation et invention (Alter 2015a) : l’invention correspond à la conception d’éléments en rupture avec ce qui existe, tandis que l’innovation correspond à la modification, la mise sur le marché et l’intégration des inventions par des acteurs (Schumpeter 1999). D’après l’organisation internationale de la standardisation (ISO), l’innovation est « un processus ou un produit nouveau ou amélioré qui se différencie de manière significative des précédents produits et processus qui étaient jusque-là disponibles aux utilisateurs » (ISO 2019). L’innovation est donc caractérisée par la disponibilité, perception, et mise en œuvre d’une invention par des acteurs (Rogers 2003). Le BIM correspond à cette définition, il s’agit d’une innovation. L’histoire de la recherche sur la diffusion des innovations compte des théories complémentaires. Nous évoquerons ici principalement les travaux de Joseph Schumpeter et la théorie de la diffusion des innovations (TDI) d’Everett Rogers (Rogers 2003). Ces modèles décrivent de manière simplifiée la manière dont les innovations se propagent dans un système social. On distingue les innovations incrémentales (qui constituent une amélioration continue) des innovations radicales (qui explorent de nouveaux domaines). Ce qui caractérise une innovation dépend également de son domaine d’application (Schumpeter 1999). On distingue ainsi différentes formes d’innovation comme les innovations de produit (l’introduction d’un nouveau produit), de commercialisation (l’ouverture de nouveaux marchés comme la location de particulier à particulier), d’approvisionnement (développement et découverte et exploitation de nouvelles sources d’approvisionnement), de marché (la création de nouvelles structures de marché comme l’ubérisation) et les innovations organisationnelles (l’introduction de nouvelles méthodes de production). D’après les différentes formes d’innovations évoquées par Schumpeter (1999), on peut assimiler le BIM à la fois à une innovation organisationnelle (développement de nouvelles méthodes de travail, application de l’ingénierie concourante), et une innovation de produit (introduction de nouveaux logiciels). Sa diffusion a également engendré des innovations de commercialisation (ouverture de services nouveaux comme les services plateformes BIM), et de marché (développement de nouvelles missions et nouveaux services comme le BIM management). Les 78 innovations surviennent rarement seules, elles s’engendrent les unes les autres, formant ainsi des grappes de façon cyclique.

Théorie de la diffusion des innovations

Dans les années 1960, Everett Rogers, sociologue américain, publie Diffusion of Innovation, un ouvrage fondateur sur l’étude des innovations et leur diffusion. Il s’agit d’un travail précurseur et d’une synthèse conséquente sur l’adoption des innovations. Il y étudie et modélise les phénomènes qui influencent la manière dont une innovation se diffuse dans une population donnée (Rogers 2003). La théorie de la Diffusion des Innovations (TDI) proposée par Rogers a fait l’objet de nombreux compléments, critiques et améliorations.

La diffusion de l’innovation dépend de différents facteurs

Le processus de diffusion d’une innovation correspond à l’acceptation, l’acquisition et le déploiement au cours du temps de certains produits, idées ou pratiques par des individus, groupes d’individus ou autres unités d’adoption, dans un système social donné avec un système de valeurs et une culture donnés (Katz, Levin, Hamilton 1963; Fichman, Kemerer 1999; Rogers 2003). La TDI a été réexplorée au cours des années 80-90 pour décrire (et essayer de prédire) la diffusion des technologies de l’information et de la communication. D’après Rogers, le taux d’adoption, c’est-à-dire « la vitesse à laquelle une innovation est adoptée par les membres d’un système social » peut être expliqué par : • l’avantage relatif (relative advantage) : l’avantage que l’adoption de l’innovation donne subjectivement à un acteur par rapport aux autres. Cet avantage peut être d’ordre économique, mais il peut également prendre d’autres formes comme un prestige social. • la compatibilité (compatibility) : le degré de compatibilité de l’innovation avec les valeurs existantes de l’adoptant et de ses expériences passées ainsi que la compatibilité aux normes du système social auquel appartient l’adoptant. • la complexité (complexity) : la difficulté subjective des individus à comprendre et utiliser une innovation. • la testabilité (trialability) : le degré de possibilité de tester une innovation. D’après Rogers, les innovations qui peuvent être essayées sont généralement adoptées plus facilement. • l’observabilité (observability) : degré de visibilité des résultats que produit une innovation au sein d’une population donnée. Cette théorie accorde une grande importance à la capacité d’analyse de la situation de la part des adoptants et envisage la diffusion de l’innovation comme le fruit d’une démarche rationnelle (Lyytinen, Damsgaard 2001). Cependant, des travaux postérieurs à la TDI ont montré que des considérations plus personnelles (et non rationnelles) peuvent également influencer la décision des adoptants.

Le processus de décision et d’adoption d’une innovation

D’après Rogers, le processus d’adoption d’une innovation est très lié au processus de décision qui y est associé. Ainsi, il présente le processus d’adoption et de décision que suivent les individus (ou les organisations) lorsqu’ils sont confrontés à une innovation, en cinq phases (Figure 16): 1. Connaissance : lorsqu’un individu (ou une unité de décision) est exposé à l’existence d’une innovation et commence à en comprendre le fonctionnement 2. Persuasion : un individu (ou une unité de décision) a une attitude favorable ou défavorable vis-à-vis d’une innovation 3. Décision : un individu (ou une unité de décision) engage une activité qui mène à prendre une décision d’adopter ou de rejeter une innovation 4. Implémentation : l’innovation est déployée par l’individu ou l’organisation 5. Confirmation : un individu (ou une unité de décision) cherche à être conforté dans sa décision d’adopter l’innovation, mais il peut également revenir sur sa décision. Le processus peut être stoppé notamment à la phase de décision, lorsque les individus ou organisations décident d’adopter ou de rejeter l’innovation. Rogers nuance la phase de décision en précisant que la décision d’adopter peut être à effet « immédiat » ou différé.

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