IA et éducation dans le cadre d’Otesia1
Modélisation de l’apprenant·e
L’apprenant·e est modélisé·e à partir de connaissances issues des neurosciences cognitives. Dans ce cadre, on structure les facultés cognitives humaines selon deux dimensions. La première dimension prend en compte les différentes formes d’association entre entrées sensorielles externes ou internes et les réponses à y apporter, des plus simples (schémas sensori-moteurs, comportements liés aux habitudes) aux plus complexes (comportements dirigés par un but, décisions après délibérations ou raisonnements). La deuxième dimension prend en compte le fait que ces associations peuvent être apprises et exécutées pour quatre différentes classes de motivations (pour aider à identifier un ‘objet’ de l’environnement comme but possible du comportement, pour le localiser ou y prêter attention, pour le manipuler ou encore pour définir en quoi il répond à une motivation). Cette modélisation inscrit ces différents concepts au sein de l’architecture cérébrale, permettant de spécifier ainsi le rôle fonctionnel de ces régions (cortex préfrontal, boucles impliquant les ganglions de la base, incluant l’amygdale, en lien avec le thalamus et l’hippocampe). En explicitant les différentes fonctionnalité liées à ces deux dimensions, on rend compte de nombreuses fonctions cognitives, en particulier relatives à la résolution de problèmes. Il s’agit donc d’un cadre de description intéressant car il est structuré, relativement compact et rend compte de ce qui semble s’être développé pour élaborer l’architecture cognitive du cerveau. Figure 1. Ontologie et modèle de données pour l’étude d’une activité d’apprentissage médiatisée par des robots pédagogiques (Romero, Viéville & Heiser, 2021).
Modélisation de la tâche CreaCube
Dans le cadre de l’étude #CreaCube1 , nous visons l’analyse des stratégies de résolution de problèmes avec des cubes de robotique modulaire, inconnus du participant. La tâche consiste à créer un véhicule autonome pouvant se déplacer d’un point A à un point B. Dans ce contexte, le sujet est donc face à un artefact technologique inconnu, et doit comprendre comment assembler ces cubes pour atteindre l’objectif proposé. L’exploration créative devrait faciliter la démarche de résolution de problème. Plus précisément, dans cette tâche, l’exploration créative vise à comprendre l’artefact, ses caractéristiques et ses fonctionnalités, afin de pouvoir manipuler l’artefact en vue de résoudre le problème. 1 Voir https://creamaker.wordpress.com/2019/02/06/publications-within-the-creamaker-project pour tous les détails. Inria Développement d’une ontologie pour l’analyse computationnelle des observables de l’apprenant dans le contexte d’une tâche avec des robots modulaires 11 La tâche est modélisée sur la base des connaissances nécessaires pour la résoudre mais également des états initiaux du matériel et de l’état final pour sa réussite, comme détaillé sur la figure cidessous. Figure 2. Interface pour l’identification d’observables, cette figure décrit une partie des états du système à laquelle s’ajoute par exemple, l’identification de chaque cube (reconnaissable par sa couleur : pile bleue marine, capteur noir, moteur blanc, inverseur rouge) et les états des cubes (par exemple « connecté/déconnecté » ou « sur les roues/pas sur les roues »). Cette sous-partie des états possibles correspond aux observables qui ont été choisis pour observer la tâche d’apprentissage humain. On y voit les différents observables pris en compte, à savoir les configurations possibles des cubes (assemblés d’une manière ou d’une autre, ou pas), la découverte des affordances, c’est à dire des possibilités pratiques offertes par un élément (exemple : il y a un interrupteur, cela peut donc s’allumer), les différents résultats obtenus (par exemple au niveau des mouvements), mais aussi des éléments liés au sujet, comme par exemple ses émotions ou son positionnement (persévérance, abandon) par rapport à la tâche. C’est l’ensemble de ces observables qui va servir de base à la modélisation de la tâche sous forme de connaissances structurées. Le modèle de fichier généré à partir de cette interface a été développé sous un format hiérarchique typé (syntaxe JSON, avec les données brutes et calculées et la description de chaque type d’information et de leurs relations) pour permettre sa manipulation formelle et représenter au mieux la structure des informations collectées, ceci afin de faire le lien avec des représentations de connaissances liées à la notion informatique d’ontologie comme utilisé au niveau de Web sémantique et intégré sous forme de plateforme interactive pour faciliter l’ergonomie de l’analyse manuelle des vidéo (Romero, Viéville & Heiser, in press). Chaque donnée pour la tâche CreaCube, se présente RR N° 9376 .
Résoudre des problèmes : entre exploration et exploitation
Dans des activités de résolution de problèmes, les sujets alternent entre deux principaux modes de raisonnement : l’exploration et l’exploitation. • L’exploration vise à “expérimenter des nouvelles alternatives” (March, 1991) Inria Développement d’une ontologie pour l’analyse computationnelle des observables de l’apprenant dans le contexte d’une tâche avec des robots modulaires 13 • tandis que l’exploitation est l’usage des connaissances (déclaratives, procédurales) existantes dans une situation donnée. Si l’on considère la manière d’utiliser les connaissances, soit comme l’implémentation d’idées existantes (usage des connaissances préalables) ou comme génération d’idées (recombinaison de connaissances pour développer une nouvelle idée) nous avons ce que Axtell et collègues (2000) décrivent comme suite : “Idea generation relates to the behavior of exploration, whereas idea implementation refers to the behavior of exploitation (Axtell et al. 2000)”. Dans une situation que le sujet reconnaît comme familière, le sujet peut exploiter ses connaissances pour résoudre la situation existante s’il vise un objectif de performance (performance goal). Mais, dans cette même situation, il pourrait également décider d’explorer la situation de manière différente s’il a des buts de maîtrise (mastery goal) ou, même, si au moment de développer une première solution, il avait envisagé plusieurs idées de solution qu’il avait laissées de côté au moment de réussir la situation-problème une première fois. Dans des situations problèmes, le sujet est face à une incertitude tant en lien à la manière d’arriver au but que sur les moyens pour y arriver. Dans ce cas, les connaissances (déclaratives et procédurales) pour arriver au but ne sont pas clairement structurées et le sujet se doit d’explorer les moyens à sa disposition pour pouvoir développer des connaissances lui permettant de développer une idée de solution.