Evolution de la signature de fluorescence de la MOD
Fluorescence de la MOD au cours du traitement primaire
La décantation permet la séparation des matières en suspension (MES) et des colloïdes grâce aux processus de coagulation/floculation physico-chimique. La majorité des études de fluorescence au cours des processus de décantation ont été réalisées pour des usines de potabilisation et concernent en moindre mesure les eaux de STEU. La fluorescence comme Evolution de la signature de fluorescence de la MOD au long des filières épuratoires de STEU Partie A – Potentiel d’application de la spectrométrie de fluorescence 3D pour caractériser la MOD dans les eaux de STEU 62 indicateur d’abattement de la MOD via des ajouts de ferrate de potassium a été utilisée pour la première fois par Bari et Farooq (1985). Ceux-ci ont pu observer que l’intensité de fluorescence des composés de types substances humiques (λex-em = 365/400 – 600 nm) diminuait avec l’ajout de coagulants. H.Yu et al., (2013) ont également constaté que la fluorescence des composés de types protéique (tyrosine et tryptophane) était nettement plus importante que la fluorescence des composés de type substances humiques en sortie d’ouvrage de décantation de STEU. Une seconde étude de H.Yu et al., (2014) a permis de confirmer cette tendance par la mesure d’un signal de fluorescence dominé par des composantes PARAFAC associées aux composés de types protéique (81 %) en sortie du traitement primaire. Ce signal est six fois supérieur au signal de fluorescence associé aux substances humiques (14 %).
Fluorescence de la MOD dans les eaux usées au cours des traitements biologiques
Caractérisation par spectrométrie de fluorescence des produits microbiens au long du traitement biologique des eaux usées Les effluents de traitement biologiques sont constitués d’un mélange complexe de molécules organiques dont certaines sont directement dérivées de l’activité bactérienne. Les produits microbiens solubles (SMP) composent la majorité du matériel organique soluble des effluents des ouvrages du traitement biologique (Barker et Stuckey, 1999; Rosenberger et al., 2006). Ces SMP sont considérés comme des sous-produits intermédiaires et substrats liés au métabolisme bactérien ou encore à la décroissance bactérienne (Jarusutthiarak et Amy, 2007). Tsai et al (2008) ont supposé que ces produits pouvaient passer sous forme soluble par diffusion à travers la membrane cytoplasmique ou bien provenir de la lyse cellulaire. Ceux-ci sont constitués de carbohydrates, protéines et de composés de types substances humiques produits par le métabolisme bactérien (Wingender et al., 1999). Ces substances humiques sont supposées être le résultat d’une dégradation enzymatique partielle de plusieurs biopolymères et processus de « re-polymérisation ». Ces processus de condensations de petites molécules organiques obtenues après dégradation sont réalisés par des procédés abiotiques spontanés et des procédés enzymatiques (Hedges, 1988). D’après Riffaldi et al., (1982), ces acides humiques apparaissent plus aromatiques que les acides humiques issus des sols. Esparza-Soto et Westerhoff (2001) ont étudié la fluorescence des SMP de boues activées issues de trois STEU en Arizona. Ils ont identifié la présence de composés fluorescents de type substances humiques (λex-em= 340/415 – 420 nm) et d’un mélange d’acides aromatiques aminoacides et tryptophane (λex-em= 220 – 275/340 – 350 nm) pour les SMP dans les eaux issues du bassin des boues activées. Les auteurs confirment la présence de composés aromatiques d’importants poids moléculaire grâce aux mesures élevées de SUVA relevées dans ces trois matrices (3 < SUVA < 4). Les SMP ont été classés en deux sous-groupes (Laspidou et Rittmann, 2002 ; Xie et al., 2012): les produits associés à la biomasse (BAP) et les produits associés à l’utilisation du substrat (UAP). Ces groupes sont constamment présents dans le milieu biologique, mais leurs proportions respectives sont fonction des conditions du milieu. L’ensemble des facteurs de production des SMP sont identifiés dans la review de Azami et al., (2012). Différents systèmes de traitements biologiques ont été caractérisés par spectrométrie de fluorescence 3D : boues activées hétérotrophes en condition aérobie (Li et al., 2008) ; systèmes anaérobiques hétérotrophes méthanogènes (Sheng et Yu, 2006) ; dénitrification en condition Partie A – Potentiel d’application de la spectrométrie de fluorescence 3D pour caractériser la MOD dans les eaux de STEU 63 anoxique (Xie et al., 2010), nitrification autotrophe en condition aérobie (Ventura-Cruz et al., 2014). Des exemples de typologies et signatures de fluorescence des milieux biologiques de ces études sont abordés ci-après pour les BAP et UAP.
Utilisation de la spectrométrie de fluorescence pour suivre les performances d’abattements du traitement biologique
Bridgeman et al., (2013), a comparé les spectres de fluorescence entre la sortie du traitement primaire et la sortie d’un bassin de boues activées où ils ont pu observer un abattement de l’intensité de fluorescence des composés de types Tryptophane 1 (λex-em = 275/340 nm) et Partie A – Potentiel d’application de la spectrométrie de fluorescence 3D pour caractériser la MOD dans les eaux de STEU 65 des composés de types amino-acide de type Tryptophane 2 (λex-em = 225 – 237/340 – 380 nm) de respectivement 31,5 % et 23,3 %. H.Yu et al (2013 ; 2014) a étudié l’influence de l’évolution de la MOD fluorescente au long d’un procédé biologique A2O. Ce procédé est composé d’une succession de bassins biologiques avec différentes conditions d’oxygénation : un bassin en condition aérobie, un bassin en condition anoxique et enfin un bassin en condition oxique. Les spectres de fluorescence de ces différents bassins ont été déconvolués à l’aide de PARAFAC. Pour le traitement biologique en condition aérobie, un abattement de l’ordre de 60 % de l’intensité de fluorescence de composés de types tryptophane et tyrosine est mesuré, alors que seuls 10 % des composés de types humique microbien et fulvique sont abattus. En condition anoxique, des tendances identiques d’élimination des composés humiques microbiens et fulviques sont retrouvées, néanmoins la composante de type tyrosine est cette fois plus efficacement éliminée (environ 70 %) que la composante de type tryptophane (environ 35 %). Enfin, pour le bassin en condition oxique les abattements sont de l’ordre de : 34 % pour le tryptophane, 63 % pour la tyrosine, 10 % pour les substances humiques et 21 % pour les substances humiques d’origine microbienne. Ainsi, le matériel protéique est principalement éliminé au sein des bassins en condition anaérobies, anoxiques et oxiques (H.Yu et al., 2014). A l’inverse, les matériels de type fulvique et humique microbien sont moins bien décomposés au sein des processus A2O (Goldman et al., 2012 ; H.Yu et al., 2013). Une augmentation de l’intensité de fluorescence des composés de types substances humiques est constatée au cours des traitement biologiques (Yang et al., 2014) pouvant signifier la production de substances humiques issues de l’activité bactérienne et du processus d’humification de la matière organique. De telles observations convergent avec l’augmentation de l’indice du « specific ultraviolet absorbance » (SUVA) observée après différents traitements biologiques, mettant en évidence la production de structures aromatiques par condensation de petites molécules (Imai et al, 2002 ; Musikavong et Wattanachira, 2007 ; Hur et al., 2011). A ces composés humiques issus du métabolisme bactérien peuvent s’ajouter des composés d’origine terrigènes initialement présents dans l’influent du traitement biologique et subsistant dans l’effluent de par leur faible biodégradabilité (Yang et al., 2014). Ainsi le spectre de fluorescence en sortie de traitement biologique est principalement constitué d’une composante liée aux acides fulviques (λex-em = 330/420 nm), une liée aux acides humiques (λex-em= 380/470 nm) et enfin d’une composante de plus faible intensité liée molécules protéiques (Pons et al., 2004 ; Park et al., 2010). Certaines études utilisent l’approche PARAFAC pour étudier l’efficacité de traitement au cours du processus de traitement des STEU (Guo et al., 2010 ; H.Yu et al.,2013 ; Cohen et al., 2014 ; H.Yu et al., 2014 ; H.-S. Ou et al., 2014 ; Yang et al., 2014). Ces études ont démontré que le suivi de la MOD par spectrométrie de fluorescence 3D le long de différentes filières de traitements épuratoires permettait d’esquisser les bases d’un diagnostic de la qualité de la MOD présente à chaque étape du traitement. En effet, la fluorescence de la MOD en entrée de STEU est principalement de type protéique avec dans une moindre mesure la présence d’une composante fluorescente liée aux substances humiques. En sortie de l’étape de décantation, une faible proportion du signal de fluorescence liée aux substances humiques est abattue sans modification significative de la fluorescence des composés de types protéique. Cela illustre la sensibilité de cette technique pour le suivi potentiel des performances d’abattement lors du processus de décantation.