La relation entre les variables
L’objectif de notre travail de recherche est d’étudier le rôle de la veille stratégique sur le processus d’innovation au sein des entreprises algériennes. Plusieurs études théoriques ont confirmé la relation étroite entre les deux thématiques, et cela grâce aux informations fournies par le système de veille qui alimente le processus de l’innovation par les connaissances, mais très peu de recherches ont abordé cette thématique sur le terrain. Afin de pouvoir mesurer la capacité d’une entreprise à être innovante face à des informations issues de la veille stratégique et de pouvoir réaliser cette étude, nous avons intégré la capacité d’absorption pour mesurer cette relation, selon Cohen et Levinthal (1990), la capacité d’absorption est la capacité d’une entreprise à reconnaître la valeur de nouvelles informations externes, l’assimiler et l’appliquer à des fins commerciales afin de réussir son innovation.
Sélection d’un modèle de recherche
En se basant sur la revue de la littérature relative à la veille stratégique et l’innovation, nous allons essayer de comprendre le rôle que la veille stratégique peut avoir sur le processus d’innovation par la capacité d’absorption. De ce fait, nous nous sommes inspirés de la recherche menée par Zahra et George (2002), qui distinguent la capacité d’absorption potentielle (PACAP) qui rend l’entreprise réceptive à l’acquisition et l’assimilation des connaissances externes, et la capacité d’absorption réalisée (RACAP), qui a comme fonction la transformation et l’exploitation de l’information, et de tirer profit des connaissances absorbées grâce à la PACAP. Les deux dimensions (la PACAP et la (RACAP) proposées par Zahra et George (2002) sont des sous ensembles de la capacité d’absorption coexistent mais ne peuvent pas travailler séparément. Par exemple, les entreprises ne peuvent pas exploiter les connaissances sans d’abord les acquérir. De même, les entreprises peuvent acquérir et assimiler les connaissances, mais pourraient ne pas avoir la capacité de transformer et exploiter celles-ci pour générer des profits. D’autres études ont constaté que certaines entreprises possédaient une grande ingéniosité pour comprendre les complexes et problèmes techniques mais n’étaient pas aussi efficaces pour traduire ces connaissances en produits stratégiques innovants. Cela corrobore le besoin de distinguer entre les capacités d’acquérir et assimiler des connaissances (PACAP) et les capacités de transformer et d’exploiter cette connaissance (RACAP) et se rendre comptent de l’efficacité à tirer parti des deux (Zahra et George, 2002).
Problématique et hypothèses de la recherche
Plusieurs études ont évoqué la relation couple entre la veille stratégique et innovation, et ce, en montrant que la veille peut jouer un rôle dans le développement des produits/services innovants. Lesca (2003), et son équipe de recherche ont confirmé, par la suite de leurs études de terrain, l’existence de fortes relations entre ‘’la capacité à innover’’ et ‘’la capacité d’écouter le futur de l’extérieur’’. Audet (2001) a également affirmé dans son étude, que le désir d’innovation est stimulé par les activités de veille. D’autres recherches comme celle de Bertachini et Strasser (2011) a révélé que la veille réduit les risques qui proviennent de la différence entre le besoin de marché et l’innovation. Aussi, l’étude de Caron-Fasan (2008) démontre que l’accélération du processus d’innovation reviens aux compétences des chargés de la veille. Kessler et Chakrabrati (1996) étalent la relation entre l’identification des opportunités et la stimulation de l’innovation (Howell et Shea, 2011). Également, nous retrouvons Jakobiak (1992) affirme que afin de faciliter l’innovation il faut savoir ce que font les autres. La veille favorise l’introduction et la conception d’un produit ou un service innovant au sein des marchés (Ahituv,1998). Toutes ces travaux démontrent l’importance de la veille stratégique dans le processus d’innovation. Toutefois, très peu de recherches ont réalisé ce travail sur le terrain.
En se référant aux différentes études réalisées sur la veille stratégique et le l’influence qu’elle peut avoir sur le développement d’un nouveau produit ou service et notre revue de la littérature, nous allons étudier la relation entre veille stratégique et l’innovation et ce notamment au niveau de l’entreprise Brandt du Groupe Cevital Algérie. Donc, notre problématique consiste à répondre à la question principale suivante : « Quelle est l’influence de la veille stratégique dans le processus d’innovation ? » Plus précisément, nous allons nous intéresser à la capacité des employés de l’entreprise Brandt filière de Groupe Cevital, à élaborer, combiner et exploiter les informations issues de la veille stratégique, à des fins commerciales, afin de pouvoir créer de la connaissance qui engendra à son tour l’innovation au sein de l’entreprise. Hypothèses de recherche : 1. La veille stratégique est la capacité d’absorption : L’organisation doit être en mesure de pouvoir chercher et reconnaître la valeur de nouvelles informations externes, de façon stratégique tout en identifiant les opportunités pertinentes qui s’offrent à elle. Selon Amabilé (1983), pour être créatif, un individu a besoin de penser avec souplesse, voir les choses à travers une lentille différente, et combiner des produits ou des services qui ne semblent pas liés. La veille stratégique est un processus qui permet aux entreprises de se renseigner sur les opportunités, les conditions ou les événements qui menacent sa performance, permettant aussi à l’entreprise de formuler une stratégie concurrentielle conforme aux conditions environnementales critiques (Beal,2000). Aussi, (Jakobiak, 1991 ; Dou, 1995 ; Martinet et Ribault, 1989) définissent la veille stratégique comme un processus qui aide à la créativité. Toutefois il existe un dynamisme de l’environnement qui influence les orientations et les décisions stratégiques de l’entreprise tels que la dynamique concurrentielle et l’intensité technologique (Todorova et Durisin, 2007 ; Volberda, Foss et Lyles, 2010 ; Zahra et Goerge, 2002).
Ce dynamisme et changement environnementale est désigné comme le dynamisme de l’environnement, plus exactement il est défini comme le degré de changement et d’instabilité de l’environnement externe (Dess et Beard, 1984 ; Jansen et al., 2009). Il est caractérisé par les changements technologiques, les variations dans les préférences des clients et les balancements sur la demande des produits (Sorensen et Stuart, 2000). De ce fait, pour arriver à répondre aux demandes et stimuler une innovation, l’entreprise doit continuellement identifier, assimiler et appliquer de nouvelles connaissances part différentes sources (Cohen et Levinthal, 1990 ; Teece, Pisano et Shuen, 1997). La veille stratégique est une méthode utile dans la chaine de perceptions, d’interprétations et d’actions qui permettent à une entreprise de s’adapter à son environnement (Hanbrick, 1981). La veille stratégique peut avoir plusieurs missions ; une aide à la prise de décision et planification stratégique (Lesca et Caron-Fasan, 2008 ; Ramirez et Selsky, 2016). Cependant, l’une des missions principales c’est la surveillance de l’environnement, qui est considérée comme le chemin de la Chapitre 3 : Étude empirique de la recherche 125 planification et du contrôle du destins des entreprises (Terry, 1977).
Son but principal est d’armer les décideurs des prévisions précises et des tendances significatives en matière de concurrence, de réglementation, de politique, de technologique et de culture (Stubbart, 1982). De ce fait, pour pouvoir effectuer cette surveillance, il est devenu crucial pour une entreprise d’avoir la main-d’œuvre qualifiée pour reconnaitre les opportunités, gérer les changements nécessaires et exploiter au mieux les informations et les connaissances extérieures. Afin, d’accélérer la croissance de l’innovation et améliore la performance de l’entreprise (Jenssen et Nybakk, 2009). Selon Amabilé (2012), la capacité d’absorption est définie comme l’aptitude d’une entreprise à évaluer, assimiler et appliquer de nouvelles connaissances susceptibles d’être à la source de créations de valeur. Les résultats de Cohen et Levinthal (1990) reconnaissent que la capacité d’absorption ne se limite pas seulement à l’organisation et son environnement externe mais va plus loin. Elle intègre le transfert de connaissances et la capacité à comprendre et évaluer de nouvelle connaissance.
En élaborant leur modèle ils suggèrent que les connaissances antérieures de l’entreprise sont très importantes pour développer la capacité d’absorption de l’organisation. Ils ajoutent à cela qu’ils doivent être capables de reconnaître où se trouvent les connaissances pertinentes afin que le processus de la capacité d’absorption soit mis en mouvement. D’un autre côté nous retrouvons, Jain (1984) considère que la formation du personnel est un élément clé pour réussir la tâche de veille stratégique. Choo (1999) se focalise sur l’identification du besoin, il visualise quatre situations une visualisation non orientée, une visualisation conditionnée, la recherche informelle et la recherche formelle, et pour pouvoir identifier ces besoin les employés doivent être formés. Jokabia (1992) a focalisé son étude sur la veille technologique, toutefois selon l’auteur il est nécessaire d’avoir un réseau d’expert afin que les informations soient bien analysées.