Qu’est ce que le patrimoine
Commençons dans un premier temps par définir la notion de patrimoine sous l’aspect de la « transmission ». Pour présenter leurs positions au sein de cette définition, Bouisset et Degrémont se sont appuyées sur l’idée de transmission de bien matériels issus de l’histoire. Ces deux maître de conférences prennent en compte « la résonance juridique de bien que l’on tient du père » qui n’est qu’autre que le sens de la racine latine patrinimium. (Bouisset ; Degrémont, 2013). Idée soutenue par Lazzorotti, le patrimoine « est censé mériter d’être transmit du passé, pour trouver une valeur dans le présent”. Ce professeur en géographie ajoute également que le patrimoine est « un ensemble d’attributs, de représentations et de pratiques fixés sur un objet non contemporain (chose, œuvre, idée, témoignage, bâtiment, site, paysage, pratique) dont est décrété collectivement l’importance présente intrinsèque (en quoi cet objet est représentatif d’une histoire légitime des objets de société) et extrinsèque (en quoi cet objet recèle des valeurs supports d’une mémoire collective), qui exige qu’on le conserve et le transmette » (Lazzarotti, 2003 ; Bonerandi 2005). Cet ensemble d’attributs est lui aussi abordé par deux historiens français décrivant le processus de patrimonialisation comme une action qui incorpore et combine des biens de manière complexe et non exclusive : l’oubli, l’abandon, la destruction, la sélection, la revendication et la reconnaissance. Finalement, les deux hommes concluent le patrimoine comme une composition « d’éléments variés qui sont honorés ou commémorés par des actions » (Choay, 1985 ; Nora, 1997 ; Introduction in Poulot 1998 ; in Héritier, 2013). De ce fait, le patrimoine est « garant d’origines » permettant de maintenir et de préserver le passé et de conjurer le temps. Il permet de reconstruire une identité en conservant une continuité historique et ainsi une conscience de l’objet, du site, du paysage ou du monument, même après sa disparition (Hartog, 2003 ; in Zamant 2017). Additionné à sa valeur de transmission, ce terme est utilisé en tant que « pétrification dans une réaction passéiste » (Zamant 2017). Le patrimoine s’inscrit dans l’histoire des hommes (Héritier, 2013 ; in Bouisset ; Degrémont, 2013). Dans une optique de politique culturelle et de partage de connaissances, certaines régions ont développé une « chaine patrimoine » par la médiation. (Cron, 2014) Ensuite, abordons ce la notion de patrimoine en tant qu’appartenance à un groupe. Le patrimoine construit également « une image forte et simplifiée d’un passé commun à un groupe » (Di Méo, 1994 ; in Bonerandi 2005). La notion de patrimoine prend alors sens pour Davallon, sociologue français, « tout ce qui peut être revendiqué par un groupe social comme tel : tout ce que ce dernier estime avoir reçu et qui, à ce titre, présente une valeur pour lui. Les processus par lesquels les objets deviennent patrimoine sont alors rangés sous l’étiquette de la ‘’patrimonialisation’’» (Jean Davallon 2003 ; in Bouisset, Degrémont, 2013). Cette valeur liée au 11 sur 46 Qu’est ce que le patrimoine groupe fait référence, d’après Micoud, à « une activité sociale consistant à faire être quelque chose qui prend nom et valeur de patrimoine » (Micoud, 2005 ; in Pottier, 2014). Le sociologue Micoud est soutenu par l’historien Melot qui précise que « le plus important n’est pas forcément l’objet patrimonial en lui-même mais, la démarche qui conduit à lui, le fait de créer une communauté de réflexion bienveillante autour de cet objet, d’étendre le champ des possibles, ce que certains appellent la mobilité salutaire des valeurs culturelles » (Melot, , 2012, in Cron, 2014). Finalement, le patrimoine serait un fait de société en évolution face à la modernité (Hartog, 2003 ; in Bouisset, ; Degrémont, 2013). Il doit, à aujourd’hui, faire face aux intérêts pour les objets d’études et les experts et doit subir des études depuis l’inventaire à l’analyse de politiques patrimoniales. (Bouisset, Degrémont, 2013)
Le patrimoine culturel
Qu’est ce que le culturel ?
D’après Philippe Descola, il existe deux déterminations de la culture : dans un cas, la culture est un épiphénomène et dans l’autre, « un ordre de réalité entièrement distinct qui n’entretient que des rapports de type contingent avec le milieu écologique et les exigences du métabolisme humain » (Philippe Descola, 2011 in Larrère, 2015). Cet anthropologue se questionne également à savoir si la culture est comme un « dispositif adaptatif aux contraintes naturelles » faisant donc référence à « des mécanismes asservis aux lois de la matière et de la vie » ou à contrario, si la culture est un « ordre de réalité entièrement distinct qui n’entretient que des rapports de type 12 sur 46 contingent avec le milieu écologique et les exigences du métabolisme humain ». De ce fait, les sciences de la culture ont, d’après Philippe Descola, deux échappatoires possible : elles sont soit « autonomes » soit « accèdent à la rigueur en empruntant aux sciences de la nature une partie de leurs méthodes , voire de leurs résultats » (Philippe Descola, 2011). D’après le comité du Patrimoine Mondial en 1992, l’adjonction du terme « culturel » vise à identifier les « valeurs intangibles du paysage contre les risques de fragmentation » qui peuvent impacter la « perte de signification liée aux transformations territoriales » (Comité du Patrimoine Mondial 1992 in Zamant, 2017). En lien avec le Comité du Patrimoine Mondial, Bonerandi envisage que le culturel intervient dans divers domaines comme celui de la « perception du territoire, de ses représentations ou de son appropriation symbolique », dans tous les cas, la culture est le résultat de la « construction territoriale ». De ce résultat Bonerandi en déduit que si le « territoire produit du culturel (il n’est que de penser à la “mise en mythe du paysage”), le culturel produit en retour du territoire ». Ainsi, par l’usage « d’emblèmes et de symboles » le culturel permet de « s’approprier un espace, de transmettre une appartenance territoriale constitutive de l’identité collective et/ou individuelle. » (Bonerandi 2005) Par ailleurs, il est important de notifier la différence que le terme « culture » peut avoir en fonction du déterminant le précédent. En effet, une culture est définie par J.Baird Callicott , philosophe, comme « une métapopulation d’Homo-sapiens dont les membres sont capables d’échanger librement des informations cognitives » (J.Baird Callicott in Larrère, 2015).
Qu’est ce que le patrimoine culturel ?
Définissons à présent le patrimoine culturel. Au regard de Pottier, le patrimoine culturel fait référence à « l’identité », à « l’attachement à la propriété ». Ces aspects de la valeur culturelle « sont attribués aux habitants et aux élus et non directement à eux-mêmes ». C’est d’ailleurs sous ces angles que cette valeur prend la nomination de patrimoine culturel (Pottier 2014). Soutenu par Luis Fernando de Almeida, la caractéristique fondamentale du paysage culturel vient d’une « cohabitation remarquable, dans une portion de territoire, entre la nature, les espaces construits et occupés, les modes de production et les activités culturelles et sociales, à travers une relation complémentaire capable d’établir une identité qui ne puisse pas être conférée à un quelconque de ces éléments individuellement » (Winter Ribeiro 2007, in Zamant 2017). Cette position est développée par Bonnemaison et Cambrézy qui considèrent que l’appartenance au territoire relève de la « représentation, de l’identité culturelle, et non plus de la seule position dans un polygone, dans une maille de gestion ou de pouvoir » (Bonnemaison, Cambrézy, 1996 in Bonerandi 2005). Ainsi une question émane de la pensée de Iphan, à savoir si tous les éléments constitutifs du patrimoine culturel peuvent être reconnus au sein d’un paysage culturel sans distinction. (Iphan, 2009 In Zamant, 2017).