Le pays du Soleil Levant
Histoire : Pour parfaire le cadrage de notre étude, un retour sur l’histoire de l’archipel nippone est inévitable. Bien moins connu en Occident que l’histoire de France, l’histoire du Japon fait donc ici l’objet d’un résumé qui nous permet de mieux comprendre les mœurs et coutumes du pays ayant amené à la construction de son système éducatif actuel. De même que pour l’Hexagone, nous étudierons certains événements mêlant nos deux pays en nous focalisant sur le point de vu japonais.
Le XVIe siècle japonais est symbolisé par les conflits entres les différents clans d’alors. En effet depuis le XIIIe siècle le Cipango (nom chinois du Japon) évoqué par Marco Polo dans Le Devisement du monde (1298) connaît une forte période de confusion politique et de diminution du pouvoir central. Si bien qu’au XVIe siècle, de nombreux clans avec à leurs têtes des seigneurs locaux (daimyo) se disputent le pouvoir. Une période où l’empereur ne possède qu’un rôle symbolique et religieux avec aucun véritable pouvoir.
Dans la seconde moitié du XVIe siècle, les armes à feu venues d’Europe commencent à être utilisées sur le champ de bataille. Une industrie nippone se développe même en imitant les armes amenées par les Européens. Certains grands personnages tentent puis parviennent à unifier le Japon. C’est le cas en premier lieu d’Oda Nobunaga (1534-1582) qui conquiert une grande partie du pays mais meurt avant de parvenir à son unification ; son général Toyotomi Hideyoshi (15737-1598) prend la relève et met fin à plus d’un siècle de guerres civiles en unifiant enfin le pays.
C’est sous Hideyoshi que le Japon tente pour la première fois une conquête continentale avec une invasion de la Corée de 1592 à 1598 qui se solde par un échec. A sa mort, Hideyoshi donne la responsabilité à un conseil de Cinq Sages (Tairo) de veiller sur son fils avant qu’il ne soit en âge de régner. Seulement, parmi ces cinq sages se trouve un homme qui a changé l’histoire du Japon : Tokugawa Ieyasu. Ce dernier prend le pouvoir en affrontant le fils d’Hideyoshi et ses vassaux à la célèbre bataille de Sekigahara (1600), bataille emblématique de l’histoire japonaise consacrant la victoire de Tokugawa Ieyasu (1543-1616) et de son clan qui domine ensuite le Japon pendant 250 ans. Il profite en effet des années suivant la bataille pour renforcer son pouvoir en éliminant les derniers descendants d’Hideyoshi et en s’efforçant d’édifier un système politique capable de lui survivre. On voit en ainsi une première moitié de XVIIe siècle où se met en place un régime politique nouveau avec un vœu de pacification intérieure et extérieure sans comparaison. Une paix acquise néanmoins au moyen «d’un encadrement rigide de la vie sociale et sur la cristallisation des institutions et des attitudes du siècle précédent» corollaire d’un isolement complet de l’archipel pendant cette période.
Le système éducatif nippon
Le système scolaire japonais est organisé par Le ministère de l’Éducation, de la Culture, des Sports, des Sciences et de la Technologie. C’est ce ministère qui fixe les programmes officiels. Les comités d’éducation des municipalités organisent ensuite l’application locale de ces programmes. Au Japon, l’école est laïque et obligatoire entre 6 et 15 ans.
Le découpage du système scolaire japonais : Le système scolaire japonais s’organise presque de la même manière que le système français au niveau du découpage par niveaux (âge). Une classe maternelle (Youchien) pendant 3 ans puis l’école élémentaire (shougakkou) de 6 à 12 ans. C’est ce moment de la scolarité des élèves japonais qui va principalement nous intéresser dans cette étude, que ce soit à travers les méthodes d’apprentissages ou les supports utilisés pour l’enseignement de l’histoire. On peut néanmoins préciser le reste du cursus japonais avec le chuugakkou (collège) puis le koukou (lycée) jusqu’à 18 ans ; et enfin l’université (daigaku).
Quelques caractéristiques des shougakkou : Les élèves de première année au shougakkou (6 ans) portent tous un chapeau jaune en dehors de l’école (permettant de les repérer dans la rue et de les aider à s’orienter sur le chemin de l’école). L’entrée dans les shougakkou peut être sélective (sur concours), la sélection à l’entrée des écoles étant une modalité de tous les niveaux scolaires japonais. On dénombrait 22 476 shougakkou en 2008 avec plus de 300 000 enseignants du primaire dont plus de 80% de femmes. L’organisation et la vie de classe peut être sensiblement différente par rapport aux écoles françaises (nettoyage de la classe par les élèves, repas dans la classe, repas organisé par les élèves…). Un enseignant est responsable d’une classe de 40 élèves en moyenne et enseigne toutes les matières. On trouve également des classes aux effectifs beaucoup moins importants avec l’exemple étudié par Jean-François Sabouret dans son article Une école primaire idyllique ? Dans lequel il présente la petite école primaire de Korigawa de la petite ville d’Okutama au nord ouest de Tokyo. En 2010, l’école comptait 86 élèves avec des classes d’environ douze élèves.
Évolution de la discipline historique nippone et son enseignement
Les Japonais utilisent plusieurs découpages historiques et chronologiques. Des découpages qui s’expliquent par l’histoire même du pays (ères, périodes..). Il ne faut pas confondre le découpage par ères et le découpage par période. Les périodes marquent des tranches de l’histoire qui reflètent en général un système politique et/ou un développement culturel. La périodisation traditionnelle japonaise est celle des ères. Un système d’origine chinoise importé par les Japonais au VIIe siècle. C’est à partir de ce moment que chaque année le Japon s’inscrit dans une ère. « A noter que jusqu’en 1868, l’empereur du Japon pouvait décider de changer d’ère selon son désir. Par exemple, si un tremblement de terre avait ravagé le Japon, il pouvait décider de changer d’ère, en espérant que la suivante serait plus propice. On compte environ 250 ères au Japon depuis le VIe siècle.
Ces dernières n’ayant pas de valeur scientifique sont difficiles à lire et étudier. » Une ère correspond au règne d’un empereur, l’ère Heisei a par exemple démarré en 1989, avec l’accession au trône de l’empereur actuel. En 2017, nous sommes donc en Heisei ; une ère qui prendra fin avec l’abdication prochaine de l’empereur Akihito. L’écriture de l’histoire se fait dans nos deux pays de manière sensiblement différente depuis le XXe siècle. Au Japon, Hiroyuki Ninomiya fut l’un des grands historiens japonais de la fin du XXe siècle. «Il a contribué au renouvellement des approches positivistes ou nationalistes qui dominaient jusqu’alors l’historiographie du Japon. Sa réflexion épistémologique et ses publications ont aidé les historiens japonais à produire une nouvelle manière d’écrire l’histoire, plus ouverte aux autres disciplines. »
Évolution de la discipline historique française et son enseignement
L’enseignement de l’histoire en France fait lui l’objet de nombreux débats depuis plusieurs années. «Il faut attendre la fin du XIXe siècle pour que l’histoire soit enseignée, en France, à tous les niveaux». Avant d’évoquer l’enseignement de l’histoire tel qu’il est préconisé aujourd’hui, revenons brièvement sur les grands courants historiographiques qui marquent la France depuis la fin du XIXe siècle. Une période où l’on voit apparaître une nouvelle approche de l’histoire avec les positivistes s’appuyant sur La Revue historique de Gabriel Monod. Un courant qui impose une histoire travaillant uniquement sur les faits passés sans faire d’histoire immédiate et en restant le plus objectif possible. Une histoire qui s’écrit ainsi en se basant principalement sur les archives et qui se veut politique, militaire ou biographique principalement. C’est cette histoire qui domine alors dans les écoles de France où l’histoire comparative est absente. L’école positiviste s’enferme donc dans un type d’histoire au service de la République mais permet pour la première fois d’organiser le récit de l’historien qui se base sur les documents pour réaliser son travail.
Au XXe siècle, des courants vont s’opposer à l’école positiviste et aboutir à la célèbre revue Les Annales fondée en 1929 par Lucien Febvre et Marc Bloch. Une revue qui permet d’élargir l’histoire à de nouveaux domaines et disciplines (sociologie, psychologie, économie..). L’écriture de l’histoire se réinvente progressivement et prend une nouvelle dimension dans la seconde partie du XXe siècle avec les travaux de Fernand Braudel. En effet, dans sa célèbre thèse sur La Méditerranée à l’époque de Philippe II, l’historien apporte une réflexion sur le temps avec trois temps différents.
Table des matières
INTRODUCTION
I DEUX PAYS, DES HISTOIRES ET UN SYSTEME EDUCATIF
Les liens historiques entre nos deux pays
Les relations franco-japonaises : histoire croisée de deux pays
L’Hexagone
Le pays du Soleil levant
Histoire
Le système éducatif nippon
II – ENSEIGNEMENTS DE L’HISTOIRE ET RECITS NATIONAUX
La discipline historique et son enseignement en France et au Japon
Évolution de la discipline historique nippone et son enseignement
Évolution de la discipline historique française et son enseignement
Nationalisme / récit national : les orientations de l’enseignement de l’histoire
La guerre sino-japonaise (1937-1945) : Nankin
→ Un des plus grand massacres du XXe siècle
→ Un holocauste totalement oublié ?
→ Les programmes et les manuels
La collaboration française lors de la Seconde guerre mondiale
→ La résistance et la collaboration en France pendant la Seconde Guerre mondiale
→ La mémoire : de l’oubli à la reconnaissance
→ Les programmes et les manuels
III ENTRETIENS ET COMPARAISONS DES OUTILS D’ENSEIGNEMENT
Rendez-vous à l’Institut franco-japonais de Montigny-le-Bretonneux
Premier rendez-vous (15 novembre 2017)
Second rendez-vous (10 janvier 2018)
Comparaison des manuels
Les manuels japonais
Les manuels français
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES