PRINCIPE DE LA MESURE DES DEFORMATIONS PAR HR-EBSD
L’EBSD à haute résolution angulaire est une technique de microscopie électronique à balayage basée sur la diffraction des électrons rétrodiffusés. Elle étend la méthode EBSD conventionnelle (mesure absolue des orientations) à la mesure relative de l’état de déformation élastique dans le cristal. La mesure des déformations élastiques par HR-EBSD est peu classique car plus difficile à mettre en œuvre qu’une mesure de l’orientation cristalline (annexe H). Elle nécessite, d’une part, des clichés de très bonne qualité, et d’autre part une méthode de dépouillement plus précise. Le principe de la corrélation croisée est décrit dans les paragraphes suivants. 3.1. Acquisition des diagrammes Dans les 20 dernières années, l’EBSD a été développé comme une technique automatisée couplée dans un MEB [98] [99]. Les diagrammes de Kikuchi ou EBSPs sont généralement analysés pour extraire des informations sur l’orientation des phases et du cristal et permet également de discriminer et d’identifier les phases présentes (alliage, allotropie…) mais ils peuvent aussi permettre la mesure des déformations. La technique repose sur la diffraction des électrons rétrodiffusés (Figure 73). L’échantillon est incliné à 70° par rapport à l’horizontale car les électrons ont ainsi une profondeur d’échappement plus faible, permettant un meilleur rendement de rétrodiffusion. Figure 73 : Illustration de la loi de Bragg avec d la distance inter-réticulaire du cristal, l’angle entre le faisceau d’électrons incident et les plans cristallins, n l’ordre d’interférence (1,2,3… ) et la longueur d’onde du faisceau électronique incident Des électrons d’un faisceau incident pénètrent la surface de l’échantillon sur une profondeur variant suivant le matériau étudié. Une faible partie des électrons rétrodiffusés subit une réflexion de Bragg sur les plans réticulaires. Ces électrons sont diffractés suivant un double cône de diffraction dont le sommet se situe au point d’impact du faisceau d’électrons primaires avec l’échantillon. Ils sont détectés grâce à un capteur CCD placé derrière un écran phosphorescent, (Figure 74). Figure 74 : Schéma de principe du montage EBSD. La source étant divergente, les électrons se répartissent sur deux cônes de manière symétrique par rapport au plan diffractant. L’intersection entre l’écran phosphorescent et les cônes forment des lignes dites de «pseudo-Kikuchi» (Figure 75) dont le nombre, la disposition (c’est-à-dire la symétrie), l’intensité et la largeur sont caractéristiques du réseau cristallographique et de son orientation. Figure 75 : Diagramme pseudo-Kikuchi d’un échantillon de Ge. Des cartographies de plusieurs mm2 peuvent être collectées, soit par balayage du faisceau électronique, soit par déplacement de l’échantillon sous le faisceau. Un diagramme de Kikuchi (Figure 75) est enregistré à chaque point de mesure, sans binning (regroupement de pixels) pour obtenir la meilleure résolution de l’image. La résolution spatiale de l’EBSD est limitée par la taille du volume d’interaction du faisceau d’électrons dans l’échantillon. La résolution spatiale peut être aussi petite que 30 nm le long de l’axe de tilt et de 90 nm perpendiculairement à l’axe et le long de la surface de l’échantillon [128].
Effet de la déformation du cristal sur les figures de diffraction
Les bandes du cliché de Kikuchi matérialisent sur l’écran une information liée aux plans diffractants. Ces éléments dépendants de la forme et de la taille de la maille cristalline sont influencés par une transformation du cristal. Dans le cas de la déformation élastique, il est nécessaire de distinguer deux types de transformations : hydrostatique, 𝜀ℎ et déviatorique, 𝜀𝑑 (Figure 76). pI tot d h d Figure 76 : Illustration de la déformation hydrostatique et déviatorique et forme du tenseur de déformation élastique. Une déformation hydrostatique modifie le volume de la maille cristalline sans distorsion des angles. L’orientation des plans cristallins demeure inchangée mais leur distance interréticulaire dhkl est modifiée. L’HR-EBSD y est insensible. En effet, dans le cas du cliché de Kikuchi, l’évaluation de la largeur de bande n’est pas suffisamment résolue pour espérer estimer une variation de dhkl due à une déformation élastique [109]. La déformation élastique déviatorique va, au contraire, modifier la forme de la maille cristalline, c’està-dire l’orientation relative des plans cristallins et donc les relations angulaires au sein du cristal. Un faible écart angulaire entre deux faisceaux diffractés va engendrer par projection sur le détecteur (situé loin de la source) une distance mesurable entre les éléments du cliché. Comme les nœuds du réseau réciproque se déplacent sous l’effet de la déformation déviatorique, les angles entre les bandes de Kikuchi évoluent ce qui change la position et la forme des éléments du cliché. La mesure du déplacement des bandes entre deux clichés de diffraction permet ainsi de déterminer la variation de déformation élastique déviatorique du cristal entre les deux configurations. 𝜀 𝜀ℎ 𝑑 Dans le cas d’une déformation plastique, celle-ci s’accompagne souvent d’un écrouissage et donc d’une augmentation de la densité de dislocations présente dans le cristal, ce qui ne modifie pas l’organisation locale du cristal. La seule conséquence sur les diagrammes de Kikuchi est la diminution de la netteté des bandes. En effet, les dislocations stockées dans le volume d’analyse perturbent localement les conditions de diffraction. Ceci est à rapprocher de l’effet d’élargissement des pics de diffraction en DRX. Lors de la mesure de la partie élastique de la déformation, les effets de la partie plastique induisent une dégradation des figures de diffraction. Ils imposent de trouver des méthodes de traitement robustes tel que le filtrage des clichés avant corrélation pour la technique HR-EBSD.