PRATIQUES INDUSTRIELLES
INTRODUCTION
Afin d’augmenter la portée de nos propositions d’environnements collaboratifs, notre état de l’art scientifique a été enrichi par plusieurs cas d’études industriels. Dans l’optique d’obtenir un panel large de produits industriels susceptibles d’être la cible de nos expérimentations, nous avons tout d’abord contacté une série de dix entreprises partenaires de l’Ecole, dans des secteurs variés et respectant les critères définis auparavant à savoir : • un produit cible de conception routinière. • une intégration pluridisciplinaire forte dans le cycle de développement du produit. Les entreprises contactées couvrent les domaines de l’automobile, de l’aéronautique, du Bâtiment et des Travaux Publics, de la R&D dans le domaine de la marine, du textile, de la téléphonie et de l’emballage. Pour chaque industriel contacté, nous lui avons demandé qu’il nous ouvre ses portes afin de décrire de manière précise le processus de conception amont de son produit, ainsi que les échanges de RI entre les différents métiers. Ce travail présente la base de la définition d’un environnement collaboratif amont. Malgré la volonté de tous de développer leur collaboration dans ces phases, et le grand intérêt porté au projet, plusieurs industriels ont préféré arrêter la collaboration par peur d’une diffusion de leur savoir-faire. Cette crainte a été particulièrement présente chez notre partenaire aéronautique, pour qui l’amont est une zone strictement confidentielle d’où rien ne doit filtrer. En conséquence, nous avons eu quatre retours positifs qui remplissent nos critères. Nous choisissons de détailler dans ce manuscrit les deux cas d’études qui sont les plus proches d’une conception industrielle de produit, dans le domaine du textile et de l’emballage. Les deux autres sont issus du BTP (entreprise Colas) et de la mécatronique appliquée à la marine (entreprise Robotswim, http://www.robotswim.com/), ont fait l’objet de dépôts de trois brevets en appliquant la méthode de développement d’environnement collaboratif présentée dans cette thèse (Segonds et al. 2008; Segonds et al. 2009a; Segonds et al. 2010). Les deux produits que nous allons étudier, grâce aux partenariats industriels développés avec Verallia (anciennement Saint-gobain Emballage) et Devanlay (fournisseur exclusif de la marque de vêtements Lacoste), nous ont semblé pertinents car : • il s’agit de produits de conception routinière (critère 1). • le côté pluridisciplinaire et multi-métiers est largement présent dans chacune de ces entreprises (critère 2). De plus, d’autres paramètres rendent ces cas d’études pertinents : • ils couvrent des secteurs complémentaires du monde industriel. • le time to market de ces différents produits est très large, allant de quelques semaines (Verallia), à plusieurs mois (Devanlay). Ainsi, les outils collaboratifs supports utilisés, leurs performances et les RI nécessaires ne sont pas identiques. • la multitude des acteurs présents en fait un terrain idéal pour implémenter un environnement collaboratif. • les types de collaborations couvertes sont multiples, et représentatives de la majorité des cas de conception : synchrone et asynchrone en colocalisation et en mode distant.
CAS D’ETUDES : PRESENTATION DU PROTOCOLE EXPERIMENTAL
Nous présentons dans ce chapitre les deux cas d’études que nous avons analysés en profondeur. Chaque cas a fait l’objet d’un projet de fin d’études, c’est-à-dire qu’un élève ingénieur a participé à la définition des besoins et au développement d’un environnement collaboratif. Les travaux, d’une durée de six mois en moyenne faisaient l’objet d’un suivi et de réorientations réguliers afin de répondre aux objectifs de la recherche action menée. Le protocole expérimental est commun à toutes nos expérimentations. Il est présenté sur la Figure 54 ci-dessous. Etat de l’art Contribution à l’intégration d’un environnement collaboratif en conception amont 82 Figure 54 : protocole expérimental global en cinq phases. La phase de délimitation consiste à aller dans l’entreprise et, par l’intermédiaire d’entretiens ciblés (une à deux personnes clefs du processus) et de divers supports informatiques, à découvrir les pratiques et comprendre la manière dont un produit est conçu afin de fixer la limite de la conception amont et des acteurs à rencontrer. Ce premier contact avec la société permet d’analyser avec un œil neutre les pratiques collaboratives. Les documents présentés sont archivés et les réunions font l’objet de prises de notes afin de permettre un traitement ultérieur des informations fournies. Suite à cette phase, nous arrivons à des constats qui nous sont utiles pour la suite des expérimentations. Il nous a semblé intéressant de développer cette étape dans une partie « état de l’art des pratiques industrielles » car notre vision neutre du processus et des éventuels points de blocage nous permet de formaliser des constats complémentaires de notre état de l’art scientifique. Les quatre phases suivantes font partie du protocole des expérimentations 1 à 3. Nous allons ici au-delà de la découverte des pratiques dans le but de formaliser avec une granularité fine le processus de conception dans l’optique de développer et d’optimiser un outil collaboratif support à la conception amont. Ces étapes sont détaillées dans la 4ème partie. Chaque cas d’étude est présenté au travers de son contexte industriel, puis nous investiguons afin de comprendre comment est réalisé le développement de nouveaux produits. Enfin, nous positionnons la conception amont avant de faire les constats liés à ces études de cas. Ces constats nous seront utiles comme données d’entrée de la phase expérimentale. Nous commençons par le développement d’un produit verrier chez Verallia, avant d’étudier le développement chez Devanlay, une entreprise textile.
L’ENTREPRISE VERALLIA ET LA CONCEPTION AMONT DES PRODUITS
La première étude des pratiques industrielles est effectuée suite à un retour positif à nos sollicitations du responsable du Bureau d’Etudes de Verallia, M. Peyceré, situé sur le site de Chalon-sur-Saône (71). Nous nous sommes rencontrés à de multiples reprises avec son équipe afin, dans un premier temps, d’identifier les pratiques de conception puis, dans un second temps de réaliser des tests utilisateurs. Un étudiant en projet de fin d’études a également contribué sur une durée de quatre mois à cette phase. Cette étude constitue la première phase de « Délimitation » de notre protocole, représentée en pourpre sur la Figure 55 ci-dessous