L’aménagement de l’espace public hospitalier
Un sujet d’actualité : la planification sanitaire et l’aménagement des hôpitaux Le thème de cette recherche, intitulée « Aménagement des hôpitaux publics et bien-être de ses usagers », associe une dimension spatiale (le lieu, l’enceinte de l’hôpital matérialisée par des bâtiments et des espaces interstitiels) et une dimension psychosociale (le fait de se « sentir bien »). Le lien entre ces deux dimensions répond au besoin de santé publique en France. En effet, les établissements de santé publics français ou hôpitaux sont des partenaires de la politique publique de santé. Ils doivent permettent l’accès aux soins pour tous. De plus, le préambule de la constitution de l’OMS adopté en 1946 définit la santé dans ces termes : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». L’hôpital public dans sa forme et son organisation doit donc oeuvrer à établir un bien-être total chez tous ses patients. En termes de dimension spatiale, les approches d’aménagement du territoire en matière de santé ont été très diverses (BOURDILLON, 2005). Depuis 1970, différentes politiques de planification sanitaire ont été mises en place afin de réduire les inégalités d’accès aux soins. La loi hospitalière du 31 décembre 1970 instaurait la carte sanitaire qui visait alors à équilibrer sur l’ensemble du territoire les équipements hospitaliers selon des indices de besoins. Un nouvel instrument est créé avec la loi hospitalière du 31 juillet 1991 : le Schéma Régional d’Organisation Sanitaire (SROS). En 19961 , une dimension régionale est donnée à l’organisation de l’offre de soins par la création des Agences Régionales de l’Hospitalisation (ARH). Cependant, à la fin des années quatre-vingt-dix, les inégalités de santé persistent et l’ordonnance du 4 septembre 2003 supprime la carte sanitaire. Elle est alors remplacée par une annexe au SROS qui devient l’outil majeur de régulation de l’offre de soins sous la responsabilité des ARH. Parallèlement, on assiste à une déconcentration au niveau des ARH qui ont maintenant compétence pour donner l’autorisation d’implantation d’activités de soins2 ou de matériels lourds. L’approche de la planification a radicalement changé. Elle s’appuie maintenant sur les besoins de la population et plus particulièrement sur des territoires de santé où s’appliquent les SROS. La notion de territoire de santé se rapproche de celle des bassins de santé3 . Ce sont des territoires administratifs mais aussi des ‘territoires vécus’ (qui font référence à des naissances, des hôpitaux, un taux de personnes âgées…) afin de «permettre l’accès effectif et efficace de la population à un ensemble de services sanitaires, et dans certains cas médicosociaux et sociaux »4 . Localement, l’hôpital public va aussi devoir évoluer dans son organisation et dans ses formes. La circulaire DHOS/E1n°200461 du 13 février 2004 prévoit par anticipation une nouvelle gouvernance hospitalière. Cette circulaire instaure le Plan Hôpital 2007. Une volonté politique de faire évoluer et moderniser l’hôpital public est inscrite. Le Plan Hôpital 2007 prévoit un soutien aux investissements important pour mettre en place les réformes de financement, de la nouvelle gouvernance, de la certification des hôpitaux et de l’organisation territoriale de l’offre de soins. La réforme de financement se base sur une nouvelle tarification qui adapte les revenus aux activités de soins effectués. Il s’agit de la tarification à l’activité, la T2A.La certification des hôpitaux fait suite à l’accréditation pour assurer une meilleure qualité de soins au sein des hôpitaux. Enfin, la nouvelle gouvernance s’appuie sur une logique de regroupements de structures et d’une modernisation, simplification de la gestion interne des établissements de santé publiques. Ce regroupement va être visible par une organisation autour de pôles d’activités pilotés par des responsables de pôles. En plus d’une contractualisation externe entre les établissements de santé publics et les ARH 5 , une contractualisation interne dans les établissements entre le directeur et le responsable de pôle va être mise en place laissant alors plus de responsabilités aux différents acteurs (DERENNE,2007). Le contrat de pôle a pour ambition d’être une méthode de gestion qualitative et participative. Des objectifs en termes d’activités, de qualité et de finances sont fixés.
Le terrain d’étude : l’hôpital public
Le terrain d’étude considéré dans cette recherche est l’hôpital public. Les hôpitaux privés ne seront donc pas pris en compte, notamment parce que leur fonctionnement diffère totalement de celui des hôpitaux public. • De l’hébergement des indigents à la naissance de l’hôpital moderne : l’adaptation de l’espace à ses fonctions Au départ, les hôpitaux ou hospices sont une création religieuse. Ils ont pour but d’accueillir les pèlerins et les indigents ainsi que de les nourrir (étymologiquement hôpital vient du latin hostis qui signifie étranger). On va par la suite observer un glissement de la charité religieuse et de l’hébergement vers le soin. En effet, au Moyen-âge, avec l’expansion démographique et les épidémies, les étrangers sont remplacés par les indigents, les malades et les mendiants. L’État crée l’Hôpital Général dans un souci de contrôler la population et de réaliser le grand enfermement de tous les indésirables (La Salpetrière à Paris). Il fonctionnera comme un lieu d’incarcération. La Révolution Française nationalise finalement les hôpitaux (décret du 11 février 1784). L’hôpital devient un vrai lieu de soins et transfère le pouvoir hospitalier des religieux aux médecins. Grâce aux évolutions médicales, l’hôpital va successivement changer de formes pour réaliser de nouveaux objectifs. L’hôpital hygiéniste (fin du XVIIIème siècle), puis l’hôpital pavillonaire (fin du XIXème siècle, suite aux découvertes de Louis Pasteur sur la transmission des germes) en sont des exemples. Avec la loi du 21 décembre 1841, l’hôpital s’ouvre à toutes les classes de la société civile. La mission de l’hôpital passe ainsi d’une logique de secours aux pauvres à celle d’assistance aux malades. L’hôpital, comme nous le connaissons aujourd’hui, naît véritablement dans la seconde moitié du XIXème siècle, où il accompagne le grand mouvement d’urbanisation dont il constitue l’un des équipements majeurs. L’ordonnance n°58-1373 du 30 décembre 1958 (ou réforme Debré) crée la médecine hospitalouniversitaire qui repose sur les Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) (MOLINIE, 2005). L’hôpital (CHU) regroupe alors trois fonctions : la fonction de soins, de recherche et d’enseignement. Ainsi, L’hôpital d’aujourd’hui est multiforme, héritier d’un long passé, ancré dans le sol et dans les mentalités. Il s’est adapté au cours du temps, en fonction des évolution techniques, des évolutions de la médecine et des besoins des usagers (humanisation des hôpitaux). « L’hôpital est un établissement qui dispense des soins médicaux et chirurgicaux et peut héberger les malades si leur état le rend souhaitable. » (dic CHOAY, MERLIN, 2000).