Ultrasons et sonochimie
Les ultrasons favorisent ou accélèrent une large gamme de processus chimiques et physiques [1-4]. Ils ont été employés pour différents buts et dans divers secteurs tels que le nettoyage des surfaces, les technologies de l’industrie alimentaire, le diagnostic, la thérapie médicale, le traitement des eaux usées et la synthèse des molécules. Les dernières applications, généralement décrites par le terme sonochimie, se sont avérées être des outils de valeur inestimable et uniques pour la production des nanomatériaux [5], dans les technologies vertes [6] et la synthèse organique [4,7,8].
Ondes ultrasonores
Aperçu historique
En 1880, Pierre et Jacques Curie découvrent l’effet piézoélectrique direct en observant la polarisation électrique d’un échantillon de quartz soumis à une contrainte mécanique. L’effet inverse, établi par Lippman, en 1881, permet de créer une vibration mécanique à partir d’une énergie électrique alternative. En 1926 et 1927, Woods et Loomis [9,10] étudient l’effet léthal des ultrasons sur les cellules, les tissus, les poissons et les grenouilles. Cette découverte conduira Langevin à la mise au point du sonar, première application connue des ultrasons. Dans la seconde moitié du XXe siècle, cette technologie connaît son essor le plus remarquable avec le développement industriel du nettoyage par ultrasons. Cette évolution se poursuit avec l’émergence de la sonochimie et de nombreux travaux de recherche qu’elle recouvre, ouvrant ainsi sur la perspective de nouvelles applications des ondes ultrasonores [11].
Définition
Les ultrasons sont des ondes acoustiques (mécaniques) sinusoïdales dont la fréquence se situe entre 16 kHz et 10 MHz, c’est-à-dire entre les domaines des sons audibles (16 Hz-16 kHz) et des hypersons (> 10 MHz). Il est à noter que les infrasons et les ultrasons sont communément utilisés par les animaux pour communiquer ou pour se diriger [12,13]. Partie I : Synthèse bibliographique Chapitre II : Ultrasons et sonochimie -23- Étant donné le large spectre de fréquence (Figure II-1) occupé par les ultrasons (16 kHz-10 MHz) on différencie classiquement deux zones : Les ultrasons de puissance, forte intensité et faible fréquence, de 16 à 1000 kHz. Dans cette gamme de fréquence, l’effet recherché est une modification du milieu par les ultrasons principalement grâce à la cavitation : l’onde modifie le milieu irradié. Cette modification peut être physique (décapage, dégazage, émulsification) ou chimique (modification du mécanisme réactionnel, production de radicaux libres…), nommée sonochimie. Ces hautes fréquences semblent plus favorables à la production de radicaux libres, et seront préférées par exemple pour des procédés de dégradation de polluants chimiques [14]. Les ultrasons de diagnostic, faible intensité et haute fréquence, de 1 à 10 MHz. Contrairement au cas précédent, dans ce domaine d’application des ultrasons, on ne veut pas que l’onde modifie le milieu traversé. Le but est d’observer l’impact du milieu sur l’onde ultrasonore. Lorsqu’un son traverse un milieu (peu importe sa fréquence), il en ressort modifié : l’amplitude et la phase de l’onde sinusoïdale sont modifiées, c’est pour cela qu’ils sont utilisés pour établir des diagnostics. Cette catégorie d’ultrasons est utilisée entre autres en métallurgie pour la détection de défauts dans les soudures ou la présence d’inclusions, cependant l’application la plus courante est l’échographie en imagerie médicale [12,13,15]. Figure II.1 : Classification des ultrasons en fonction de leur fréquence et de leur puissance [13,15,16].
Génération de l’onde ultrasonore
Les ultrasons sont produits à l’aide d’un instrument ayant un transducteur ultrasonore, un dispositif par lequel l’énergie électrique ou mécanique peut être convertie en énergie acoustique. Les transducteurs électromécaniques sont généralement les plus utilisés, la plupart du temps, ils sont fabriqués en quartz et sont généralement basés sur l’effet piézoélectrique -lorsque des charges électriques égales et opposés sont appliquées aux faces opposées d’un crystal de quartz, des compressions et des dilatations sont produites-. Dans les équipements ultrasonores modernes, les transducteurs piézoélectriques sont fabriqués à partir de céramique couverte de titanate de barium, un tel dispositif convertit au-dessus de 95% de l’énergie électrique en énergie acoustique. Dans la pratique, les dispositifs ont seulement une fréquence de fonctionnement optimale .
Cavitation acoustique
Les ondes ultrasonores peuvent être focalisées, reflétées et réfractées, mais elles exigent un milieu ayant des propriétés élastiques pour leur propagation. Lorsque ces ondes se propagent, les particules du milieu élastique oscillent et transfèrent l’énergie dans la direction de la propagation [12]. Les effets chimiques des ultrasons résultent des processus physiques qui créent, agrandissent et implosent les cavités gazeuses et vaporeuses dans un liquide. Les ondes ultrasonores, comme toutes les ondes sonores, se composent des cycles de compression et d’expansion. Les cycles de compression exercent une pression positive sur le liquide, poussant les molécules les unes contre les autres ; contrairement aux cycles de compression, les cycles d’expansion exercent une pression négative, éloignant les molécules les unes des autres. Pendant le cycle de dépression, une vibration d’intensité suffisante peut produire des cavités. Un liquide est lié par les forces attractives, qui déterminent la résistance à la traction du liquide. Afin de former une cavitation, une grande pression négative liée au cycle d’expansion de l’onde ultrasonore est nécessaire pour surmonter la résistance à la traction du liquide [18] comme l’illustre la Figure II.2. Le principal phénomène responsable de tous les effets des ultrasons est la cavitation.