Le chemin d’un quartier ANRU vers la labellisation EcoQuartier

Le chemin d’un quartier ANRU vers la labellisation EcoQuartier

 La Soude – Hauts de Mazargues : un quartier prédisposé pour la démarche

L’importance de l’histoire et de l’identité du quartier Le quartier de La Soude – Hauts de Mazargues, situé dans le 9ème arrondissement de Marseille, concentre près de 5000 logements, dont 1400 logements sociaux sur une superficie de 120 hectares24 (MPM, 2016). Il fait objet, depuis 2011, d’une convention avec l’ANRU et il a été reconnu « engagé dans la démarche EcoQuartier » en 2015. Comme rappelé par le CES (2013), les quartiers en rénovation urbaine sont très souvent présentés par les professionnels concernés comme très homogènes, partageant la même histoire, la même population et les mêmes problèmes. En réalité, les quartiers intéressés sont très différents les uns des autres, tout d’abord de par l’histoire qui a accompagné leur création, deuxièmement, par leur taille, qui peut être très variée, et encore plus fondamentalement parce qu’ils possèdent tous une identité spécifique. Ce constat est particulièrement vrai pour un quartier comme celui de La Soude – Hauts de Mazargues dont l’histoire et les caractéristiques paysagères ont contribué à forger une identité spécifique et très marquée. Pour comprendre le contenu du projet de rénovation urbaine et les actions qui ont été entreprises sur le quartier, ainsi que l’interaction entre professionnels et habitants, il faut donc remonter dans l’histoire et l’urbanisation de ce quartier, sachant qu’il est aussi composé de sousterritoires qui ont eux-mêmes des caractéristiques et des identités différentes. Ces parties de territoire, comme on le verra plus loin, s’imbriquent de façon différente dans la convention ANRU et dans le dossier EcoQuartier. Nous avons également une autre raison d’analyser les caractéristiques du quartier, comme l’ont d’ailleurs souligné les professionnels interviewés : les particularités de ce quartier le rendent particulièrement propice à la labellisation. La première caractéristique fondamentale du quartier en est la haute qualité paysagère de son territoire, que le quartier doit à sa position géographique, au pied des massifs de Calanques dans l’extrémité sud de la ville. Le territoire se trouve entre mer et Calanques, collines et campagnes. Le 24 Zone Urbaine Sensible La Soude Hauts-de -Mazargues et Zac de la Jarre ensemble. Le chemin d’un quartier ANRU vers la labellisation EcoQuartier Les cas de La Soude- Hauts de Mazargues 47 dossier de candidature EcoQuartier résume bien les différents éléments qui composent la nature dans le quartier : « On retrouve ici tout à la fois cette nature première et les horizons qu’elle dessine, les massifs où souvent la roche affleure et les grands pins qui dévalent les pentes, mais aussi une nature plus domestique, principalement “résidentielle“, celle des jardins des maisons, modestes, ou non, auto construites parfois, ou héritée des parcs des anciennes bastides ; et même une nature plus productive dans ces traces, d’une campagne cultivée » (MUR, 2015).

Une situation favorable mais encore caractérisée par un manque de cohésion sociale et territoriale

Malgré cette situation assez favorable, le quartier – surtout « la Cayolle »- est très stigmatisé et il est connu à Marseille pour être un lieu de trafics de drogue, d’insécurité et d’incivilités. Ces activités illégales et asociales sont favorisées par la présence de grands espaces vides qui sont devenus des zones de non-droit, entre les trois pôles examinés. Un des problèmes sociaux principaux, de façon assez prévisible, est celui de l’emploi avec un taux de chômeurs de 12% sur le secteur de la Soude et 18% sur la Cayolle (Ville de Marseille, 2011). En réalité, la zone accueille plus de 3000 emplois, localisés principalement dans la ZAC de la Jarre, mais il y a un décalage entre les qualifications demandées et celles détenues par la population. Cette dernière est donc très éloignée des emplois qui les correspondraient le plus à cause de la collocation du quartier à l’extrémité sud de la ville et le manque de transport en commun. La pauvreté des cités de la Cayolle et de La Soude est aussi soulignée par le contraste avec le vaste tissu pavillonnaire que les entoure. En effet, la qualité paysagère a commencé à attirer dans cette zone sud de la ville, à partir des années 80, une population aisée. Dans la même période, l’étalement urbain est aussi arrivé dans ce secteur sous la forme de zones d’activité et de zones commerciales de type périphérique. Dans les années 2000, le centre commercial s’ouvre sur l’Avenue de Colgate en devenant un des principaux repères. Comme la plupart des zones, fruits de l’étalement urbain, elle est planifiée essentiellement pour des déplacements en voiture, avec des voiries surdimensionnées. Ce type d’urbanisation, par tranche, que l’on vient de décrire dans ces pages, correspond à un territoire fragmenté constitué de secteurs qui ne communiquent pas les uns avec les autres, qui restent difficiles d’accès et réservés à la voiture. De plus, le quartier se trouve coupé du reste de la ville de par les terrains vagues avoisinants, une mauvaise connexion de la voirie et un manque de transport public. L’absence de coordination a ainsi engendré un quartier marqué par de fortes difficultés, en termes de fonctionnement urbain et social. Les problèmes sociaux ne concernent pas seulement des problèmes d’emploi et de délinquance, mais aussi un manque de cohésion entre les différentes classes sociales qui habitent le quartier. En effet, malgré la proximité physique, les deux groupes sociaux ne partagent aucun moment ou espace dans le quartier. Cette situation est bien expliquée par l’actuel chef de projet du quartier : « Le quartier est habité par une population très différente, les gens du parc social, très pauvres, et les gens qui ont acheté sur plan des logements de très haut de gamme. Aujourd’hui, on ne peut même pas dire que les deux groupes cohabitent car ils ne se croisent pas dans les équipements, ils ne se croisent pas au centre commercial, ils ne se croisent pas à l’école. Il est donc plus correct de dire qu’ils coexistent » (Chef de Projet, 01/07/2016). Une des causes de cette distance sociale est aussi le fait que le quartier s’est développé pour la voiture. En effet, la classe plus aisée qui a emménagé dans le quartier l’a fait aussi avec l’intention d’utiliser le transport privé pour rejoindre les équipements de leur choix, plutôt que d’utiliser ceux du quartier. 

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