Les gènes PhoP-dépendant à activation indirecte: les connecteurs du système
Il existe plusieurs connecteurs décrits dans le régulon PhoP comme les protéines PmrD (E. coli, S. Typhimurium, Shigella), SlyA, les systèmes à deux composantes PmrAB (Salmonella, E. coli), RcsB. A partir de quelques exemples je vais essayer d’introduire des types de régulation PhoP-dependant médiés par des connecteurs pour la transcription de gènes indirectement régulé par PhoP. (i)- Modèle « Boolean AND gate ». Ce modèle met en exergue la nécessité d’avoir tous les signaux au plus fort (« input ») pour avoir le plus haut niveau de réponse (« output »). Dans le cas de PhoPQ, il se traduit à travers l’exemple du TCS SsrB/SpiR (figure 7A). PhoP-P peut activer la transcription des gènes ssrB (RR) et spiR (HK) codant pour un autre système à deux composantes essentiel à la production du système de sécrétion de type III Spi/SsA régulant la survie de Salmonella dans les cellules phagocytaires (Ochman et al. 1996). En parallèle de cette activation, PhoP-P peut activer la transcription d’une troisième protéine non identifiée (Z sur le schéma) qui va permettre également l’expression de SpiR. En réponse à un stimulus extérieur SpiR va phosphoryler SsrB qui va activer la transcription de spiC son gène cible (Bijlsma et Groisman 2005). On parle de modèle « Boolean AND gate » car il y a nécessité de deux signaux concomitants pour transcrire le gène spiC: le Mg2+ pour PhoPQ et un signal indéterminé pour SsrB/SpiR. (ii)- Modèle « Boolean OR gate ». Ce modèle désigne un circuit dans lequel au moins un des signaux doit être fort pour obtenir une réponse forte. Là encore ce type de régulation peut être représenté chez PhoP (figure 7B). SsrB/SpiR est régulé par PhoP (voir ci-dessus) mais est aussi régulé par un autre système à deux composante : EnvZ/OmpR. Alors que PhoP contrôle l’expression de SsrB à un niveau transcriptionnel et post transcriptionnel, OmpR ne régule que l’initiation de la transcription de SsrB et SpiR à partir de promoteurs séparés (Bijlsma et Groisman 2005). L’hypothèse pour expliquer cette double régulation est que la régulation par PhoPQ d’une part et par EnvZ/OmpR d’autre part permettrait de générer différentes quantités de SsrB phosphorylé impliquant donc une expression, et une fixation sur des promoteurs différents dans les macrophages (Bijlsma et Groisman 2005 ; Lee, Detweiler, et Falkow 2000). Ainsi l’expression de spiR est dépendante de OmpR dans les deux heures suivant l’internalisation de la bactérie, alors que 6 heures après l’internalisation, l’expression dépendante de PhoP qui est requise (Lee, Detweiler, et Falkow 2000 ; Feng, Oropeza, et Kenney 2003). Ceci est donc Les gènes PhoP-dépendant à activation indirecte: les connecteurs du système Figure 8 : Le connecteur PmrD et son rôle central dans la transmission du signal. L’opéron pbgPE responsable de la modification du LPS et objet d’étude de cette thèse est représenté dans son intégralité (7 gènes en tout). D’après Groisman 2001, avec modifications. 17 un schéma « Boolean OR gate » puisque selon la situation la bactérie va réguler l’expression de ses gènes cible via l’un ou l’autre des systèmes à deux composantes.
Le cas de SlyA
De récentes études ont montré que de petites protéines, aussi appelées connecteurs, sont capables de lier les systèmes à deux composantes et de modifier leur activité à un niveau post traductionnel (Tu et al. 2006 ; Kox, Wösten, et Groisman 2000 ; Kato et Groisman 2004 ; Bougdour, Wickner, et Gottesman 2006). SlyA est une protéine de liaison à l’ADN régulant l’expression de gènes cibles comme ugtL (Shi et al. 2004) et pagC ((Nishio et al. 2005) de manière PhoP-dépendante. Elle est également retrouvée chez Yersinia (Ellison, Lawrenz, et Miller 2004). Les gènes ugtL et slyA sont tous les deux des gènes PhoPdépendant mais pour pouvoir transcrire ugtL, PhoP et SlyA doivent conjointement se fixer sur la région promotrice d’ugtL. l’hypothèse a été faite que les deux protéines sont requises pour pouvoir surmonter la répression induite par l’histone-like protéine H-NS (Shi et al. 2004 ; Navarre et al. 2005) alors que seul SlyA permettrait d’avoir un rôle anti-répresseur de H-NS dans le cas de pagC (Navarre et al. 2005).
(iv)- Le cas de PmrD/PmrAB
Un des exemples les plus documenté est le connecteur PmrD (figure 8). Il est également retrouvé chez d’autres bactéries comme E. coli (YneN) (Eguchi et al. 2007). PmrD permet de transférer l’activation de PhoP à un deuxième système à deux composantes PmrAB décrit comme ayant un rôle dans la régulation des gènes responsables de la modification du LPS : pbgPE. PmrAB est un système à deux composantes composé d’une histidine kinase PmrB et d’un régulateur transcriptionnel PmrA. PmrB se trouve dans le périplasme et est capable de sentir l’environnement il est d’ailleurs activé par le Fe3+ chez Salmonella et Yersinia pour revue voir (Flamez et al. 2007). PmrB possède une double fonction de phosphatase et kinase, il peut donc phosphoryler et déphosphoryler PmrA. Lorsqu’il est transcrit par PhoP, PmrD va se fixer sur la forme phosphorylée de PmrA et empêche sa déphosphorylation par PmrB stimulant la transcription des gènes PmrA-activés et inhibant la transcription des gènes PmrA-réprimés. Le connecteur PmrD est donc essentiel à la connexion des deux systèmes à deux composantes PhoPQ et PmrAB. Comme montré précédemment, PhoP nécessite une régulation fine afin d’éviter tout emballement du système ainsi, lorsque les signaux bas Mg2+ et Fe3+ sont présents en même temps, PmrA peut se fixer sur le promoteur de pmrD pour en Figure 9 : L’immunité chez les insectes. cellulaire (à droite) et une composante humorale (à gauche). : L’immunité chez les insectes. Elle est caractérisée par deux composantes cellulaire (à droite) et une composante humorale (à gauche). D’après Duvic Bernard Elle est caractérisée par deux composantes : une composante . 18 réprimer l’expression afin d’éviter une trop grande accumulation de PmrA-P et ainsi une modification du LPS aberrante voire couteuse énergétiquement pour la bactérie (Kato, Latifi, et Groisman 2003).