POSTULAT DE DEPART: LES EXIGENCES DE LA CONDITION HUMAINE
Une des principales préoccupations de ce travail est l’être humain. Or, il est difficile d’aborder l’être humain dans toutes ses composantes parce que c ‘est un être complexe. Il faudrait recourir à plusieurs sciences pour arriver à l’étudier dans son ensemble. Le présent travai l se veut d’étudier uniquement quelques aspects de cet être complexe et se limitera aux principales exigences de la condition humaine. Cette première partie du travail consistera à présenter brièvement les exigences qui font qu’il y ait humanité. Ainsi, seront développées successivement trois exigences à savoir la connaissance, l’organisation de la cité et l’ éducation. Elles constituent les problématiques d’ancrage du présent projet de thèse . Une problématique étant un questionnement, chaque prob lématique d’ancrage sera développée en fonction du questionnement que nous avons dressé. 1. La problém atiq ue de la conna issance Les réflexions se porteront sur la connaissance, une des exigences de la condition humaine et qui est inhérente à l’humanité. Mais d’abord il est nécessaire de définir ce qu’on entend par connaissance. La connaissance, prise au singulier peut se définir comme étant « la faculté de connaître, de se représenter» PLI 1999. Au pluriel, elle renvoie à « un ensemble de connaissances plus ou moins systématiques, acquises par une activité menta le suivie.» (ibid). Pour le dictionnaire Larousse, il s’agit d’une «action, fait de comprendre les traits spécifiques de quelque chose »1 Cette première approche nous perme t d’appréhender la connaissance de manière générale, les analyses suivantes seront, elles, plus détaillées et plus approfondies.
La connaissance, une fonction primitive
Le psychisme, éloignement de la condition animale L’être humain s’éloigne de la condition animale par son intelligence inventive (Panie l, 1967, p 366).Pour Panie l, l’homme a créé des outils qui lui ont permis d’améliorer sa condition de vre. Il est vrai cependant que certains animaux tels que les singes anthropoïdes, aient également la capacité d’utiliser des outils et même d’en fabriquer occasionnellement. Mais, l’être humain a la facuIté de créer des outils permanents, qui lui permettent de s’imposer dans le monde des vivants tandis que pour les animaux, ces outils sont impro visés et ne sont jamais permanents. Il est possible de citer comme exemple les moyens de locomotion, qui ont révolutionné la vie de l’homme et qui lui ont permis de réduire l’espace dans lequel il est. A 1’heure actuelle, la liste est loin d’être exhau stive , au xxr-«siècle, les technologies occupent une place importante dans la vie de 1’homme, elles lui permettent par exemple de réduire considérablement le temps et l’espace à travers les nouveaux moyens de communication. La pensée conceptuelle et le langage articulé sont également, pour l’Homme, des moyens, puissants, d’assurer sa puissance sur la nature (Ibid, p 368). En effet, même si les animaux ont aussi un langage, seul l’Homme est capable de nommer les choses, les objets concrets ; il exprime aussi les qualités des objets, leurs relations spatiales et temporelles. Outre cela, l’Homme, par son intelligence peut concevoir des ensembles d’objets liés entre eux par des propriétés bien définies, mais qui n’ont pas de réalités matérielles propres. « Une des premières manifestations de 1’humanité proprement dite, un des signes les premiers en date par lesquels l’homme a prou vé qu ‘il se dégageait de la condition animale, a été certainement l’effort qu ‘il a donné pour se rendre compte de ce qui existe réellement ; pour y réfléchir. » (Romains, 1960, P 108). Cette analyse de Romains souligne qu’il y a humanité quand il y a un effort consistant à se rendre compte de ce qui existe réellement, pour y réfléchir. Cette réflexion sur ce qui existe réellement est propre à l’être humain, les animaux ne sont pas capables d’une telle réflexion. A ces analyses s’ajoutent les citations des grands philosophes tels que Blaise Pascal qui souligne la grandeur de 1’homme « Pensée fait la grandeur de 1′ homme » (Pascal, 1934, p 42). II pense que la dignité de l’homme consiste en la pensée, d’ailleurs il ajoute que « l’ homme est un roseau pensant » (ibid) . Descartes lui aussi, avec la célèbre locution latine : «Cogito ergo sum» souligne la pensée qui fait 1′ humanité. Le psychisme est alors l’élément qui différencie l’homme de l’animai. Nous pouvons même dire que c’est sa grande richesse dans la mesure où grâce à lui, l’homme est capable d’évoluer, il est capable d’agir en fonction de son milieu. C’est ainsi par exemple que l’homo sapiens a pu réfléchir et dompter le feu.
Une fonction reposant sur des opérations
Romains parle de l’effort de l’homme pour se rendre compte de ce qui existe réellement ; pour y réfléchir. Il reconnaît que cette réflexion n’est pas encore tout à fait pragmatique (Romains, 1960, p 108), mais il s’agit déjà d’une opération désintéressée selon Romains, c’est-àdire qui ne répond pas aux besoins immédiats de l’être humain et générale c ‘est-à-dire qui est valable pour un nombre illimité de cas et pour un temps indéfini. A partir de cette analyse , quelques caractéristiques de la connaissance peuvent être soulevées à savoir qu’elle est une opération désintéressée, qui tente le dépassement de l’ immédiat, et que l’humanité a des limites à repousser par rapport à la connaissance. Elle est également universelle, car elle est valable partout et toujours.
La connaissance, une démarche spécifique
Le discours du vrai comme aboutissement
La connaissance est une démarche spécifique, une activité humaine , un processus dont l’ aboutissement est le discours du vrai. Or le vrai n’a pas une origine unique . Si nous parlons par exemple de l’origine de la vie, il existe plusieurs discours qui tentent de tenir le vrai sur ce sujet. La science parle par exemp le de la théorie de l’évolutionnisme, de la théorie du « big bang» ; tout comme la religion peut parler de la création du monde à travers la Genèse de la bible chrétienne ; les différentes mytho logies peuvent également tenir des discours différents qui peuvent être contradictoires ou comp lémentaires avec les autres discours. Il est clair à partir de ces exemples que le discours du vrai de la science ne peut pas être le discours du vrai de la religion. Dans le présent travail, nous voulons focaliser nos réflexions sur le discours du vrai qui vient de la raison et du bon sens.
La connaissance: une démarche scientifique
En tant que chercheur en construction, c’est l’entrée du discours du vrai par rapport à la science qui nous intéresse . Afin de voir de quel discours du vrai il s’agit, nous ferons une approche définitoire de la science. Selon le PLI, 1999 «c’est un ensemble cohérent de 7 connaissances relatives à certaines catégories de faits, d’objets ou de phénomènes obéissant à des lois et vérifiées par les méthodes expérimentales. » Ces définitions généralistes permettent déjà de dégager les points importants quand il s’agit de la connaissance relative à la science. D’abord, il est question d’ensemble, de réunion d’éléments formant un tout. La valeur universelle de la connaissance peut être également déduite, elle est valable partout. Ensuite elle porte sur un objet bien précis, qui, obéit à des lois, relatives à la spécificité de cet objet, et elle repose sur une méthode impliquée par cette spécificité. Enfin, toute connaissance scientifique peut être reproduite et vérifiable. Des auteurs tels que Tremblay, affirme que « Un des premiers objectifs de l’activité scientifique est d’élaborer des explications. L’explication est le résultat d’une analyse systématique d’un ensemble de faits de réalité plus ou moins bien connus » (Trembley, 1968, p13). Louis Pasteur, pour sa part, affirme que la science est « la connaissance obtenue par l’observation systématique, l’expérimentation et le raisonnement ». Le célèbre microbiologiste met l’accent sur les fondements méthodologiques de la science. Ainsi, selon lui, toute méthodologie scientifique procède de l’observation systématisée, de l’expérience contrôlée et du raisonnement. (ibid, p 14). Ces approches nous montrent clairement que la connaissance est vraiment une démarche scientifique et nécessite une approche particulière relative à la science. Descartes pense la même chose, dans l’intitulé de son ouvrage, il montre clairement comment arriver à la vérité: « Discours de la méthode pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences.» Ainsi, Descartes réfléchit sur la vérité qui est accessible dans les sciences, il y a lieu de bien conduire sa raison pour y parvenir. En effet, il pense que tout le monde a ce qu ‘il appelle le bon sens ou la raison c’est-à-dire « la puissance de bien ju ger et de distinguer le vrai d’avec le faux » (Descartes, p 7). Cependant, ce n’est pas suffisant d’après lui, « car ce n’est pas assez d’avoir l’esprit bon, il faut l’appliquer bien» (Ibid). C’ est ainsi que Descartes propose les quatre règles de la méthode pour chercher la vérité : « Le premier était de ne recevoirjamais aucune chose pour vraie, que je ne la connusse évidemment être telle : c ‘est-à-dire d ‘éviter soigneusement la précipitation et la pr évention ; et de ne comprendre rien de plus en mes j ugements, que ce qui se présenterait clairement et si distinctement à mon esprit, que je n ‘eusse aucune occasion de les mettre en doute. 8 Le second, de diviser chacune des difficultés que j ‘examinerai, en autant de parcelles qu ‘Use pourrait et qu ‘Userait requis pour les mieux résoudre. Le tro isi ème, de conduire par ordre mes pensées, en commençant par les objets les plus simples et les plus ais és à connaître, pour monter peu à peu, comme par degrés, j usqu’à la connaissance des plus composés; et supposant même de l ‘ordre entre ceux qui ne se précède point naturellement les uns les autres. Et le dernier, de fa ire partout des dénombrements si entiers, et des revues si générales, que jefusse assuré de ne rien omettre. » (ibid, p 23-24). La connaissance est alors une démarche scientifique, avec ses caractéristiques et le travail de l’esprit requis pour y parvenir. La vérité se trouve dans les sciences, aussi est-il important de remettre en cause la connaissance quand elle vient de la coutume et des exemples car ces derniers fournissent un autre type de vérité.