Le choix d’un bon régime de change
Certains économistes considèrent, qu’il est dangereux pour un pays en voie de développement de fixer son taux de change, à moins qu’il n’ait vraiment les moyens de la faire. En Asie du sud-est, à titre d’exemple, la confiance dans les régimes de changes fixes a entraîné une augmentation d’emprunt en monnaie étrangère, chose qui a conduit à une dévaluation de la monnaie nationale de ces pays, et à une augmentation des dettes extérieures. Mais, certains pays ont réussi à maîtriser l’inflation avec succès, sont ceux qui ont adopté des régimes de change plus flexibles. En revanche, les pays qui ont conservé des changes fixes ont subi une appréciation réelle de leur monnaie et une détérioration de leur solde courant, le régime de changes fixes s’est révélé intenable à long terme. Inversement, l’expérience Mexicaine a enseigné qu’il est possible pour un grand pays d’adopter avec succès un régime de changes flexibles.
Les facteurs déterminant le choix d’un bon régime de change
Le choix d’un régime de change dépend d’un ensemble de facteurs et fait intervenir de divers types d’arguments : -Micro-économiques (via les effets positifs de la stabilité des changes sur les choix des agents et l’intégration économique) ; – Macro-économiques (via le rôle du taux de change comme ancrage nominal externe / comme instrument d’ajustement) ; – D’économie politique (via les gains de crédibilité d’un régime de change fixe par rapport à une autre technique de commitment, comme l’indépendance de la banque centrale) ; – Internationaux (via le rôle de la fixité des changes comme un mode de coordination des politiques économiques). – Nous pouvons ajouter un autre facteur, comme l’implication des pays partenaires, qui sont sensibles aux conséquences d’un régime de change sur leur compétitivité relative. Le premier élément d’une politique de change est le choix d’un régime de change, qui spécifie d’une part la réglementation du marché des changes, d’autre part, la manière dont les 1 Paul Krugman & Maurice Obstfeld. (2007). Economie internationale. Pearson, 10éd. Paris, pp.682-83. Le choix d’un bon régime de change Chapitre I : Evolution du système des paiements internationaux et le choix d’un bon régime de change 46 autorités souhaitent ou ne souhaitent pas influencer les cours. Le régime de change suppose un engagement durable sur des règles de politique économique, car il faut se donner les moyens de le faire respecter et il doit être cohérent avec les politiques monétaires et budgétaires. Les types des régimes de change diffèrent d’une économie à une autre, on distingue trois types de régime de change, comme nous l’avons vu précédemment, un régime de change fixe, où la banque centrale s’engage à maintenir la parité de sa monnaie à un niveau fixe, un régime de change semi-fixe qui est le régime le plus répandu à nos jours, et enfin, le régime de change flottant qui est entièrement régi par les marchés de changes.
Lien entre la politique économique et la détermination d’un régime de change
Comme nous l’avons déjà dit, le choix d’un régime de change, est l’un des objectifs de la politique économique, connaitre et prévoir les taux de change des monnaies révèle toute ambiguïté et limite les incertitudes dont s’offrent les partenaires de l’économie dans leurs relations internationales. Il est bien favorable aussi à l’attractivité ou à la détermination des investissements domestiques qu’aux IDE et, donc à la croissance économique. Il facilite en outre le travail des gestionnaires financiers et les comptables nationaux. En réalité, un régime de change qui permet d’atteindre le mieux ces objectifs macroéconomiques, c’est le régime de changes fixes. Ce dernier assure une stabilité économique, l’exemple de la vulnérabilité aux chocs extérieurs, donc il empêche d’amortir ces chocs par un mécanisme simple dit d’ajustement du taux de change nominal.* Les partisans du régime de change fixe le considèrent comme un système ou une contrainte externe anti-inflationniste, l’exemple du SME qui pratique une politique de désinflation qui repose en partie sur ce type de mécanisme.
Contraintes externes au choix d’un régime de change
Certaines contraintes limitent d’adopter un régime de change par un pays. Par exemple : 1 Amina Lahrèche Revil. (2003). Les taux de change. Publié dans « le CEPII, l’économie mondiale 2000. Edition la Découverte, collections Repères. Paris, pp.93-103. * Il existe une autre explication de la vulnérabilité aux chocs extérieurs, est celle de la construction des zones monétaires optimales que ses pays membres à travers leurs politiques de flexibilité des prix et la libre mobilité des facteurs puissent résorber ces chocs. Les pays qui souhaitent conserver l’autonomie de ses politiques monétaire, et qui limitent la mobilité des capitaux peuvent adopter un régime de changes flottant. – Inversement, et dans un contexte de mobilité parfaite des capitaux, un pays ne peut avoir un régime de change fixe et une politique monétaire autonome à la fois. En outre, en régime de change fixe et à court terme, une politique de relance entraine une augmentation de la masse monétaire et une baisse du taux d’intérêt qui se traduit par une dépréciation de la monnaie nationale. Et pour protéger la parié de sa monnaie et éviter toute variation du taux de change, la banque centrale intervient et rachète sa monnaie contre ses réserves de change, donc, c’est pour cette raison que la stimulation monétaire sera annulée.
L’influence des variables politiques sur le choix du régime de change
Depuis les années 1990, une littérature qui s’est présentée et développée pour expliquer le choix du régime de change en intégrant les facteurs politiques qui peuvent influencer les taux de change, comme les groupes d’intérêt domestiques, les institutions politique et le processus électoral.
L’influence des groupes d’intérêt domestiques
L’influence des agents économiques sur les questions liées au taux de change provient du fait que le taux de change influence sur les prix relatifs. Une économie qui voudrait à la fois favoriser ses exportations et le pouvoir d’achat de ses consommateurs devrait faire face à deux objectifs difficilement conciliables. La dépréciation de la monnaie nationale par rapport aux devises étrangères devrait rendre les exportations moins chères et les importations plus chères. Les conséquences attendues sont, d’une part, des gains pour les exportateurs et, d’autre part, des pertes pour les importateurs et les consommateurs dont leur pouvoir d’achat va se dégrader à la suite de l’augmentation des prix des importations. Une appréciation doit avoir les effets inverses. Nous remarquons, qu’il y a présence des perdants et des gagnants et cela montre que le taux de change a des effets de distribution au niveau domestique (sur le choix du régime de change et sur le niveau du taux de change). 1 Jean pierre Allegret. (2005). Les régimes de change dans les marchés émergents, quelles perspectives pour le XXIème siècle ? Vuibert. Paris, pp.38-43. Chapitre I : Evolution du système des paiements internationaux et le choix d’un bon régime de change 48 D’une manière générale, les investisseurs domestiques ont l’intérêt d’avoir une monnaie forte pour acquérir des actifs étrangers et une stabilité des taux de change afin de réduire et éliminer les risques de changes. Pour les producteurs de biens échangeables, ils préfèrent une monnaie nationale faible (dépréciée) qui rend leurs produits moins chers par rapport aux produits étrangers. A contrario, les producteurs de biens et services non échangeables, quant à eux, ils préfèrent une monnaie forte en raison des gains de pouvoirs d’achat que cela leur procure. En termes de régime de change, les producteurs de biens non échangeables ont une préférence pour la flexibilité. En effet, étant peu sensible aux variations des taux de change mais très sensibles aux évolutions cycliques internes* . Pour les producteurs des biens échangeables, sont quant à eux dans une position différente selon qu’ils sont exportateurs ou importateurs. Les exportateurs préfèrent un certain degré de fixité qui leur assure une stabilité de leur recette exprimée en monnaie domestique. Les importateurs, quant à eux aussi, ont une préférence pour une flexibilité des taux de change en raison du risque d’appréciation de la monnaie domestique à la suite d’adoption des changes fixes.
L’influence des institutions politiques
Ils peuvent influencer sur le choix du régime de change à trois niveaux qu’il convient de distinguer :
Le degré d’instabilité politique
L’adoption d’un régime de change fixe peut nécessiter des mesures d’ajustement destinées à le rendre soutenable. Il s’agit notamment pour le gouvernement d’être en mesure de maîtriser les dépenses budgétaires. Dans cette perspective, il existe un lien entre l’instabilité politique, appréhendée ici en termes de durée des mandats et du rythme de changement politique à la suite d’élections, et à la capacité des gouvernements à mettre en œuvre les mesures nécessaires pour maintenir le régime de change fixe. Il s’agit alors de * Les producteurs de biens non échangeables préfèrent que les autorités utilisent la politique monétaire à des fins conjoncturelles montrer les liens suivants : une forte (faible) instabilité politique s’accompagne d’une probabilité élevée d’adopter un régime de change flexible (fixe). Exemple : Lorsque l’inflation excède l’augmentation des salaires, le taux de chômage courant est inférieur au taux naturel. Supposant que les salariés déterminent le salaire avant d’observer les chocs affectant l’économie (chocs extérieurs, le taux de dépréciation de la monnaie nationale et inflation). Cela montre que les salariés fixent le salaire en fonction de leurs anticipations en matière d’inflation. Le gouvernement, quant à lui, il détermine la politique de change après avoir observé le salaire et les chocs extérieurs.
La nature du système législatif
Le choix du régime de change est influencé par le processus législatif. Exemple : Un système majoritaire favorise l’adoption d’un régime de change flexible. En effet, ce qui caractérise un tel système, c’est qu’un faible déplacement de votes se traduit par des conséquences importantes en termes politiques. Les autorités préfèrent conserver l’opportunité de manipuler la politique monétaire, et donc renoncer à un régime de change fixe.
L’approche partisane
L’idée de base est de considérer que les partis politiques représentent les préférences monétaires des différents groupes sociaux. Il existe dans la littérature une présomption selon laquelle les partis situés à droite ou au centre ont une propension à favoriser la stabilité des prix et la fixité des changes. Les partis de gauche auraient une préférence pour les changes flexibles.