La situation économique
Le taux de change et l’économie avant 1989
Nous allons analyser la situation économique de L’Algérie par quelques indicateurs macroéconomiques durant deux sous périodes: i) situation économique durant la période 1970-1986 ii) la situation économique durant la période 1987-1989 Notre choix de ces sous périodes n’est pas arbitraire. Ceci est justifié par: – L’année 86 est caractérisée par une chute des prix de pétrole et une dépréciation de dollar. – la signature de la première convention avec le FMI est en mai 89 – nous pouvons considérer que l’année 1990, constitue une année de réforme du système de planification de l’économie algérienne : planification centralisée vers une planification décentralisée. De ce fait, la période 1986-1989 est une période de préparation de la transition graduelle vers l’économie de marché
L’économie algérienne avant 1986
La principale question qui est soulevée par les décideurs politiques et économiques algériens durant cette étape peut se résumer dans la question suivante : Dévaluer où recours à l’endettement extérieur ? Pour répondre à cette question, nous analysons la situation économique de l’Algérie à partir de l’année 70 en utilisant quelques indicateurs économiques, tels que: le solde de compte courant; la production intérieure brute réelle et ratio de service de la dette extérieure. La situation économique de L’Algérie 149 Ce dernier critère sera le plus fréquemment utilisé dans ce chapitre, car il nous renseigne sur la solvabilité du pays. Autrement dit, le ratio de service de la dette mesure la capacité propre du pays pour la couverture du montant annuel du service de la dette. Selon le F.M.I, si ce ratio dépasse 0,5, l’Etat de l’économie de ce pays nécessitera un programme de stabilisation, c’est-à-dire que l’état de cette économie présente un besoin d’ajustement. Ainsi les années 70 avaient vu l’Algérie lancer un vaste programme de développement industriel. Plusieurs facteurs avaient encouragé cette politique. Ceux-ci peuvent être résumés dans les points suivants : i) Les prix des produits de base (prix de pétrole), qui constituent la principale ressource de l’Algérie, avaient enregistrés une augmentation durant les années soixante dix. Le prix de pétrole était de 1,30 dollars en 1970. Il avait augmenté à 10,72 dollars en 1975.
Cette augmentation des prix avait généré une forte croissance des recettes d’exportation. Ces revenus en devises tirées de l’exportation avaient augmenté les moyens d’autofinancement propre et avaient facilité le recours à l’emprunt international. ii) Un taux d’intérêt très faible et très attractif au recours à l’emprunt durant la période 1960-1975 avait contribué au lancement de cette politique d’industrialisation. Le taux d’intérêt débiteur pour le dollar américain, par exemple, variait entre : 4.8 % en (1960) à 5,25 %.en (1975). Comparativement au coût de l’emprunt de dollar entre 1980 et 1986, ce taux était relativement faible. iii) Le niveau d’inflation mondiale avait baissé entre 1960 et 1970. Cette baisse avait constitué un facteur, qui favorisait le développement industriel. La diminution du taux d’inflation mondial avait permis la stabilité du prix mondial des équipements industriels nécessaires au programme de développement basé sur l’industrialisation. vi) Durant la période 1960-1970 le système monétaire international (SMI) était régi par une politique de change fixe. Ce système permettait d’encourager les importations d’équipements avec une absence totale de risque de change. Le financement de cette industrialisation avait nécessité à la fois la mobilisation de l’épargne nationale provenant des recettes d’exportation d’hydrocarbure et le recours à l’épargne internationale.
Lorsque l’épargne de la nation ne couvrait pas le coût de l’investissement, le solde courant de la balance de paiement était nécessairement négatif. Pour rétablir l’équilibre de ce compte, deux solutions s’offraient : 150 i) la réduction de déficit budgétaire : cette réduction se fait: soit par la réduction des dépenses budgétaire, en réduisant le coût de l’investissement, soit par l’augmentation de recette budgétaire ; ii) le recours ver l’épargne internationale. Le choix de la première solution posait souvent des difficultés techniques. La grande taille des investissements était souvent retenue dans des plans de développement globaux. Ce qui nécessitait souvent la révision de l’ensemble du plan d’investissement. Entre 1970-1985, le développement de l’Algérie était soumis à une planification globale. La réalisation de tout projet d’investissement nécessitait au préalable une étude, qui devait passer par différentes étapes, afin d’aboutir à son inscription définitive dans le plan de développement.
La lourdeur de cette procédure rendait difficile toute modification du projet d’investissement. Pour pallier à cela, l’Algérie avait opté pour un recours aux emprunts extérieurs. Le choix d’emprunter de l’extérieur présentait l’avantage de rétablir l’équilibre dans le court terme. Mais il présentait les inconvénients suivants : i) l’emprunt ne peut être réalisé, que si le pays dispose des garanties qui lui permettent d’honorer les remboursements futurs ; ii) il génère des coûts financiers important ; iii) le recours à l’emprunt comme moyen pour rétablir l’équilibre ne peut être que temporaire ; vi) il limite l’indépendance financière du pays ; vii) il reporte des coûts présents sur les générations futures. Le recours aux emprunts extérieurs s’appuyait sur la rente anticipée, puis sur le principe de la profitabilité de l’endettement. Or ce dernier comportait une double signification : i) les emprunts extérieurs permettaient à un pays de se constituer rapidement un capital physique ; ii) le coût nominal des emprunts était allégé par le taux d’inflation de l’économie internationale.
Déséquilibres macroéconomiques et taux de change
Après avoir étudié les ratios de l’endettement extérieur de l’économie algérienne avant 1986, il est très utile d’aborder une analyse des déséquilibres macroéconomiques de l’économie algérienne pour voir le rôle joué par le taux de change dans le rétablissement de l’équilibre de la balance de paiement. Théoriquement, le taux de change agit directement sur l’équilibre externe et indirectement sur l’équilibre interne. La politique monétaire et la politique budgétaire agissent sur les déséquilibres économiques. Les instruments de ces deux politiques combinés avec le taux change, permettent de réaliser l’équilibre interne et externe et agir sur les objectifs emploi, inflation, etc. De cela, découle la question suivante : Quel rôle a joué le taux de change au rétablissement de l’équilibre de l’économie algérienne durant la période 1970-1986 ? Pour répondre à cette question, nous allons, dans un premier temps, donner les caractéristiques de la politique économique algérienne.
Dans un second temps, nous allons analyser les déséquilibres interne et externe. L’analyse des soldes de la balance de paiement sera examinée dans le déséquilibre externe. Cela fera apparaître que les dettes extérieures et l’abaissement du prix de pétrole sont responsables du déficit de compte courant. L’étude du déséquilibre interne portera sur la politique monétaire et budgétaire. Nous montrerons que l’imprudence de ces deux politiques est la cause du déséquilibre interne. §2-A-1-a-a) La caractéristique de la politique économique algérienne avant 1986 : Durant les années 70 et 80, la politique économique algérienne était caractérisée par une économie administrée. Par conséquent les prix, les taux d’intérêts domestiques, la masse monétaire et le taux de change étaient déterminés selon une logique administrative. Durant cette période, le taux de change était stable. Le dinar Algérien était inconvertible et surévalué. Théoriquement, la surévaluation a pour objet de gonfler l’importation et de réduire les exportations. On peut, donc, tirer deux avantages de la surévaluation : – Le surinvestissement. – La surconsommation. 155 La surévaluation de la monnaie nationale réduit la compétitivité internationale du pays. Une telle mesure avait été retenue par l’autorité publique, lors du lancement des différents plans pour encourager la politique industriel. Cette dernière était fondée sur l’acquisition à partir de l’étranger des technologies les plus avancées.
La surévaluation permettait de diminuer le coût payé par les entreprises pour l’acquisition de ce type d’investissement. L’objectif recherché du pouvoir public, à travers cette politique d’administration du marché de change, était de mettre l’économie algérienne à l’abri de perturbation de l’économie mondiale. Mais certains économistes algériens considéraient que la surévaluation et l’inconvertibilité du dinar algérien étaient à l’origine de dysfonctionnement économique, des déséquilibres macroéconomiques et de surendettement.
Déséquilibre externe
Selon la théorie de la balance de paiement, il y a une relation étroite entre les soldes de la balance de paiement (solde de bien et service, solde courant, …..) et le taux de change. Autrement dit, on peut ajuster un déficit ou un excédent du solde de paiement par une dépréciation ou une appréciation du taux de change. Un solde de la balance des paiements positif signifie un excèdent de cette balance. Pour rétablir l’équilibre, il faut apprécier le cours nominale de la monnaie nationale. Par contre un solde de la balance des paiements négatif signifie un déficit. Pour rétablir l’équilibre, il est nécessaire de déprécier le taux de change.
Ce processus nous incite à examiner les soldes de la balance de paiement algériennes et, en particulier, le solde de compte courant. Car ce dernier permet d’apprécier l’état des équilibres extérieurs de la nation. Comment peut-on le calculer ? En se basant sur la théorie d’absorption et en prenant comme point de départ l’identité comptable entre le produit national et la demande globale. La demande globale d’un pays est constituée, d’une part, de l’absorption, c’est-à-dire la demande intérieure brut résultant de la demande de consommation et de demande d’investissement, et, d’autre part, de ce qu’on peut appeler la demande extérieur net. Ceci nous donne: Y C I ( ) X – M C C I I (X – M) = + + = a + m + P + b + (2.1) avec Y , représente le produit intérieur brut;C la consommation finale intérieure, cette dernière peut être décomposée enC (consommation d’administration) et a Cm (consommation 156 de ménage), I l’investissement de l’entreprise, qui peut être décomposé en p I ( investissement privé) et b I ( investissement public). On pose : A = C + I avec A , représentant l’absorption La différance entre Y , le produit intérieur brut et A , l’absorption, constitue le solde de la balance commercial. Ce dernier signifie qu’un pays ne peut consommer et investir plus qu’il ne produit, sauf s’il obtient de l’extérieur les ressources qui lui font alors défaut. Si on ajoute aux deux termes de l’équation (2.1), le solde net des revenus provenant des transferts privés et officielsR , on obtient : Y R C I ( ) X – M R C C I I (X – M R) + = + + + = a + m + P + b + + (2.2) Dans l’équation (2.2), Y + R représente le produit national brut (PNB) et l’expression ( ) ( ) X − M + R représente le solde courant : Solde courant = PNB – A A est appeler, aussi, la dépense intérieure globale. Si le solde courant est positif, cela implique que la production nationale brute est supérieure à la dépense intérieure globale. Dans cette situation, on dit que le pays a réalisé une capacité d’épargne.
Il est créancier du reste de monde. Une appréciation de la monnaie nationale est favorable. Par contre, lorsque le solde est négatif, cela signifie que les dépenses dépassent le PNB. Dans ce cas, on dit que le pays a un besoin d’épargne. Pour réaliser ces dépenses, l’Etat doit s’endetter. Dans cette situation de déficit, une dépréciation de la monnaie nationale est convenable pour l’ajustement. L’examen du solde commercial du tableau 2.3, montre que la situation commerciale de l’Algérie était excédentaire durant la période 1970–1986, sauf pour 1971 et 1978. Cependant, cet état ne traduit pas une situation d’équilibre macroéconomique de paiement extérieur. D’où la nécessité d’examiner le solde de bien et service. Car ce dernier prend en considération les dettes extérieures.