La recherche-action
Qu’est-ce qu’une recherche-action ?
Notre recherche-action n’est pas facile à mener dans un environnement qui n’a pas encore complètement intégré les TIC dans l’enseignement des langues étrangères ni même dans d’autres matières. Les trois niveaux éducatifs (macro, méso et micro) ont fait l’objet d’une analyse selon M.-J. Barbot (2002) : « construire une méthode de recherche sur l’innovation qui est effectuée non seulement par le niveau micro (pratiques d’enseignements et d’apprentissage), mais aussi par le niveau méso (l’établissement) et par le niveau le niveau macro (approches politiques et philosophiques et finalités) ». En nous appuyant sur le plan épistémologique (Annoot et Bertin, 2013. 100), nous cherchons à résoudre les problèmes, Bertin (2000 : 27) met l’accent sur la construction d’une méthodologie propre au chercheur visant un champ d’étude : « Le chercheur doit, pour chaque sujet d’étude, construire son propre cadre de référence par rapport à des théories déjà stabilisées. Pratiquement, c’est le sérieux de sa méthodologie qui fondera l’activité en tant que (future) science ». Dans le cadre de notre recherche-action, nous nous appuyons sur les travaux développés par des didacticiens linguistes et pédagogues qui donnent chacun une définition de la recherche-action selon leur vision et leur expérience, d’après Jean-Paul Narcy-Combes : « La recherche-action imposerait que chacun complète sa boite à outils épistémologique, elle mesurerait les effets de contexte et réduirait les effets négatifs de décisions prises ailleurs, […] Elle serait plus efficace que l’injonction et la croyance magique que dire c’est faire, ou faire faire. La pertinence et la cohérence des décisions pourraient ainsi être mesurées sur le terrain, […] Les publications de résultats limiteraient les effets de rumeur ou de mode. […] Elle faciliterait néanmoins la collaboration entre des partenaires d’origines diverses ». (2005 : 92) La recherche-action dont le principe est de travailler sur la réalité sociale est soumise à des critères scientifiques. Cette activité permet au chercheur de bien connaître cette réalité. Demaizière et Narcy-Combes (2007 : 15-16) affirment que la recherche-action « se positionne souvent en contraste de la recherche expérimentale, il serait plus juste, selon Juan, de dire qu’elle relève de l’expérimentation, mais d’un point de vue compréhensif (Juan, 1999 : 13). Son approche est qualitative plus que quantitative », La recherche-action s‟oppose à la La recherche-action 200 recherche dite expérimentale. Celle-ci induit une approche davantage qualitative que quantitative. Ainsi le chercheur est directement impliqué dans l‟action ; son rôle ne se cantonne pas à être observateur. Son objectif n‟est pas de valider une hypothèse mais d‟obtenir des réponses à des questions au cœur de la recherche portant sur les pratiques pédagogiques. Le chercheur définit un certain environnement d‟apprentissage dans lequel s‟inscrivent des tâches et des activités et justifie pourquoi ses choix débouchent sur des effets positifs. Néanmoins, une recherche-action ne dispense pas le chercheur de se positionner épistémologiquement et de formuler une problématique guidant la recherche afin de correspondre aux cadres institutionnels et conceptuels dans lesquels cette recherche prend place. Avant d‟être en mesure de généraliser les résultats de notre recherche, il est nécessaire de comprendre la réalité et l‟état des lieux qui existent dans le contexte que nous voulons traiter. Rivens Mompean et Barbot (2009 : 14) se réfèrent également à Narcy-Combes et affirment qu‟il est concevable que la recherche-action situe le chercheur entre émotion et rationalisation de par la distance qu‟elle installe. En effet, chaque système cognitif procède par étapes qui induisent de l‟émotion, de l‟action, la rationalisation puis la réflexion chez le sujet (Narcy-Combes 2005). Il faut souligner que ceci est vrai à la fois chez l‟apprenant et chez l‟enseignant. D‟après Grosbois (2007 : 68) cité par Chachkine résume les étapes qui constituent la démarche expérimentale de la façon suivante : « – Un questionnement, – Un problème à résoudre, – La formulation d‟une hypothèse – La mise à l‟épreuve de l‟hypothèse. – Une vérification qui permet la validation. – Une généralisation ». (2011 : 30) Selon un problème posé, chaque question exige une ou réponse. C‟est pourquoi les étapes à suivre doivent être bien déterminées afin d‟obtenir des résultats. Si ces derniers sont validés après une vérification, ils peuvent, par la suite, être en mesure de généraliser. Barbot M. J. (Rivens Mompean et Barbot 2009, 15‑16) cite un extrait de la lettre de mission du Comité pour l‟Observation et l‟Orientation du Dispositif de Formation dit le ODIF, Recherche-action sur le RUCA, Réseau Universitaires de centres d‟Autoformation 201 (2000-2001) auquel elle a participé en reprenant la présentation de recherche-action rédigée par Jacquinot : « Le mode de travail adopté est celui de la « recherche-action » en ce sens : – qu‟elle permet de soutenir l‟action des partenaires sur le terrain en leur fournissant instrumentation, argumentaire, vocabulaire commun et les aidant à former d‟autres partenaires et à détecter les nouveaux besoins et les soutiens spécifiques ; -qu‟elle procède par étapes successives qui sont l‟identification des changements à produire, […] l‟observation et l‟analyse des comportements, interactions et rôles à travers les divers tâches réalisées […], le soutien de la minorité agissant dans le sens du changement visé, par la visibilité, l‟audience et l‟expertise, enfin la mise en commun de nouveaux modes de fonctionnement du système sans exclusion ni nouvelle marginalisation ».Les trois niveaux macro, méso et micro Afin d‟accompagner une innovation ou bien un développement pédagogique dans un établissement scolaire ou universitaire, il est nécessaire de comprendre le changement dans ses contextes. Tapia (1994 : 35) montre que « la double difficulté réside dans l‟impossibilité à la fois de considérer un facteur prédominant sur lequel agir pour optimiser les comportements, mais aussi d‟établir une typologie exhaustive des contextes organisationnels ». Il souligne qu‟il existe des contextes différenciés dont l‟analyse a priori est nécessaire pour la conduite de l‟innovation, en particulier dans ces systèmes complexes de formation à distance. Pour Fichez (2002 : 176) citée par Guichon (2012 : 16) qui préconise d‟envisager la notion de l‟innovation comme « un processus d’appropriation sociale […] lié à une dynamique qui s’appréhende à trois niveaux différents, micro-individuel (aspects cognitifs et affectifs), méso-social (relations entre les acteurs) et macrosociologique (normes, valeurs, culture de l’organisation…) ». Guichon (Ibid 2012 : 8‑25), à son tour, insiste sur le fait de « comprendre les enjeux de l’intégration des TIC à plusieurs niveaux, du micro (tâche d’apprentissage) ou des études micro (contextualisées dans un seul établissement ou dans une formation) au méso (communauté de pratique, groupes de futurs enseignants en formation), jusqu’à un niveau plus macro (professeurs d’une académie), aidés en cela par les apports théoriques et l’analyse de données diverses ou des études qui vont fournir des données relatives à tout un territoire ou concernant plusieurs pays ». Notre enquête de terrain que nous détaillons et analysons dans un prochain chapitre (chapitre 9) met la lumière sur ces niveaux. Le niveau macro est éloigné de la situation concrète de l‟enseignement/apprentissage. La situation actuelle du pays (telle que nous avons évoqué au chapitre 1.4) marquée par un manque significatif de sécurité est l‟un des facteurs déterminants. Au-delà de la situation politique et culturelle, les conditions sociales et économiques y jouent un rôle primordial. En revanche, la situation concrète de l‟enseignement et de l‟apprentissage est plus proche du niveau méso dont le contexte est défini par le type du département dans lequel a lieu l‟action pédagogique. Il est aussi défini par la nature du dispositif envisagé. Le niveau de décision est celui des administrateurs de l’éducation des inspecteurs, des équipes de directions des organismes de formation, des directeurs. En ce qui concerne le niveau micro où les ressources matérielles et humaines, et les conditions spacio-temporelles de l’intervention pédagogique sont au cœur du sujet de l‟enseignement/apprentissage. Le nombre d’apprenants, la nature de l’espace, les durées des séances pédagogiques, le type de matériel à disposition sont concernés par ce niveau et impactent de façon directe les conditions concrètes de l’action. Il s‟agit d‟un contexte très proche des enseignants ainsi que des apprenants, qui va peser sur les modes pédagogiques, la relation pédagogique enseignant/apprenant, le type d’interactions humaines, les techniques et supports utilisés. Les trois types de contextes sont reliés par des interactions. Le « macro » pèse sur le « méso ». De plus, ces deux niveaux de contexte pèsent conjointement sur la situation d’enseignement/apprentissage proprement dite, au niveau « micro » » (Rivens Mompean, 2013 : 354-355). Les trois niveaux macro, méso et micro peuvent être articulés comme montre le Rousseau (2011: 133) cité par Rivens Mompean (Ibid. : 356) cette articulation est possible « par une lecture systémique entre les phénomènes relevant de plusieurs dimensions : -contexte par le niveau macro des politiques, règlementation ; -pilotage par le niveau méso de l‟organisation, de l‟organisation, de formation, de la conception, et des valeurs affichées ; -dimension pédagogique par le niveau micro qui reprend en action l‟ingénierie de la formation et souligne le vécu des acteurs : combinaison entre des formes d‟enseignement traditionnel et des savoir d‟action ». Grosbois (2015) résume que « l‟usage du numérique dans le supérieur fait se conjuguer plusieurs niveaux : micro (pédagogique), méso (organisationnel) et macro (institutionnel /politique). » Rivens Mompean (2013 : 334) explique l‟apprentissage des langues en autonomie dans un dispositif institutionnel par la réinjection du positionnement épistémologique au niveau opérationnel (Cf. Figure 10) ainsi : 204 Figure 10 : Réinjection du positionnement. Source Rivens Mompean (2013 : 334).
Le choix de la plateforme
Moodle Chomsky (1966 : 52) souligne que l’enseignant de langue peut décider et accepter des propositions soit en langue soit en psychologie : « C’est au professeur de langues lui-même qu’il appartient de valider ou de réfuter toute proposition spécifique, et il y a bien peu de choses en psychologie et en linguistique qu’il puisse accepter aveuglément » c’est pourquoi nous nous trouvons devant un choix d’une plateforme de type pédagogique parmi plusieurs autres plateformes en pensant aux besoins et profits de nos étudiants. Suite à l’étude que nous venons de faire en détaillant certaines plateformes et ce que nous allons décrire ci-après, nous voyons que la plateforme Moodle est un bon choix pour notre contexte actuel pour des raisons que nous trouvons juste. Tout d’abord, c’est une plateforme sous licence libre et gratuite ce qui facilite auprès de l’autorité universitaire l’obtention d’un avis favorable pour l’installer. Ses modules et son interface sont bien pensés et qui donnent aux utilisateurs une liberté d’y travailler. La plateforme Moodle possède des fonctionnalités multiples qui assurent un bon environnement de se rendre pour apprendre et enseigner. Parmi ces fonctionnalités, nous constatons que cette plateforme est une classe virtuelle dont les possibilités sont variées. Elle permet des échanges avec les étudiants, et par ce moyen nous pouvons transmettre des documents, informer les étudiants régulièrement, consulter leur profil (e-mail), recueillir leurs devoirs électroniques, créer des groupes pour des projets, susciter des discussions via des forums et informer les étudiants sur leurs notes. La gestion de la plateforme peut être menée par un ou plusieurs administrateur(s), utilisateur(s) spécial(aux) défini(s) lors de l’installation. L’administrateur, grâce à des « thèmes » (plug-in), peut personnaliser les couleurs, les polices, les mises en page, etc. de la plateforme pour l’adapter selon des besoins spécifiques. Des filtres peuvent être ajoutés (plugin) modifiant le rendu des pages en sortie après leur construction (filtrage, liens automatiques, génération de formules mathématiques, conversion des liens multimédia). La gestion des utilisateurs dont l’objectif est de réduire le travail de l’administrateur à un minimum, tout en conservant une haute sécurité avec plusieurs mécanismes d’authentification qui sont supportés, grâce à des modules (plug-in), permettant une intégration facile à des systèmes existants. Comme les enseignants peuvent désigner manuellement leurs étudiants au besoin, ils peuvent également désinscrire manuellement des étudiants de leur cours. Sans cela, 206 les étudiants sont automatiquement désinscrits du cours après une certaine période d’inactivité (fixée par l’administrateur). La gestion des cours permet de les organiser en catégories sur un nombre non limité de niveaux. Il est possible de déléguer à certains utilisateurs la gestion de certaines catégories. L’enseignant qui contrôle tous les réglages de son cours, peut même en interdire l’accès aux autres enseignants. Les cours peuvent être compressés dans un fichier zip à l’aide de la fonction de sauvegarde. Ils peuvent ensuite être réutilisés sur n’importe quel serveur Moodle. Les cours peuvent prendre des formats différents : hebdomadaire, thématique et informel, centré sur la discussion avec le choix de plusieurs activités sur ces cours : forums, tests, ressources, sondages, devoirs, chats, ateliers. Les étudiants peuvent déposer leurs devoirs (sous tous formats de fichiers) sur le serveur qui enregistre la date du dépôt. La remise en retard des devoirs est autorisée, mais la durée du retard est clairement indiquée à l’enseignant qui peut permettre de déposer à nouveau un devoir après évaluation, en vue de renoter le travail. Le chat permet une interaction synchrone souple par écrit avec l’affichage de l’image des profils dans la fenêtre de chat. Toutes les sessions sont enregistrées et peuvent être repassées plus tard. Les enregistrements peuvent être mis à disposition des étudiants. Un sondage peut être utilisé pour un vote sur un sujet ou pour obtenir un feedback de la part de tous les étudiants qui peuvent être autorisés à voir un graphique des résultats. Des forums, nous en trouvons différents types qui sont disponibles, par exemple seulement pour enseignants, nouvelles du cours, ouvert à tous et une discussion par utilisateur. Les discussions peuvent être affichées emboitées, à plat ou en fils de discussion, les messages les plus anciens ou les plus récents en premier. Chaque participant peut s’abonner à chaque forum pour en recevoir les copies des messages par courriel. L’enseignant peut forcer cette option pour tous les participants. En ce qui concerne les tests, les enseignants peuvent définir une base de données de questions pouvant être réutilisées dans d’autres tests. Ces questions peuvent être organisées en catégories, afin de faciliter leur réutilisation. Les catégories peuvent être « publiées » pour les rendre accessibles depuis tous les cours du site. Les questions prennent différents types comme les questions à choix multiples qui permettent les réponses uniques ou multiples ; des questions à réponses courtes (mots ou phrases) ; des questions « Vrai-Faux » ; des questions 207 d’appariement ; des questions aléatoires ; des questions numériques (avec intervalles de tolérance) ; des questions en format Cloze avec les réponses intégrées dans le texte. Le module ressource permet l’affichage de tout contenu électronique, par exemple des documents PDF, Word, Powerpoint, animations Flash, séquences vidéo, sons, etc. Les fichiers peuvent être déposés et gérés sur le serveur, ou alors créés à la volée à l’aide de formulaires web (texte ou HTML). Le module wiki permet la rédaction de documents de façon partagée et il permet de distribuer des volumes de pages éditables aux élèves, aux enseignants, à l’ensemble de la classe suivant plusieurs modalités de partage. Le glossaire qui permet de stocker des listes de définitions, ses articles peuvent être automatiquement liés dans les autres contenus de Moodle. La base de données qui permet la collecte d’informations structurées sur un modèle défini par l’enseignant, permet également de définir les champs constituant la fiche et leur type (texte, case à cocher, fichier à télécharger, image, etc.). Le réseau assure à plusieurs sites Moodle de coopérer en réseau avec échange de leurs bases d’utilisateur. Il permet la circulation fluide des utilisateurs dans un ensemble de plateformes liées et l’inscription à distance des utilisateurs d’une plateforme dans une autre. (MoodleDocs : 2016). Ce que nous venons de traiter, nous pousse à installer cette plateforme sur le serveur de l’université de Mossoul. Ce qui nous permettra par suite de déposer des cours afin d’initier le travail sur cet environnement..