La scénarisation pédagogique informatisée pour rationaliser et capitaliser l’expérience professionnelle
Harmoniser le processus de création de scénarios pédagogiques informatisés : outils et méthodes
La création d’un scénario pédagogique est l’aboutissement d’un processus cognitif de la part de l’enseignant. Le scénario doit être pensé pour aboutir à l’harmonie et la cohérence de l’activité d’enseignement ou d’apprentissage qui en découle. Pour soutenir ce processus cognitif, Brassard et Daele (2003) ont mis en place un outil de questionnement comportant dixsept dimensions regroupées en quatre pôles : orientation et choix pédagogiques de départ, activités, acteurs et rôles, outils et processus. Lors de l’expérimentation en situation réelle de formation, les formateurs initiés à l’utilisation de l’outil ont apprécié le fait que l’outil a permis à des formateurs n’ayant jamais conçu une formation à distance de le faire. Rendant compte dans sa thèse des travaux effectués dans le cadre de la scénarisation pédagogique informatisé, Emin (2010) affirme qu’ils ont abouti à la création des EML (Educational Modelling Language). Il leur est reproché leur caractère figé qui ne leur permet pas de prendre en compte le caractère dynamique de toute situation pédagogique, appelée à s’adapter aux évènements qui surviennent en cours de mise en œuvre. En effet, le concepteur du scénario ne peut y exprimer explicitement l’approche pédagogique adoptée. Ce qui est un obstacle à la réutilisation du scénario. Pour pallier cette insuffisance, des modèles ont été proposés et associent des outils d’édition facilement maîtrisables par les enseignants. Le modèle ISiS (intentions, stratégies, situationstypes d’interaction) explicite les dimensions intentionnelles, stratégiques, tactiques et opérationnelles du processus de conception des scénarios pédagogiques (Emin, 2010). Il est supporté par le logiciel ScenEdit à l’usage des enseignants-concepteurs. Ouraiba, (2012) propose une approche d’ingénierie et de réingénierie pour rendre un EIAH ouvert à la conception et à l’adaptation de ses scénarios pédagogiques par les enseignants utilisateurs. Il définit un processus de conception continue basé sur la modélisation de scénarios pédagogiques ouverts. Ce modèle devrait permettre à l’enseignant de continuer à adapter son scénario au fur et à mesure de sa mise en œuvre, les situations d’enseignement étant essentiellement instables et même mouvantes. 81 Sur la base de l’analyse clinique de l’activité, Mahlaoui (2010) conclut que la scénarisation pédagogique suppose que l’enseignant soit en mesure de mettre en mots ses pratiques pédagogiques sous la forme d’un processus réflexif et qu’il puisse dépasser la crainte de se dévoiler à ses pairs ou auprès de sa hiérarchie. Macedo-Rouet et Perron (2007) ont construit, dans le cadre du projet PrimTICE, une grille de codage selon la méthode d’analyse de contenu pour analyser les scénarios pédagogiques en retenant les éléments suivants : titre, clarté du titre, auteur, date, public-cible, domaines et compétences disciplinaires concernées, description du déroulement des activités, lieu de réalisation des activités, ressources TICE utilisées, justification de l’apport des TICE, productions des élèves, types de production et types d’activités réalisées par les élèves. Ceci soulève le problème plus général de la transférabilité des scénarios. La description du déroulement de l’activité est la rubrique la plus sujette à controverse chez les juges qui ont expérimenté l’outil. Ce qui dénote de la difficulté à formaliser et harmoniser la pratique de la transmission des connaissances. Le choix et l’organisation des activités de chacun des acteurs du processus enseignement/apprentissage nous semblent être des points importants dans l’analyse de l’acte d’enseigner. Le projet en question a eu le mérite de montrer que les enseignants ne savaient pas ce qu’ils devaient faire des scénarios qui leur étaient proposés bien qu’un tiers d’entre eux trouvaient ces scénarios utiles. D’où la nécessité de donner une formation aux utilisateurs de ces scénarios. Nous comprenons que la disponibilité seule des outils ne suffit pas. Il est nécessaire que les utilisateurs potentiels soient informés de leur existence et qu’ils soient formés sur ce qu’il faut en faire et comment le faire. C’est tout une politique de l’intégration de l’intégration des TIC qui doit être définie et mise en œuvre.
Intégrer les TIC dans les pratiques quotidiennes de l’enseignant : pourquoi et comment ?
Au Cameroun, les TIC s’imposent de plus en plus comme incontournables dans l’activité pédagogique. Sur le plan stratégique, le Document de Stratégie du Secteur de l’Education et de la Formation (MINEPAT, 2013) prévoit la généralisation de l’utilisation des TIC dans le système d’éducation et de formation au Cameroun au courant de la période 2013-2020. Dans ce document, il est prévu que la modernisation du système d’éducation et de formation à tous les niveaux se fera par une intégration et une appropriation des TIC à travers une dotation suffisante en infrastructures numériques et une formation solide de tous les acteurs. Il s’agira de : – renforcer les capacités des enseignants et du personnel d’encadrement à l’utilisation de l’outil informatique et des ressources pédagogiques numériques ; – promouvoir de nouvelles opportunités et de nouveaux outils de formation (E-learning, formation à distance, les didacticiels, etc.) ; – améliorer l’environnement des apprentissages dans les écoles (centres multimédia, dotation des écoles en outils informatiques, etc.) – mettre en place un dispositif opérationnel pour la maintenance préventive et curative du parc informatique. En 2009, une étude réalisée par Karsenti et Tchameni Ngamo révélait que l’utilisation pédagogique des TIC dans le cadre de l’enseignement d’une discipline scolaire était limitée dans de nombreuses écoles d’Afrique. Les résultats de l’étude faisaient ressortir que 50% des institutions d’enseignement observées pratiquaient l’enseignement de l’informatique au point qu’il était fréquent de retrouver des exposés magistraux portant sur l’usage de navigateurs Internet alors qu’il s’agissait de « préparer l’enseignant à s’approprier des technologies pour changer, voire améliorer les pratiques pédagogiques » (Fonkoua, 2009). 30% de l’échantillon était dans la logique d’amener les élèves à s’approprier les TIC. Les élèves appréciaient cette façon de faire puisqu’ils étaient activement impliqués dans la leçon et étaient appelés à utiliser l’ordinateur, d’où un impact important sur leur motivation. Pour certains enseignants, c’était difficile à gérer car les élèves n’écoutaient plus l’enseignant, mais l’ordinateur. Des enseignants trouvaient que cette méthode leur faisait perdre le contrôle de leur classe, l’ordinateur serait alors une menace pour le rôle du professeur. 11% des enseignants utilisaient les TIC pour enseigner des disciplines. Les TIC permettaient à l’enseignant d’améliorer la préparation de ses cours (images d’Internet pour illustrer). Certains enseignants dépassaient le cadre de la préparation et utilisaient les TIC en classe. Les TIC permettaient ainsi de pallier au manque de laboratoires et des ressources pédagogiques. 5% des enseignants amenaient les élèves à s’approprier diverses connaissances, avec les TIC. Ces résultats nous montrent qu’à cette date, seulement 16% des enseignants avaient compris que l’intégration des TIC consistait à utiliser les technologies pour enseigner et pour apprendre. Pour ce faire, l’enseignant est obligé de développer de nouvelles compétences. En effet, les nouvelles technologies viennent avec de nouvelles fonctionnalités qu’il faut maitriser (Dessus et Soubrié, 2012). La mise en œuvre d’une activité d’enseignement-apprentissage ne s’arrête pas à la maîtrise du nouvel outil. Pour Descombris (2010), l’usage du TBI à des fins pédagogiques requiert de la part de l’enseignant des compétences qui relèvent à la fois de l’utilisation des TIC et, dans certaines situations, de l’édition de cours multimédiatisés. L’enseignant doit être prêt à faire face aux possibles dysfonctionnements du matériel en même temps qu’il gère sa classe. De plus, il doit mettre en œuvre de nouvelles méthodes pédagogiques pour s’adapter à la technologie nouvelle. Karsenti, Depover et Komis (2007) estiment que le moment où les TIC arrivent en classe n’est pas le plus important. L’essentiel est « leur utilisation judicieuse et pédagogique dans l’enseignement en vue de l’atteinte des finalités de l’école ». Pour Descombris (2010), la qualité d’un enseignement ne réside pas dans les supports euxmêmes mais dans la façon dont ils sont utilisés à des fins d’apprentissage. Elle renchérit, concernant la préparation des ressources à utiliser à partir du TBI, en disant que l’enseignant doit réaliser, en amont, des opérations exigeantes en temps et délicates à mettre en place. Ce qui peut constituer un frein à l’utilisation de l’outil.