L’image de pays d’origine
Évolution chronologique des recherches sur l’effet « pays d’origine
De nombreuses recherche sont souligné l’importance de l’effet du pays d’origine (encore appelé effet « COO262»). Selon Usunier (2005263) le nombre d’études publiées sur ce sujet dépasse 1000, dont plus de 400 étant trouvé dans des revues académiques. Les premières études sur cette question ont eu leur début avec l’enquête menée par Schooler (1965264), qui a montré que les évaluations faites par les consommateurs d’un jus hypothetic étaient différentes lorsque l’on compare deux produits avec les mêmes spécifications, mais l’information « made in » représenté sur une seule d’entre elles. Toutes ces études ont cherché à explorer cette notion et notamment comprendre en quoi elle influence les consommateurs dans leurs décisions d’achat. Usunier (2005265) propose une présentation chronologique de l’évolution des recherches sur l’effet « pays d’origine » en distinguant trois grandes périodes. Nous reprendrons son découpage pour notre analyse (Voir figure I.6).
Milieu des années 1960 à 1982 : début des recherches sur l’effet « pays d’origine »
Dans les premières années des effets du pays d’origine ont souvent été évalués dans l’isolement: il était le seul facteur qui diffère entre les choix de produits dans les premières expériences. Au cours de cette période, les recherches sur le pays d’origine ne sont qu’à leur début. La notion de pays d’origine, “country of origin” en anglais (COO), a été pour la première fois employée par Dichter en 1962266 . Il expliqua que le pays d’origine d’un 262 Country of origin effect. 263 UsuŶieƌ, J. C. ;ϮϬϬϱͿ. Le paLJs d’oƌigiŶe iŶflueŶĐe-t-il encore les évatuations des consommateurs. Revue Française du Marketing, (189/190), 49-65. 264 Schooler, R. D. (1965). Product bias in the Central American common market. Journal of Marketing Research, 394-397. 265 Usunier, J. C. (2005). Op, cit. L’image de pays d’origine
Évolution chronologique des recherches sur l’effet « pays d’origine »
produit pouvait avoir une énorme influence au niveau de l’acceptation et du succès d’un produit. Par la suite, Schooler267 a été le premier à conduire un test empirique sur cette notion en 1965. L’auteur proposait ainsi à un échantillon composé d’étudiants guatémaltèques d’évaluer les jus de fruits pour lesquels les pays d’origine indiqués étaient différents (Salvador, Costa Rica, Mexique et Guatemala). Il a montré qu’un même produit, pourtant identique sous tous ses aspects mais provenant de deux pays différents, était perçu différemment par les consommateurs. Autrement dit, ils étaient influencés par des stéréotypes à l’égard de ces pays (Schooler, 1965268). Un an plus tard, Reierson (1966269) a réalisé une enquête auprès d’étudiants américains en les questionnant par rapport à la qualité des produits originaires des pays différents. Il a constaté que l’effet de pays d’origine était présent pour les produits généraux, des classes de produits et de produits spécifiques. Sa conclusion rejoint celle de Schooler : dans leurs évaluations de produits étrangers les consommateurs américains font appel à des stéréotypes-pays. Schooler et Wildt (1968270) proposaient d’évaluer deux verres identiques : le premier comportant la mention « Made in USA » et le second « Made in Japan ». Le verre « made in USA » ayant été mieux évalué que l’autre, les auteurs en ont conclu que comme les produits étaient identiques, les différences en termes d’évaluation étaient dues à des préjugés à l’égard du pays de fabrication de ces produits. Dans les années 70, d’autres études voient le jour comme celles de Nagashima (1970271, 1977272). Nagashima a réalisé deux études avec sept ans d’intervalle (1970 et 1977) auprès des hommes d’affaires américains et japonais avec le même objectif : comment les hommes d’affaires américains et japonais perçoivent-ils les produits étrangers ? Au terme de la première étude, l’auteur a découvert que les mauvais préjugés concernant les produits japonais sur le marché américain changeaient en devenant plus favorables et ce grâce à l’expérience satisfaisante des consommateurs avec les produits originaires du Japon. Ces résultats ont été confirmés par la seconde étude où il s’avérait en effet que même si le profil du « Made in USA » n’a pas changé de manière substantielle, le statut relatif des produits américains s’est fortement dégradé au profit de ceux originaires d’Allemagne ou du Japon. L’amélioration de l’image des produits japonais a été visible non seulement du point de vue des consommateurs étrangers mais aussi des Japonais euxmêmes. Ces deux études mettent donc en avant l’aspect dynamique de l’image du pays d’origine d’un produit. Les travaux de cet auteur font encore aujourd’hui référence, grâce notamment à l’échelle de mesure d’image du pays d’origine d’un produit en vingt items et cinq dimensions : le prix et la valeur, le service et l’ingénierie, la publicité et la réputation, le design et le style et le profil du consommateur. Au cours de la prochaine période, on s’accordera pour dire que les consommateurs ne prennent pas en compte, au moment de leurs évaluations, le seul pays d’origine ; d’autres variables rentrent en ligne de compte.
Années 1980-début des années 1990 : début des recherches multi-attributs
La deuxième phase, 1982-1990, en commençant par la revue séminale de Bilkey et Nes (1982273), y compris les recherches sur le phénomène du pays d’origine jusqu’en 1980, a marqué une nouvelle augmentation du volume de la recherche sur le pays d’origine. Au début des années 80 les chercheurs ont commencé à examiner les effets du pays d’origine par rapport à d’autres attributs de produit extrinsèques et intrinsèques, tels que le prix, le risque perçu, etc. (Bilkey et Nes, 1982274; Papadopoulos et Heslop, 1993275). Bilkey et Nes (1982276) suggèrent que le lieu de la fabrication (ou design, etc.) est considéré comme un d’un ensemble des attributs d’information disponibles pour le consommateur lors de l’évaluation d’un produit et non pas le seul. Ils insistent sur le fait que d’autres attributs doivent également rentrer en ligne de compte : ces derniers peuvent être intrinsèques, autrement dit faisant partie intégrante du produit (par exemple, la couleur, le goût, la performance, etc.), ou extrinsèques (prix, marque, garanties). C’est donc à partir de cette période que les recherches se multiplient, en devenant de plus en plus nombreuses et complexes (« multi-attributs »). La plupart des études antérieures sur la construction multi-dimensionnelle du pays d’origine concentrées sur les avantages fonctionnels des produits, et la mesure des effets du pays d’origine a été par conséquent sur la base des fonctions d’un produit, telles que la 2. Il convient de noter que la plupart des études mentionnées ici centré sur les attributs fonctionnels de haute implication et de haute technologie, des produits tels que les automobiles et les produits électroniques ménagers. Par conséquent, presque tous les éléments utilisés pour mesurer les effets du pays d’origine contenaient des aspects tels que la qualité, la finition, le design et la technologie. Or, la plupart des pays font aussi faible implication et de faible technologie des produits, qui affectent également l’image du pays. De plus, la notion de pays d’origine s’avère aujourd’hui plus difficile à définir étant donné la mondialisation de la production et la multiplication des délocalisations (Tse, D. K., & Lee, W. N., 1993285). Les chercheurs parlent alors de produits hybrides «ceux dont la conception est réalisée dans un pays et la fabrication dans un autre » de plusieurs pays (Han et Terpstra, 1988286 ; Johansson et Nebenzahl, 1986287 ; Tse et Gorn, 1993288 ; Tse et Lee, 1993 ; Iyer et Kalita, 1997289). Par conséquent, ces dernières années, les concepts de l’effet de pays d’origine ont été révisés, pour incorporer le caractère multinational de nombreux produits et services physiques existants.